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Hervé Maurey
Question écrite N° 11249 au Ministère de la culture


Conséquences pour les communes de l'irrégularité des avis rendus par les architectes des bâtiments de France

Question soumise le 17 avril 2014

M. Hervé Maurey attire l'attention de Mme la ministre de la culture et de la communication sur les conséquences pour les communes de l'irrégularité des avis rendus par les architectes des bâtiments de France (ABF).

Dans de nombreux cas, les communes chargées de délivrer des autorisations d'urbanisme sont tenues se conformer à l'avis des ABF. C'est le cas notamment des déclarations préalables, permis de démolir, permis de construire et d'aménager dans le champ de visibilité d'un monument historique ou, entre autres exemples, dans un secteur sauvegardé.

Or, récemment, plusieurs juridictions, telles que la cour administrative d'appel de Lyon le 29 novembre 2011 (n°10LY01616), ont conclu à la responsabilité conjointe de l'État, en tant qu'autorité de tutelle des ABF, et des communes, en tant qu'autorité délivrant les autorisations d'urbanismes, lors de recours contre des autorisations délivrées par des communes se conformant à des avis entachés d'irrégularités.

Cette évolution est particulièrement inquiétante car, pour délivrer les autorisations d'urbanismes, les communes et leurs groupements sont tenus par la loi de se conformer aux avis des ABF alors qu'elles n'ont ni les moyens juridiques ni les compétences techniques dans la plupart des cas de s'assurer de leur régularité.

De surcroît, même s'il considère qu'un avis est entaché d'irrégularités, le maire ne peut que saisir le préfet de région au même titre que le pétitionnaire.

Aussi, il lui demande quelles conséquences le Gouvernement entend tirer de cette évolution de la jurisprudence.

Réponse émise le 1er janvier 2015

Chaque année, près de 400 000 dossiers sont instruits par les architectes des bâtiments de France (ABF), correspondant à 20 % des autorisations de travaux délivrées en France. Sur ces 400 000 dossiers, environ 200 000 font l'objet d'un avis qui lie l'autorité compétente pour délivrer l'autorisation de travaux, notamment les projets situés dans le champ de visibilité d'un immeuble classé ou inscrit au titre des monuments historiques ou dans un secteur sauvegardé. La procédure de recours administratif préalable obligatoire permet au demandeur et à l'autorité compétente de contester l'avis émis par l'ABF avant toute éventuelle saisine du juge administratif. On dénombre un peu moins de 100 recours administratifs préalables obligatoires, demandeurs et autorités compétentes confondus, sur les 400 000 dossiers instruits chaque année. Dans le cadre de ce recours, le dossier de demande d'autorisation de travaux et l'avis de l'ABF sont soumis à l'examen de la commission régionale du patrimoine et des sites composée de personnalités titulaires d'un mandat électif, de représentants de l'État et de personnalités qualifiées. Après cet examen, le préfet de région émet un avis qui se substitue à celui de l'ABF. Ce recours administratif préalable obligatoire constitue un véritable contrôle de l'avis de l'ABF. S'agissant des contentieux, le nombre de procédures dirigées contre une décision de l'autorité compétente mettant en cause l'avis émis par l'ABF est actuellement très réduit. Moins d'une dizaine de procédures contentieuses sont à dénombrer chaque année, dans lesquelles il revient au juge administratif de déterminer l'éventuelle mise en cause de la responsabilité des services de l'État ou des collectivités territoriales dans le cadre de leurs missions. Ainsi, le juge administratif a prononcé des condamnations financières à l'encontre de la commune et de l'État en raison des illégalités fautives susceptibles d'ouvrir un droit à réparation aux demandeurs dans la décision de la cour administrative d'appel de Lyon du 29 novembre 2011 évoquée, ainsi que dans un jugement récent du tribunal administratif de Rouen du 17 avril 2014 ayant prononcé une condamnation solidaire de l'État et de la commune de Bernay. Selon une jurisprudence bien établie, le juge administratif applique aux services de l'État et des communes les principes de l'indemnisation du préjudice (responsabilité civile) lorsque celui-ci est avéré. Cette responsabilité liée à l'activité des services est appréciée par le juge en fonction des circonstances et des erreurs commises et conduit souvent à des partages de responsabilité comme dans les deux décisions précitées. Pour les collectivités locales, cette responsabilité civile est couverte par une police d'assurances. Ces condamnations restent exceptionnelles mais confortent la nécessité pour les services du ministère de la culture et de la communication de poursuivre un processus d'amélioration des autorisations de travaux en espaces protégés engagé depuis 2010. Le déploiement de ce projet dans les services territoriaux de l'architecture et du patrimoine a permis notamment d'améliorer les délais et la qualité des dossiers traités. Une série d'actions a été déterminée et mise en œuvre dans les services afin d'assurer la clarté, la précision et la sécurité juridique des avis émis par les ABF au regard de la nature et des enjeux des dossiers de demandes d'autorisation de travaux.

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