Amendement N° 115 2ème rectif. (Rejeté)

Loi de finances rectificative pour 2022

Avis de la Commission : Défavorable — Avis du Gouvernement : Défavorable

Déposé le 1er août 2022 par : MM. Marseille, Henno, Mmes Dindar, Létard, Vérien, MM. Laugier, Levi, Mme Billon, MM. Kern, Cigolotti, Mme Herzog, MM. Hingray, Lafon, Longeot, Mme Guidez, MM. Cazabonne, Chauvet, Pascal Martin, Moga, Mizzon, Mmes Devésa, Ract-Madoux, MM. Stéphane Demilly, Le Nay, Capo-Canellas, Mmes Gatel, Jacquemet.

Photo de Hervé Marseille Photo de Olivier Henno Photo de Nassimah Dindar Photo de Valérie Létard Photo de Dominique Vérien Photo de Michel Laugier Photo de Pierre-Antoine Levi Photo de Annick Billon Photo de Claude Kern Photo de Olivier Cigolotti Photo de Christine Herzog Photo de Jean Hingray Photo de Laurent Lafon 
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Après l'article 9 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement évaluant les différents mécanismes de régulation des prix du carburant en Corse.

Exposé Sommaire :

Cet amendement vise à répondre rapidement à la situation grave d'inflation du prix des carburants en Corse, qui fait peser une pression économique insoutenable sur les ménages corses.

En effet, en Corse, l’utilisation plus fréquente de la voiture conjuguée à des temps d’accès souvent plus long a un impact sur le budget de la plupart des foyers. En 2008, 28 % des ménages étaient considérés en situation de vulnérabilité énergétique liée aux déplacements (dépenses de carburants), proportion la plus élevée de France (10, 2 %). Or les prix pratiqués pour les carburants sont largement supérieurs à ceux de la France métropolitaine.

Depuis le mois de mai 2020, les prix des carburants suivent globalement une tendance haussière. En octobre 2021, cette progression s’accélère sous l’effet d’un rebond du prix du baril de pétrole et d’une offre toujours limitée de certains pays producteurs avec des progressions annuelles proches voire supérieures à 20 %. Cette flambée est plus marquée pour le gazole. Au mois de mars 2022, le conflit en Ukraine affole la cotation sur laquelle reposent les prix d’achat auprès des fournisseurs européens et la reprise post-Covid engendre une nouvelle flambée du prix du baril de pétrole ce qui a pour effet d’accentuer cette tendance. Les prix atteignent à cette période des valeurs historiques dépassant la valeur symbolique de 2 € par litre. Par ailleurs, le gazole étant en grande partie importé de Russie, son prix a grimpé en flèche pour dépasser celui du SP95 traditionnellement plus élevé.

À compter du 1er avril 2022, une remise financée par l’Etat est entrée en vigueur pour une durée de quatre mois, occasionnant immédiatement une baisse des prix à la pompe. En moyenne, après être repassés sous la barre des 2 € / l, la tendance haussière atteint aujourd’hui un niveau oscillant entre 2, 18 et 2, 22 €/l. Le coût des carburants pour le consommateur corse reste significativement supérieur à celui de l’an passé et plus particulièrement celui du gazole qui accuse une inflation de près de 30 % (+ 13, 7 % pour le SP95 ; + 27, 2 % pour le gazole).

Comparativement aux valeurs moyennes relevées sur le continent, les prix sont supérieurs en Corse avec des écarts de l’ordre de 9 à 12 centimes par litre pour le SP95 et le gazole.

De plus, l'Autorité de la concurrence, dans son avis 20-A-11 en date du 17 novembre 2020, note que "Sur le plan concurrentiel, le secteur est par ailleurs très concentré : à l’aval, la vente au détail dans les stations-service se caractérise par un oligopole de trois réseaux de distribution : chacune des 133 stations-service de l’île est rattachée à l’un d’entre eux. Cette situation risque de perdurer, l’entrée de nouveaux concurrents étant soumise à des barrières à l’entrée importantes. En effet, d’une part, le développement de stations-service exploitées par les GMS ou de stations-service discount se heurte aux réticences des entreprises et des pouvoirs publics face au développement de ce mode de distribution en Corse. D’autre part, à l’amont, les dépôts pétroliers sont contrôlés exclusivement par une entreprise verticalement intégrée. Celle-ci bénéficie d’un monopole de fait sur l’approvisionnement et le stockage des carburants en Corse et contrôle une « infrastructure essentielle » : ses dépôts sont un point de passage obligatoire à toute activité de distribution de carburant en Corse. L’organisation actuelle de l’approvisionnement des carburants en Corse ne permet pas à un simple usager (s’il n’est pas actionnaire des dépôts pétroliers par ailleurs) de s’approvisionner directement auprès des fournisseurs de son choix. Ces spécificités constituent une barrière à l’entrée sur le marché pour tout nouvel acteur souhaitant s’approvisionner auprès de ses propres fournisseurs de produits pétroliers raffinés pour les distribuer en Corse."

Dès lors, une telle situation de monopole implique la nécessité pour le Gouvernement de pratique une régulation des prix, conformément à l'article 410-2 du Code du commerce, qui dit que "dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d'approvisionnement, soit de dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d'Etat peut réglementer les prix après consultation de l'Autorité de la concurrence."

De même, conformément à la demande formulée par l'Assemblée de Corse, le Gouvernement pourra envisager la mise en œuvre d’un cadre législatif et réglementaire adapté aux contraintes et besoins spécifiques de la Corse, territoire insulaire, en matière de contrôle des situations de monopole et des seuils de concentration, de fixation du prix des carburants, et de fiscalité, s’inspirant notamment des articles L. 410-2, L. 410-3 et 752-27 du code de commerce, tels que visés dans le rapport de l’Autorité de la Concurrence du 20 novembre 2020, ainsi que des décrets LUREL.

Dans l’attente de la mise en oeuvre de solutions pérennes, il apparait nécessaire d’apporter une réponse à court terme qui tienne compte de la situation particulièrement tendue du marché des carburants en Corse.

Une telle réponse ne soulève aucun problème de constitutionnalité puisqu’elle est rendue possible par l’alinéa 3 de l’article 410-2 du code du commerce, selon lequel :

« Les dispositions des deux premiers alinéas ne font pas obstacle à ce que le Gouvernement arrête, par décret en Conseil d'État, contre des hausses ou des baisses excessives de prix, des mesures temporaires motivées par une situation de crise, des circonstances exceptionnelles, une calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché dans un secteur déterminé. Le décret est pris après consultation du Conseil national de la consommation. Il précise sa durée de validité qui ne peut excéder six mois. »

L'objet de cet amendement est donc de permettre d'évaluer l'opportunité de mettre en oeuvre, à court terme à travers des mesures temporaires, et à long terme à travers une régulation durable, des mécanismes permettant de réguler les prix des carburants en Corse.

NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.

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