M. Jean-Noël Cardoux attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales et de la santé sur les ruptures de médicaments de plus en plus fréquentes.
Entre février 2015 et novembre 2016, l'ordre des pharmaciens a, en effet, recensé près de 200 000 déclarations de rupture (médicament indisponible dans les 72 heures) signalées par les officines. Les vaccins sont les plus touchés (22 % manquants, avec un délai moyen de 139 jours), suivis par les produits dermatologiques (6 % et 116 jours de délai), les hormones systémiques (6 %, délai de 34 jours), les hormones sexuelles ou génito-urinaires (8 % et 100 jours) et les médicaments ciblant muscles et squelettes (3,1 %, délai de 129 jours).
Dans son dernier rapport d'activité, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) constate un nombre de déclarations de rupture multiplié par dix en cinq ans et qui concerne également des médicaments d'intérêt thérapeutique majeur.
Les causes de ces ruptures sont nombreuses et multifactorielles. L'Ordre des pharmaciens avance les principales causes suivantes : des difficultés liées à la production : capacité de production insuffisante, retard de production, incapacité de production (manque de matières premières - responsable de 17 % des ruptures selon l'ANSM -) usine détruite, défaut de qualité (suspension de l'activité d'un établissement, fabricant ou exploitant, à la suite d'inspections qui remettent en cause la qualité des médicaments...) ; la mondialisation de la fabrication (une seule usine pour tous les pays) et de la demande ; l'augmentation subite des ventes (recommandations d'utilisation d'un pays, report d'un médicament sur un autre…) ; la libre circulation des biens et la distribution vers des pays à prix plus avantageux, qui semble être une des causes déterminantes.
Aussi, il lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement pour remédier à cette situation qui a des conséquences négatives sur l'état de santé des malades qui ne réussissent pas toujours à avoir accès aux traitements de remplacement.
Les ruptures de stocks de médicaments ainsi que les tensions d'approvisionnement ont des origines multifactorielles susceptibles d'intervenir tout au long de la chaîne de production et de distribution. La mission de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) en la matière est d'assurer au mieux la sécurisation, au plan national, de l'accès des patients aux médicaments ne disposant pas d'alternatives thérapeutiques ou dont l'indisponibilité peut entraîner un risque de santé publique. Des ruptures d'approvisionnement peuvent également intervenir au niveau de la chaine de distribution ayant un impact local ou régional. Ces ruptures sont gérées par les laboratoires pharmaceutiques en lien avec les différents intervenants locaux concernés par la distribution. L'Agence intervient lorsqu'une rupture de stocks ou un risque de rupture lui est signalé, en limitant au maximum ces ruptures et en gérant les conséquences par l'accompagnement des laboratoires dans la gestion de telles difficultés (notamment par le biais de contingentement des stocks et de l'information des professionnels de santé et des patients). Pour autant, elle ne peut s'y substituer en ce qui concerne la production ou le stockage, ni imposer de contraintes en la matière à ce jour. Récemment, et compte tenu de l'augmentation des signalements de ruptures et risques de ruptures de stock constatée ces dernières années, la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé et son décret d'application du 20 juillet 2016 relatif à la lutte contre les ruptures d'approvisionnement de médicaments a apporté de nouvelles mesures de prévention et de gestion des ruptures de stock au niveau national afin de redéfinir les instruments à la disposition des pouvoirs publics et de renforcer les obligations qui pèsent sur les acteurs du circuit de fabrication et de distribution. Plus précisément, les entreprises exploitant des médicaments doivent assurer un approvisionnement approprié et continu du marché national et prendre toute mesure utile pour prévenir et pallier toute difficulté d'approvisionnement. Dans ce cadre, elles sont désormais contraintes de mettre en place des plans de gestion des pénuries (PGP) (création de stocks de sécurité, enregistrement de sites alternatifs de fabrication, identification de spécialités équivalentes à l'étranger, etc.) pour leurs médicaments d'intérêt thérapeutique majeur (MITM) et certains vaccins mentionnés parl'arrêté du 26 juillet 2016 fixant la liste des vaccins devant faire l'objet des plans de gestion des pénuries, dont l'indisponibilité aurait des conséquences graves et immédiates. Elles sont également tenues d'informer sans délai l'ANSM de toute rupture ou risque de rupture de stock sur ces médicaments et de mettre en place, après accord de l'ANSM, les solutions alternatives ainsi prévues, permettant de faire face à cette situation, ainsi que des mesures d'accompagnement et d'information des professionnels de santé et des patients. En ce qui concerne les grossistes répartiteurs, la loi du 26 janvier 2016 a précisé que lorsqu'ils ont rempli leurs obligations de service public, ces derniers peuvent vendre en dehors du territoire national ou aux distributeurs en gros à l'exportation des médicaments. Toutefois, ces opérations ne peuvent être réalisées sur des MITM. Par ailleurs, il appartient à l'ANSM de publier, sur son site internet, la liste des MITM ne disposant pas d'alternatives thérapeutiques appropriées ou disponibles en quantité suffisante pour lesquels une rupture ou un risque de rupture de stock est mis en évidence, et de décider si ces médicaments peuvent être vendus au détail par les pharmacies à usage intérieur des hôpitaux ou si les spécialités importées, le cas échéant, peuvent être délivrées en officine. Ainsi, l'ANSM tient à jour sur son site internet (www.ansm.sante.fr) une rubrique qui recense ces médicaments faisant l'objet de difficultés d'approvisionnement en France, accompagnée d'un certain nombre de documents d'information à l'attention des professionnels de santé et des patients, sur la situation relative à l'approvisionnement de la spécialité concernée ainsi que sur les mesures mises en œuvre pour assurer le traitement des patients. Enfin, toujours dans le but de garantir la sécurisation de l'approvisionnement du territoire national, les règles relatives aux conditions d'exportation applicables à ces MITM ainsi qu'aux vaccins par les grossistes-répartiteurs ont été renforcées, afin notamment d'interdire leur vente en dehors du territoire national, et ce dès lors qu'une rupture ou un risque de rupture de stock pour ces MITM est publiée sur le site internet de l'ANSM. En parallèle, l'ANSM continue d'échanger avec ses homologues européens afin de faire des propositions d'actions au niveau européen, le phénomène n'étant pas limité au seul territoire français. Concernant les vaccins, des difficultés perdurent pour certains d'entre eux. Dans ce contexte, un certain nombre de mesures ont été prises, comme notamment des modifications transitoires de la stratégie de vaccination nationale en s'appuyant sur les recommandations du Haut Conseil de santé publique, et ce afin de permettre d'assurer pendant cette période, de façon adaptée et en toute sécurité, la vaccination des patients qui le nécessitent (tels que la primo-vaccination et le rappel des enfants pour les vaccins contenant la valence coqueluche par exemple). Toutes les informations relatives à ces difficultés d'approvisionnement sont publiées sur le site internet de l'ANSM. On y trouve notamment des fiches synthétiques permettant aux professionnels de santé de s'approprier ces recommandations transitoires.
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