Interventions sur "médecin"

18 interventions trouvées.

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

..., qui obéit à une autorité médicale devenue omnipotente et omnisciente. Il convient tout de même de rappeler que le principe d'individualisation de la peine est un des principes fondamentaux de notre droit pénal. Il permet à un juge de reconnaître une personne responsable, même si une expertise psychiatrique a conclu à l'irresponsabilité. Il est une garantie de l'étanchéité des compétences : un médecin soigne, un juge prononce des sanctions, tous deux collaborant dans la recherche d'une meilleure prise en compte de l'intérêt du condamné. Confier un pouvoir quasi juridictionnel à un expert psychiatre porte gravement atteinte aux principes de séparation des pouvoirs et d'indépendance des juges. Par ailleurs, il impose à ces mêmes psychiatres des sujétions qui vont bien au-delà de leur champ de ...

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

...es refusant les soins proposés pendant leur détention. Je souhaiterais faire ici plusieurs remarques sur ces différentes dispositions. La loi instaurant le suivi socio-judiciaire a été votée voilà presque dix ans, en 1998, mais son application est, dans l'ensemble, au point mort. Les raisons sont multiples : faibles moyens financiers, manque cruel de conseillers d'insertion et de probation, de médecins psychiatres et coordonnateurs. Ces raisons sont connues de tous, à commencer par les gouvernements qui se succèdent, et pourtant rien n'a été fait pour permettre la mise en oeuvre d'une loi dont tout le monde s'accorde à dire qu'elle serait efficace si elle était appliquée. En matière de récidive et de délinquance sexuelle, la priorité est donnée à l'incarcération et au fichage, au détriment de...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...pour essayer de comprendre ! Par ailleurs, les dispositions proposées ici s'inscrivent dans un contexte général, celui que nous avons vu se dessiner ces cinq dernières années lors de l'examen de plusieurs projets de loi. En effet, il y a une nouvelle manifestation de ce que Jacques-Alain Miller a appelé l'« hygiénisme », c'est-à-dire cette conception en vertu de laquelle il faudrait donner à la médecine le soin de gérer toute une série de problèmes qui ne relèvent pas toujours exclusivement de ses compétences. J'en veux pour preuve l'amendement Accoyer, que nous avons longuement discuté, et dont la première version, mes chers collègues, visait à affirmer que seuls les médecins ou les psychologues diplômés pouvaient traiter de la souffrance psychique, à l'exclusion donc des psychanalystes ou des...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...uestions pratiques. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 1998, qui a instauré le suivi judiciaire avec injonction de soins, aucun bilan n'a été dressé pour évaluer le fonctionnement de cette mesure. Pourtant, son champ d'application n'a cessé d'être étendu, notamment par la loi du 12 décembre 2005. Or les constats sont alarmants. L'injonction de soins suppose d'abord de recruter des médecins coordonnateurs, chargés de faire l'interface entre le juge de l'application des peines et le médecin traitant du condamné. Le rôle du médecin coordonnateur a été défini de manière très générale par un décret du 18 mai 2000, aux termes duquel le médecin coordonnateur oriente le condamné vers un traitement adapté. Il rend compte au juge de toutes les difficultés, comme l'interruption de traitemen...

Photo de François ZocchettoFrançois Zocchetto, rapporteur :

...gue, que l'intervention d'un expert médical dans la procédure est inadmissible. Mais elle existe déjà ! Certes, vous avez le droit de la contester, mais nous avons déjà débattu de cette question. L'expert médical établit que la personne poursuivie est susceptible de suivre un traitement. Je ne vois là rien de choquant. J'estime qu'il est parfaitement normal que le magistrat prenne l'opinion d'un médecin spécialiste pour savoir si la personne est ou non accessible à un traitement.

Photo de François ZocchettoFrançois Zocchetto, rapporteur :

...a été, je le reconnais, très judicieusement exposée par M. Sueur. C'est une préoccupation que nous partageons tous, et que j'ai d'ailleurs reprise dans mon rapport. Dans la mesure où nous adoptons un projet de loi visant à faciliter le suivi médical des auteurs d'infractions, notamment sexuelles, nous souhaiterions que soient prévus les moyens nécessaires pour le mettre en place. Il faut que les médecins coordonnateurs soient désignés et que les médecins traitants puissent travailler. Je le sais, cette question ne dépend pas uniquement de vous, madame le garde des sceaux, puisqu'elle dépend également et principalement du ministère de la santé. Mais, nous serions, il est vrai, rassurés si vous nous donniez des informations en la matière. Bien entendu, la commission est défavorable à l'amendement...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

...is leur douleur et leur souffrance. Et c'est justement parce nous prenons cette douleur et cette souffrance en compte qu'il nous faut en tirer des conclusions. D'un autre côté, on ne peut ignorer que des détenus, parfois des criminels, se trouvent également dans des situations douloureuses, difficiles, graves. Certains souffrent de profonds troubles de la personnalité, qui relèvent en effet de la médecine, de la biologie, de la chimie. Mais croire que l'on va remédier à tous les problèmes uniquement par le recours au médical, c'est une erreur.

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Soyons clairs : je n'ai jamais prétendu que les médicaments étaient inutiles. Dans certains cas, le recours à la médecine et à la pharmacopée est nécessaire. En revanche, on ne peut pas laisser croire que l'on pourra remédier à tous les troubles psychiques lourds grâce aux médicaments. Certaines écoles de pensée - et pas seulement des « écoles de pensée » - cherchent à accréditer cette idée, mais elle est erronée. Une fois que l'on a dit cela, on doit se demander ce qu'il faut faire. J'ai bien écouté ce qu'ont d...

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

Lorsqu'on prend la mesure de la situation actuelle et qu'on la rapproche de cette proposition, on est effaré de ce que le public peut penser du sérieux de nos travaux. En dépit de ses interrogations, la commission d'analyse et de suivi de la récidive n'a jamais pu connaître le nombre d'injonctions de soins actuellement en cours. Quant aux médecins coordonnateurs, seulement 90 sont recensés au sein des 181 tribunaux de grande instance. Ces données mettent en évidence que, dans le meilleur des cas, l'injonction de soins ne s'applique que dans une petite moitié des tribunaux français, ce qui est particulièrement regrettable. Aucune évaluation ou étude n'a jamais été réalisée en ce qui concerne l'effet de ce suivi dans la durée ou encore la...

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

... tous les justiciables français et pour nous tous ? Mieux vaut bien faire ce que l'on entreprend qu'ajouter une loi d'affichage à une autre loi d'affichage ! Pourquoi promettre que l'on donnera à tous ceux qui en ont besoin l'accès à un suivi socio-judiciaire, déclarer qu'on leur prodiguera des soins, alors que, dans la réalité carcérale - bien affligeante réalité, le plus souvent -, il n'y a ni médecin coordonnateur ni psychiatre disponibles, ni traitement possible. C'est cette situation que dénonce la commission d'analyse et de suivi de la récidive. Madame le garde des sceaux, je souhaite que, dans un an, puisque vous avez le privilège de prendre maintenant vos fonctions, vous présentiez à la Haute Assemblée l'état de la réalité du suivi socio-judiciaire et, surtout, de l'injonction de soins....

Photo de Jacques MahéasJacques Mahéas :

...mise à l'épreuve pour les auteurs d'infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire peut être encouru, mais également de la rendre systématique. Par l'intermédiaire du psychiatre, le juge perdra de son libre arbitre. Mes arguments sont homothétiques de ceux qu'a avancés précédemment M. Sueur : absence de bilan du fonctionnement actuel de l'injonction de soins, difficultés pour recruter les médecins coordonnateurs, manque de moyens, de médecins et d'experts, confusion entre délinquance et pathologie psychiatrique, dans la lignée de la loi relative à la prévention de la délinquance. Vous aviez d'ailleurs dû reculer sur ce dernier point. Je souhaite, moi aussi, vous faire part de mon expérience de terrain. La ville dont je suis maire abrite deux grands hôpitaux psychiatriques. Depuis de nomb...

Photo de François ZocchettoFrançois Zocchetto, rapporteur :

Si la personne concernée refuse de se conformer à l'injonction de soins prononcée par le juge, après avis des médecins, elle devra alors assumer ses responsabilités. Les conséquences de ce refus sont clairement fixées et encadrées par le projet de loi : soit révocation du sursis, soit annulation des réductions de peines, soit maintien en détention dans les cas de libération conditionnelle. L'avis de la commission est défavorable à l'amendement.

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

... intervenant autant dans le cadre de la surveillance judiciaire que dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve ou du suivi socio-judiciaire, il est évident que la question des moyens se pose. Vous justifiez cette généralisation en invoquant la nécessité de lutter efficacement contre la récidive. Avec quels moyens comptez-vous réaliser une telle généralisation ? Comment convaincrez-vous les médecins coordonnateurs d'oeuvrer pour cette généralisation, alors qu'un suivi complet par individu leur rapporte seulement 426 euros à l'année ? Vous n'êtes pas sans savoir que les juridictions ont de grandes difficultés à recruter ces médecins chargés de faire l'interface entre le juge d'application des peines et le médecin traitant. Comme l'a dit M. Badinter, il n'existe que 90 médecins coordonnateur...

Photo de Richard YungRichard Yung :

Cette discussion se situant dans le prolongement de la précédente, je ne reprendrai pas les différents arguments qui ont été excellemment développés par mes collègues Jean-Pierre Sueur et Robert Badinter. Je m'en tiendrai à deux remarques. Premièrement, je comprends la volonté de recruter un certain nombre de médecins psychiatres dans les prochains mois. Mais il est clair qu'il faudra leur offrir plus de 420 euros par an et par patient si on veut inciter des médecins à s'engager dans cette voie. Ce tarif actuellement pratiqué est une des raisons pour lesquelles nombre de psychiatres sont dissuadés de travailler. Deuxièmement, bien qu'on ait essayé de nous enfermer dans cette case, nous ne sommes évidemment p...

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

...sé. Là encore, vous surestimez la valeur des soins sur l'impact de la récidive. À cet égard, il est évident que n'importe quel détenu acceptera des soins pour se soustraire à l'emprisonnement. Dans tous les cas, le résultat sera le même : des libérations conditionnelles seront prononcées, mais l'effet de ce volet psychiatrique aura pour conséquence de gonfler de manière dramatique la demande de médecins et de personnel psychiatrique. Ce personnel déserte déjà les prisons et les tribunaux : comment allez-vous le ramener vers une prétendue collaboration constructive dans la lutte contre la récidive ? Vous misez sur la collaboration d'acteurs dont vous n'avez requis ni les avis ni les doléances : vous leur imposez l'impossible ; vous leur imposez l'inacceptable. Ne soyez donc pas surpris de les...

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

...'auront pas le choix : si elles veulent bénéficier de réductions de peine, elles seront contraintes d'accepter le traitement, ce qui apparaît en totale contradiction avec les données scientifiques actuelles. L'injonction de soins est donc présentée comme seul remède à la récidive. Mais alors que le système actuel de l'injonction de soins et du suivi socio-judiciaire souffre d'un manque criant de médecins coordonnateurs, il semble dangereux, voire inefficace, d'instaurer aujourd'hui une injonction de soins obligatoire et, de surcroît, conditionnant un aménagement de peine. Tel est le sens de notre amendement de suppression.

Photo de Richard YungRichard Yung :

...iquer nos réserves sur le texte. La pression exercée sur les personnes condamnées libérables qui, pour bénéficier de la libération conditionnelle, devront accepter de se plier à l'injonction de soins sera, à l'évidence, très forte. On comprend fort bien qu'elles seront poussées à aller dans cette voie, mais c'est précisément ce qui pose problème, car il faut un accord réel entre le patient et le médecin pour que les soins aient une chance d'être efficaces. Or, on risque de n'obtenir que des accords de façade, des accords factices de la part des condamnés soumis à cette pression.

Photo de Nathalie GouletNathalie Goulet :

... pénitentiaire qui nous est promise et que nous devrions examiner avant la fin de la session. Nous connaissons tous les problèmes de surpopulation, de manque de moyens, de formation et d'aide à la réinsertion. S'agissant du manque de soins, mon département, l'Orne, connaît une complète désertification médicale, comme d'autres départements ruraux. Aussi, je ne vois pas comment nous trouverons des médecins coordonnateurs ou des psychiatres pour les centres de détention. Madame le garde des sceaux, il faudra veiller à l'application de ce texte, lors de la réforme en profondeur de la carte judiciaire. Il faudra faire attention à l'emplacement des juges de l'application des peines et garder ces services à proximité des centres de détention. Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour attirer votre...