M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le maniement d'espèces par les services de police.
Dans un récent rapport publié en mars 2014, la Cour des comptes demande une modification de la gestion des frais d'enquête et de surveillance dans la police nationale. En effet, il est mentionné qu'aucun compte d'emploi n'a été établi entre 2002 et 2012 concernant les sommes versées, en liquide, pour rembourser les frais supportés par les fonctionnaires de police. Une stricte limitation de la circulation d'argent liquide est, semble-t-il, indispensable.
L'absence de surveillance dans le maniement d'espèces, au sein même de la direction générale de la police nationale (DGPN), n'est pas compatible avec la nécessaire transparence.
Aussi, il lui demande quelles mesures le Gouvernement entend adopter pour définir précisément les frais d'enquête et de surveillance, permettant de mettre enfin un terme à ces transactions mystérieuses d'argent liquide au sein du cabinet du directeur général de la police nationale ainsi qu'au niveau des directeurs centraux et des responsables territoriaux.
Le ministre de l'intérieur a saisi le 2 mai 2013 l'inspection générale de l'administration (IGA), en lien avec l'inspection générale de la police nationale (IGPN), afin que soient apportées des précisions sur l'usage des frais d'enquête et de surveillance (FES). Le rapport a été remis au ministre le 10 juin 2013. Sur la base de ses recommandations, le directeur général de la police nationale a immédiatement adressé de nouvelles instructions aux directeurs des services actifs de police et au préfet de police (instruction du 26 juin 2013, complétée le 19 novembre 2013). Les frais d'enquête et de surveillance ont été institués par l'article 4 du décret du 15 juin 1926. Ils sont à distinguer de la rétribution des informateurs de justice prévue par l'article 15-1 de la loi du 21 janvier 1995 modifiée d'orientation et de programmation relative à la sécurité. Les modalités de règlement des crédits affectés aux frais d'enquête et de surveillance sont précisées par le décret n° 93-1224 du 5 novembre 1993, tandis que les modalités de rétribution des informateurs ont été précisées par un arrêté conjoint des ministres de l'intérieur, de la défense, de la justice et du budget en date du 20 janvier 2006. Si la question de l'usage de ces fonds pouvait légitimement être posée, il doit être souligné que ces versements sont dotés d'une base légale, et que leur utilité n'est ni contestable, ni contestée par l'IGA : ils sont destinés aux services de police et répondent à des objectifs opérationnels d'efficacité et de discrétion. Ils permettent exclusivement, depuis les instructions de 2013, de recueillir des renseignements, d'acquérir du matériel ou de mettre à disposition des moyens d'investigation dans des cas de confidentialité ou d'urgence impérieuse. Ils visent également à couvrir des frais engagés par les fonctionnaires de police, dont le remboursement ne peut être assuré dans le cadre des procédures administratives habituelles (remboursement des frais de déplacement). Le rapport des deux inspections générales remis le 10 juin 2013 formule un certain nombre de recommandations, que le ministre de l'intérieur a décidé de suivre dans leur intégralité, avec pour objectif de préciser l'objet de ces fonds et de rationaliser et tracer leur utilisation. Ces recommandations sont concordantes avec celles que la Cour des comptes a pu émettre dans son rapport du 23 décembre 2013. Ainsi, le ministre de l'intérieur a demandé à la direction générale de la police nationale de traduire rapidement dans les faits l'ensemble des recommandations, en mettant notamment un terme à certaines pratiques indemnitaires. Avant même que soient connus les résultats d'une étude exhaustive engagée sur l'usage précis de ces crédits par les services opérationnels (été 2013) et que le cadre juridique ait été modifié (élaboration du nouveau cadre réglementaire en cours), un dispositif transitoire a été mis en place dès le second semestre 2013 en application des instructions précitées des 26 juin et 19 novembre 2013. Ce régime : proscrit l'usage des FES pour toute forme de gratification ou de prime individuelle ou collective ; il en va de même pour le défraiement des sujétions ; proscrit l'usage des FES pour les dépenses de fonctionnement courant ou de représentation ; prescrit un régime strict de traçabilité ; met en place un mécanisme de contrôle interne et externe via l'IGA et l'IGPN. L'usage des frais d'enquête et de surveillance est donc désormais strictement limité aux seuls besoins opérationnels. Les indemnisations ou gratifications versées aux fonctionnaires de police ne pourront être versées qu'à partir des crédits prévus à cet effet et le régime de la prime de résultats exceptionnels (PRE) a été modifié en conséquence (instructions des 7 janvier et 18 avril 2014). Le cadre juridique des frais d'enquête et de surveillance sera prochainement modifié afin de limiter strictement leur usage aux besoins impérieux de l'activité de police (recueil de renseignement, dépenses d'équipement entrant dans le cadre de la confidentialité et/ou de l'urgence, défraiements ne pouvant être réalisés selon les règles de droit commun). Cette nouvelle base juridique permettra également de refondre entièrement le dispositif prévu pour la circulation des liquidités. Les deux premiers motifs (recueil de renseignement et achats de matériels ou de prestations confidentiels ou dictés par l'urgence) ne pourront être assurés que via des liquidités obtenues auprès des régies d'avances. Le dernier cas pourrait faire l'objet d'un remboursement via les régies. La confidentialité des traitants et des sources, comme la traçabilité des fonds, sera au cœur de ce nouveau dispositif. Le dispositif propre aux informateurs de justice, qui n'est critiqué ni par l'IGA ni par la Cour des comptes, ne sera pas refondu. En revanche les dispositions liées à la circulation des crédits (via les régies d'avances) lui seront appliquées (refonte du décret du 5 novembre 1993). Dès le mois de juin 2013, une comptabilité exhaustive et une traçabilité complète des usages ont été exigées des services. Un bilan annuel a été réalisé, permettant de redimensionner les notifications et attributions 2014 dans le cadre du régime transitoire. Des comptes rendus de gestion quadrimestriels sont demandés aux directions utilisatrices. L'IGPN et l'IGA contrôleront le respect de cette exigence. La démarche engagée permettra d'assurer une meilleure traçabilité des fonds, un encadrement strict de leur usage et un contrôle rigoureux et périodique.
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