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...mportante : elle traduit un respect du principe d'individualisation de la peine et donne au juge la possibilité d'adapter le prononcé de l'injonction de soins sans que cette dernière prenne le caractère d'une sanction. L'article 5 vient balayer le caractère facultatif du prononcé de l'injonction de soins en le transformant en obligation : le juge ne pourra plus se soustraire à l'avis de l'expert psychiatre. Une telle psychiatrisation de la justice appelle quelques commentaires. Tout d'abord, elle porte atteinte au pouvoir du juge d'individualiser la peine. Gardien des libertés individuelles en vertu de la Constitution, le juge se transforme en un simple exécutant, qui obéit à une autorité médicale devenue omnipotente et omnisciente. Il convient tout de même de rappeler que le principe d'individu...
...nt les soins proposés pendant leur détention. Je souhaiterais faire ici plusieurs remarques sur ces différentes dispositions. La loi instaurant le suivi socio-judiciaire a été votée voilà presque dix ans, en 1998, mais son application est, dans l'ensemble, au point mort. Les raisons sont multiples : faibles moyens financiers, manque cruel de conseillers d'insertion et de probation, de médecins psychiatres et coordonnateurs. Ces raisons sont connues de tous, à commencer par les gouvernements qui se succèdent, et pourtant rien n'a été fait pour permettre la mise en oeuvre d'une loi dont tout le monde s'accorde à dire qu'elle serait efficace si elle était appliquée. En matière de récidive et de délinquance sexuelle, la priorité est donnée à l'incarcération et au fichage, au détriment de la préventi...
...quoi, cette décision - car il s'agit bien, en fin de compte, d'une décision - de l'expert s'imposera au magistrat, qui ne pourra faire autrement que d'y donner suite, sauf à fournir d'amples explications. Ainsi, la règle, c'est désormais que l'expert détermine la position du juge, qui n'a aucune liberté d'appréciation vis-à-vis de l'expert. Voici l'analyse qu'en font certains magistrats : « Les psychiatres relèvent d'une déontologie médicale et ont besoin d'instaurer une relation de confiance avec leurs patients. Les instituer auxiliaires de justice pour prévenir la récidive apparaît non seulement contraire à l'éthique médicale mais contre-productif. » Je conclurai en citant cette autre déclaration d'un magistrat : « Avec ce nouveau texte, dès lors que l'expertise sera en faveur du soin, le tribu...
...pas été revalorisée depuis 2001, est peu attractive. Ainsi, dans de nombreuses juridictions, le suivi socio-judiciaire avec injonction de soins ne peut pas être mis en place. Telle est la réalité d'aujourd'hui, mes chers collègues ! C'est pourquoi il serait sage de ne pas adopter les articles 5 et suivants. Quant à la situation des médecins traitants, elle n'est pas meilleure. En effet, peu de psychiatres travaillant dans le secteur privé acceptent de prendre en charge des condamnés, et le secteur public est débordé. En détention, la situation est encore plus inquiétante. Dans de nombreux établissements, il n'y a pas de psychiatre ; il y a tout juste un psychologue, voire simplement un infirmier. J'en viens à l'expertise psychiatrique, qui occupe une place considérable dans le dispositif. La s...
Mais, les psychiatres que nous avons auditionnés ont indiqué que, dans certains cas, ils pourraient déclarer que la personne n'est pas susceptible de faire l'objet d'un traitement. Le dispositif vise à généraliser l'injonction de soins pour les auteurs d'infractions sexuelles, et je ne vois vraiment pas où est le problème. En effet, la plupart des délinquants sexuels, notamment s'ils ont pu participer à une psychoth...
D'ailleurs, madame le garde des sceaux, vous n'avez pas présenté d'arguments très forts en faveur de la modification de la loi. Tous les magistrats que j'ai consultés au sujet du suivi socio-judiciaire et de l'injonction de soins m'ont dit qu'il était très difficile, voire impossible dans certaines juridictions, de trouver des experts. Et il n'y a pas davantage de psychiatres pour faire appliquer les décisions qui sont prises. Or, après l'adoption du présent projet de loi, le juge aura les mains liées : si un expert décide qu'il faut prononcer une injonction de soins, le juge devra l'ordonner, même si sa juridiction ne dispose pas des moyens nécessaires pour appliquer sa décision. Madame le garde des sceaux, je me permets donc de vous suggérer une démarche pragmati...
...ançais et pour nous tous ? Mieux vaut bien faire ce que l'on entreprend qu'ajouter une loi d'affichage à une autre loi d'affichage ! Pourquoi promettre que l'on donnera à tous ceux qui en ont besoin l'accès à un suivi socio-judiciaire, déclarer qu'on leur prodiguera des soins, alors que, dans la réalité carcérale - bien affligeante réalité, le plus souvent -, il n'y a ni médecin coordonnateur ni psychiatre disponibles, ni traitement possible. C'est cette situation que dénonce la commission d'analyse et de suivi de la récidive. Madame le garde des sceaux, je souhaite que, dans un an, puisque vous avez le privilège de prendre maintenant vos fonctions, vous présentiez à la Haute Assemblée l'état de la réalité du suivi socio-judiciaire et, surtout, de l'injonction de soins. Je souhaite également que,...
...nction de soins dans le cadre d'un sursis avec mise à l'épreuve puisque cette mesure relève aujourd'hui du seul suivi socio-judiciaire. Or le projet de loi prévoit non seulement d'étendre l'injonction de soins au sursis avec mise à l'épreuve pour les auteurs d'infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire peut être encouru, mais également de la rendre systématique. Par l'intermédiaire du psychiatre, le juge perdra de son libre arbitre. Mes arguments sont homothétiques de ceux qu'a avancés précédemment M. Sueur : absence de bilan du fonctionnement actuel de l'injonction de soins, difficultés pour recruter les médecins coordonnateurs, manque de moyens, de médecins et d'experts, confusion entre délinquance et pathologie psychiatrique, dans la lignée de la loi relative à la prévention de la dé...
...nnée ? Vous n'êtes pas sans savoir que les juridictions ont de grandes difficultés à recruter ces médecins chargés de faire l'interface entre le juge d'application des peines et le médecin traitant. Comme l'a dit M. Badinter, il n'existe que 90 médecins coordonnateurs et plus de la moitié des tribunaux de grande instance ne disposent pas d'un tel médecin. Les effectifs actuels de médecins et de psychiatres ne sont déjà pas suffisants : comment comptez-vous faire face à l'accroissement des injonctions qui vont découler, fatalement, de l'application de cette loi ? Obligerez-vous les médecins à prendre en charge un détenu libéré ? Si l'objet de ce projet de loi est de permettre un meilleur suivi du délinquant à sa sortie de prison et de lutter contre la récidive, vous devez, madame la ministre, vous...
Cette discussion se situant dans le prolongement de la précédente, je ne reprendrai pas les différents arguments qui ont été excellemment développés par mes collègues Jean-Pierre Sueur et Robert Badinter. Je m'en tiendrai à deux remarques. Premièrement, je comprends la volonté de recruter un certain nombre de médecins psychiatres dans les prochains mois. Mais il est clair qu'il faudra leur offrir plus de 420 euros par an et par patient si on veut inciter des médecins à s'engager dans cette voie. Ce tarif actuellement pratiqué est une des raisons pour lesquelles nombre de psychiatres sont dissuadés de travailler. Deuxièmement, bien qu'on ait essayé de nous enfermer dans cette case, nous ne sommes évidemment pas opposés a...
...s un instant à la réalité de cette thérapie dans nos hôpitaux, nos établissements psychiatriques notamment. Chacun le sait ici, c'est le recours à la camisole chimique. Le détenu l'acceptera si la réduction de sa peine est à ce prix. Or, la chimie ne règle pas tous les problèmes. Elle peut même exposer à de très grandes surprises sans l'accompagnement d'un travail beaucoup plus approfondi par un psychiatre. Si je ne peux que me féliciter de l'annonce, par Mme le garde des sceaux, de créations de poste, je doute qu'en 2008 on trouve suffisamment de psychiatres. En effet, nos hôpitaux en manquent déjà et il faut une dizaine d'années pour les former. Je crains quelques réveils très brutaux quand les condamnés sous camisole chimique recouvreront la liberté. Ne disposant pas de statistiques dignes de c...
... la personnalité dont le traitement ne passe pas forcément par la voie médicamenteuse ou purement médicale. Mais dans un certain nombre de cas, cette injonction est indispensable. Nous l'affirmons : la loi permet aujourd'hui d'avoir recours à l'injonction thérapeutique ; cette loi existe. Simplement, la grande difficulté - on l'a vu en long, en large et en travers -, c'est que les experts et les psychiatres ne sont pas assez nombreux. Par conséquent, si on veut être utile, cette loi d'affichage ne servira à rien tant que l'on n'aura pas fait les efforts correspondants. Certes, cela est difficile, mais c'est indispensable pour améliorer la situation et pour créer les postes de professionnels qui sont nécessaires, comme le demandent un grand nombre de magistrats. En conclusion, nous ne pouvons appro...
...mise et que nous devrions examiner avant la fin de la session. Nous connaissons tous les problèmes de surpopulation, de manque de moyens, de formation et d'aide à la réinsertion. S'agissant du manque de soins, mon département, l'Orne, connaît une complète désertification médicale, comme d'autres départements ruraux. Aussi, je ne vois pas comment nous trouverons des médecins coordonnateurs ou des psychiatres pour les centres de détention. Madame le garde des sceaux, il faudra veiller à l'application de ce texte, lors de la réforme en profondeur de la carte judiciaire. Il faudra faire attention à l'emplacement des juges de l'application des peines et garder ces services à proximité des centres de détention. Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour attirer votre attention sur le tribunal d'Argen...