Déposé le 21 janvier 2021 par : MM. Savoldelli, Pierre Laurent, Bocquet, Mme Gréaume, les membres du groupe communiste républicain citoyen, écologiste.
En application de l’article 44, alinéa 3, du Règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et les Gouvernements des États membres de l’Union monétaire ouest-africaine (n° 225).
Les auteurs de cette motion considèrent que l’adoption de ce projet de loi, autorisant le gouvernement français à entériner la réforme du franc CFA de la zone ouest-africaine, pose des problèmes tant sur la forme que sur le fond.
Sur la forme, le gouvernement demande aux parlementaires d’approuver une réforme dont les contours restent flous, notamment sur la future gouvernance de l’eco et la convention de garantie à venir.
Pire, ce projet, non discuté avec l’ensemble des partenaires de l’UEMOA, n’a fait l’objet d’aucune concertation avec les États de la CEDEAO et vient même court-circuiter les discussions en cours au sein de cette zone autour d’une monnaie remplaçant le franc CFA, le leone, le naira, le dollar libérien, le franc guinéen, le cedi, le dalasi et l’escudo cap-verdien.
De plus, il semble incohérent de procéder à une réforme qui ne touche qu’un des trois pans du franc CFA, la zone CEMAC et les Comores n’étant pour l’instant pas saisis d’un projet de réforme.
Pour finir, il est pour le moins regrettable que Paris se précipite alors même que d’une part, seul le Parlement ivoirien ait été saisi du projet, et d’autre part aucune consultation populaire n’ait été prévue. Ainsi, ce sont les premiers concernés qui se retrouvent exclus d’un projet de réforme qui emporte des conséquences majeures pour le développement social et économique des pays ouest-africains.
Sur le fond, cette réforme du franc CFA ne répond aucunement aux enjeux africains d’indépendance et d’autonomie réelle et de développement social et économique de la zone.
Si l’abandon du nom « franc CFA » trop connoté a une portée symbolique forte (et ceci malgré le fait que le nom « eco » soit une reprise du projet de la CEDEAO), rien ne marque réellement un recul de la France et de l’Europe dans les affaires monétaires de l’UEMOA.
En effet, la fin de l’obligation du dépôt des réserves de change au Trésor ne présage pas d’un retour de ces réserves au sein des Etats de l’Union ouest-africaine au vu de la pratique actuelle des gouvernements.
Et si la France sort officiellement de la gouvernance monétaire de la zone, elle y rentre par la fenêtre en s’arrogeant le droit d’une part de participer à la désignation d’une personnalité qualifiée et d’autre part de reprendre la main dans une situation qu’elle qualifiera de crise.
Par ailleurs, l’arrimage à l’euro, la convertibilité fixe et la liberté de circulation des capitaux, non-remis en cause par la réforme, privent toujours les États africains de leur capacité d’investissements et de structurations administratives (notamment fiscales) et favorisent avant tout les grandes entreprises françaises.
Pour l’ensemble de ces raisons, les auteurs de cette motion considèrent malvenus ce projet de loi et ce projet de réforme du franc CFA qui ne répond aucunement aux attentes des pays de l’Union ouest-africaine et annihile le projet travaillé par ces États eux-mêmes dans le cadre de la CEDEAO.
NB:En application de l'article 44, alinéa 3, du Règlement, cette motion est soumise au Sénat avant les orateurs des groupes.
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