Déposé le 8 juin 2021 par : MM. Gontard, Dantec, Fernique, Labbé, Salmon, les membres du groupe Écologiste - Solidarité, Territoires.
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Toute utilisation de substances per- et polyfluoroalkylées, telles quelles ou contenues dans un mélange, est interdite dans les matériaux en contact avec des denrées alimentaires au sens du Règlement (CE) n° 1935/2004 du Parlement européen et du Conseil du 27 octobre 2004 concernant les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires à compter du 1erjanvier 2023. Les matériaux en contact avec des denrées alimentaires contenant des substances per- et polyfluoroalkylées mis sur le marché avant le 1erjanvier 2023 sont tolérés jusqu’à l’épuisement des stocks.
Les substances per- et polyfluoroalkyles (PFAS) sont des composés perfluorés (les PFAS sont considérés comme une famille d’environ 4500 composés perfluorés) utilisés pour leurs propriétés chimiques particulières (propriétés antiadhésives, imperméabilisantes, d’isolation électrique, etc.). Ils sont largement utilisés par l’industrie pour des emplois très variés, notamment dans les revêtements antiadhésifs d’ustensiles de cuisine, dans le textile, ou encore et surtout dans les emballages alimentaires.
On retrouve en effet quasi-systématiquement ces PFAS dans les emballages en fibre végétale qui sont particulièrement utilisés dans la restauration rapide et la vente à emporter (notamment dans les emballages oléophobes, car les PFAS permettent de repousser la graisse). Cela a récemment été mis en évidence par la publication d’une étude le 20 mai 2021 menée dans six pays européens (Allemagne, Danemark, France, Pays-Bas, Royaume-Uni, République Tchèque) par neuf ONG (dont une ONG française, Générations Futures). Des traces de PFAS ont été retrouvées dans les 42 échantillons qui avaient été sélectionnés pour être analysés en laboratoire (on comptait, parmi ces échantillons, 28 échantillons oléophobes mais également 14 échantillons non oléophobes, dont la teneur en PFAS révèle donc une contamination de fond des emballages).
Le remplacement des emballages en plastique par des emballages en fibre végétale ne présente que peu d’intérêt écologique si ceux-ci sont traités aux PFAS. Pire encore, ils sont même nocifs pour la santé humaine.
En effet, les PFAS sont des « produits chimiques éternels », c’est à dire que d’une part ils sont connus pour s’accumuler dans l’organisme et d’autre part pour être particulièrement persistants dans l’environnement.
En septembre 2020, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a considérablement réduit le seuil d’exposition tolérable aux 4 PFAS qui sont les plus couramment utilisés (PFOA, PFOS, PFNA et PFHxS) : ce seuil a été, depuis le premier seuil fourni en 2008, divisé par 2 500. En effet, l’exposition, même à des niveaux extrêmement faibles (le seuil est désormais fixé à 0, 63 milliardième de gramme par kilo de poids corporel et par jour), peut avoir des effets particulièrement néfastes sur l’organisme : déséquilibre des hormones thyroïdiennes, obésité, cancers des testicules et du rein, diabète, baisse de la réponse immunitaire aux vaccins, bébés prématurés etc.
Preuve de leur dangerosité, depuis mai 2009, deux de ces composants (les acides perfluorooctanoïque – PFOA - et perfluorooctanesulfonique – PFOS - et leurs sels) font partie de la liste des substances couvertes par la convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants. Leur production, mise sur le marché et leur utilisation soit en tant que telles, soit dans des préparations, soit sous forme de constituants d’articles sont interdites sauf dérogation (règlement 850/2004 concernant les polluants organiques persistants et modifiant la directive 79/117/CEE). Par ailleurs, il existe à ce jour dans la base de données des PFAS des études sur 29 de ces substances, et la quantité grandissante d’informations sur le caractère néfaste de ces composés perfluorés doit nous amener à une prudence particulière sur l’ensemble de cette famille de composés.
Sans attendre d’avoir analysé les 4500 PFAS existants, le principe de précaution exige d’interdire l’usage des PFAS dans les matériaux au contact de denrées alimentaires, aujourd’hui très répandus en Europe, tout particulièrement avec l’explosion de la restauration à emporter engendrée par la pandémie de Covid 19. La chose est totalement possible. Le Danemark nous donne à voir l'exemple d'une interdiction facile, rapide et efficace des PFAS dans les emballages alimentaires. Cette interdiction est entrée en vigueur en juillet 2020, et on a rapidement observé une disparition de l’usage de ces substances dans les emballages alimentaires, avec une rapide adaptation des industriels du papier et du carton.
Continuer de les incorporer intentionnellement dans nos processus de production aggrave la situation, alors même que leur utilisation n’est pas essentielle. Ainsi, des alternatives sont possibles : des emballages en papier végétal non traités aux PFAS ou traités avec de l’amidon sont déjà disponibles sur le marché. Des grandes firmes se sont également engagées pour éliminer ces substances de leurs emballages alimentaires (par exemple McDonald’s), mettant ainsi en évidence la faisabilité économique d’une telle interdiction. On oserait même dire la facilité de la chose.
Ainsi, au vu des enjeux de santé publique, et étant donné que l’utilisation des PFAS dans les matériaux au contact de denrées alimentaires n’est pas essentielle en la présence d’alternatives, il est indispensable d’interdire rapidement l’usage de ces composés perfluorés.
Le présent amendement fixe un horizon au 1er janvier 2023 pour permettre aux restaurateurs de retrouver préalablement une activité normale.
Déclaré irrecevable au titre de l'article 45, alinéa 1, de la Constitution par la commission saisie au fond
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