Déposé le 18 octobre 2019 par : M. Bonnecarrère.
Alinéa 3 à 12
Supprimer ces alinéas
Cet amendement propose de supprimer l’article 31, I, 1° bis, réintroduit par l’Assemblée Nationale après avoir été abandonné par le Gouvernement compte tenu des réserves du Conseil d’État.
Cet article propose d’introduire dans le code de la route les articles L. 130-11 et L. 130-12 qui permettent d’interdire les signalements des contrôles routiers par les services électroniques d’aide à la conduite ou à la navigation.
Les objectifs d’ordre, de sécurité et de sûreté publics poursuivis par ce dispositif sont partagés.
Cependant, les modalités proposées ne présentent pas de garanties suffisantes.
Il en résulte un risque majeur pour la sûreté de l’État.
D’une part, ce dispositif présente un danger grave pour la sécurité nationale, comme a pu le souligner le Conseil d’État dans son avis du 15 novembre 2018, dès lors qu’il est « susceptible de conduire à la transmission à des opérateurs privés d’informations potentiellement sensibles au regard de la sécurité et de la sûreté publique ».
Il permettra en effet à des puissances étrangères de connaître en temps réel le positionnement des forces de sécurité sur le territoire national. Ce positionnement sera transmis à des opérateurs privés dont les serveurs sont situés à l’étranger afin de créer des « zones blanches » dans leurs outils d’aide à la conduite pour que les automobilistes ne puissent pas signaler leur présence. Le risque est d’autant plus significatif que les opérations signalées porteraient aussi bien sur des contrôles d’alcoolémie et de stupéfiants que sur des opérations de police judiciaire en matière de criminalité et de terrorisme.
Il n’est donc pas admissible qu’une telle faille soit introduite dans le dispositif de sécurité nationale, permettant à des sociétés privées d’être informées préalablement et en temps réel du déroulement d’une opération de force de police sur le territoire national. Dans un communiqué en date du 31 mai 2019, le syndicat CFDT Alternative Police a d’ailleurs alerté les parlementaires « sur une grave atteinte à la Sécurité et à la Sûreté de l’État».
D’autre part, ce dispositif, à rebours de l’objectif visé, présente un danger majeur pour la sécurité des automobilistes. Il entravera la diffusion d’informations sur la sécurité routière, pourtant reconnue utiles par près de 9 millions de conducteurs au quotidien. L’instauration de « zones blanches » ne permettra plus aux conducteurs de signaler tout événement dangereux sur la route (tels que des accidents, bouchons, conditions de circulation dangereuses, etc.). Les automobilistes ne disposeront plus d’une information en temps réel sur l’état de la circulation et de la chaussée pourtant indispensable à leur sécurité.
Enfin, ce dispositif ne permet pas de satisfaire aux exigences constitutionnelles découlant du principe d’égalité.
De première part, il crée une rupture d’égalité, non justifiée au regard de l’objectif poursuivi, entre deux catégories d’opérateurs : ceux dont le siège social est situé en France, et qui sont soumis à la loi française, et ceux dont le siège social est situé à l’étranger, contre lesquels il n’existe aucun réel moyen de coercition.
De deuxième part, il entraînera un report automatique des informations dites « sensibles » sur les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, etc.) et les groupes de messagerie instantanée (Messenger, WhatsApp, etc.), lesquels ne sont pas soumis aux mêmes contraintes (comme en atteste, au sujet de Facebook, l’arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 6 septembre 2016 n° 15-86412). Il sera ainsi possible, pour les utilisateurs de Messenger ou de WhatsApp, d’intégrer un groupe fermé, composé exclusivement d’automobilistes effectuant le même trajet journalier, pour s’avertir mutuellement de la mise en place d’un contrôle d’alcoolémie ou de stupéfiants. Les effets de la mesure seront ainsi diamétralement opposés à l’objectif poursuivi.
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