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...population inouï, celui de 360 000 Grecs musulmans et de 290 000 Ottomans anatoliens de confession orthodoxe. Ces déplacements de population ainsi que la cause arménienne ont été étouffés. Aujourd’hui, si l’on se résigne à dire qu’il revient à un tribunal turc de juger la cause des Arméniens, il est à craindre qu’ils n’attendent très longtemps et que leur histoire soit littéralement gommée de la mémoire collective internationale ! Les procès furent suspendus le 13 janvier 1921 : tous les principaux personnages de la nouvelle république turque étaient membres du sinistre Comité Union et Progrès déjà cité. Le pouvoir kémaliste réhabilita et déclara « martyrs nationaux » deux des personnes exécutées qui étaient gouverneurs de province. De même, la dépouille de Talaat Pacha a été rendue à la Turqui...
...ouvoir donner lieu à une interprétation incertaine. Il est aussi fait grief à cette proposition de loi de ne pas respecter la liberté d’opinion et d’expression, protégée par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme. Mais cette liberté peut faire l’objet de limites et de restrictions destinées à protéger des droits et libertés également reconnus par la loi. Le respect de la mémoire est un droit pour les victimes et leurs descendants, mais un devoir pour la République dont nous sommes citoyens. L’article 17 de ladite convention interdit les abus de droit qui peuvent résulter d’une interprétation excessive d’autres de ses dispositions. Contester, minimiser de façon outrancière le crime de génocide relève bien d’un abus de droit. Cet abus doit être puni par la loi Gayssot et ...
...lesdites lois, souvent qualifiées de « neutrons législatifs », sont privées de tout effet. Mes chers collègues, nous ne pouvons faire l’économie de ce débat au travers duquel, je l’espère, vous comprendrez les raisons de mon opposition à ce texte et, plus généralement, à ce mouvement contemporain qui tend à donner à chaque communauté victime d’atrocités la possibilité de figer dans la loi « sa » mémoire, « sa » vérité historique, celle-ci devenant de fait une vérité légale irréfragable puisque toute tentative de démonstration de l’existence d’une réalité divergente est pénalement répréhensible. L’emballement auquel nous assistons depuis une vingtaine d’années ne correspond en rien à l’objectif visé par les premières lois mémorielles. La relation entre loi et histoire n’est pas récente : des lo...
...ar cette proposition de loi offrira à toutes les victimes de ces monstruosités le meilleur moyen de reconstruire leur identité. Seule la menace d’une réelle sanction pourra empêcher les auteurs de négationnisme de continuer en toute impunité à faire souffrir des millions de personnes partout dans le monde. De plus, si ce texte est adopté, chaque fois qu’un génocide sera reconnu par la France, la mémoire de ses victimes sera respectée sur notre territoire. Cette proposition de loi va bien au-delà de la simple reconnaissance. Elle montre l’exemple d’un pays engagé, déterminé à combattre les atteintes contre l’humanité. Chaque individu a le droit au respect. Ce respect, c’est aussi celui de ses origines et de son histoire. Au travers de ce texte, mes chers collègues, ce sont les droits de l’homm...
...ête à vouloir répondre à toutes les exigences mémorielles ? En l’occurrence, le terme « minimisé », introduit à l’article 1er, inquiète les historiens, qui doivent manier des chiffres et, souvent, donner des fourchettes, car ils ne disposent pas toujours des sources conduisant à la certitude. La négation ne doit faire l’objet, en droit, d’aucune indulgence. Le négationnisme est une insulte à la mémoire, tout le monde en convient. Mais sa déclinaison juridique, c’est-à-dire la contestation, la banalisation grossière et aujourd’hui la « minimisation », crée une marge d’appréciation du juge potentiellement handicapante pour la recherche historique et contraire au principe fondamental de notre procédure pénale que constitue la stricte interprétation des lois pénales. C’est pourquoi, mes chers coll...
...sommes en période électorale. C’est seulement à la veille d’un scrutin présidentiel que nous sommes saisis d’un texte pourtant promis voilà maintenant près de cinq ans ! Si certains ont voulu exploiter cette question à des fins électoralistes, ce n’est pas à leur honneur. Mais cela ne doit pas nous interdire de discuter sur le fond. Le sujet est suffisamment important, suffisamment ancré dans la mémoire collective pour que nous en débattions. Quelles que soient les éventuelles arrière-pensées de certains, nous ne devons pas renoncer à exprimer nos convictions sur ce sujet ! Deuxièmement, au vu du contexte géopolitique, ceux qui s’opposent à cette proposition de loi s’alarment de ses possibles conséquences économiques et commerciales. Sur ce sujet comme sur d’autres, on nous dit que ce n’est pas...
... ne ferait qu’exacerber la position intransigeante de l’État turc et bloquer toute évolution vers une reconnaissance du génocide arménien par la Turquie. Cependant, il y a plus grave que la question arménienne ; je veux parler de la question des principes de portée générale, c'est-à-dire du problème de savoir s’il revient à la loi de qualifier les faits historiques : devons-nous légiférer sur la mémoire ? Les conclusions de la mission de l’Assemblée nationale sur les lois mémorielles, approuvées par tous les groupes politiques de l’Assemblée nationale, sont d’une grande clarté : « le Parlement doit désormais renoncer à la loi pour porter une appréciation sur l’histoire ou la qualifier, a fortiori lorsque celles-ci s’accompagnent de sanctions pénales ». Il faut, en effet, en finir avec l...
...es au point de vue maintes fois exprimé par Robert Badinter, qui concluent à l’inconstitutionnalité de ce texte, nous devrions être beaucoup plus attentifs aux objections de nombreux chercheurs et historiens, qui récusent l’intrusion des politiques et du législateur dans l’écriture de l’histoire. C’est par les travaux des chercheurs et des historiens que peut se faire le difficile cheminement des mémoires collectives. Comme le suggère Robert Badinter et comme l’ont souligné plusieurs orateurs, une commission d’historiens sous l’égide de l’UNESCO ferait certainement beaucoup plus qu’une loi pour établir la vérité, et surtout pour conduire la Turquie à assumer cet épisode odieux de son histoire et à ouvrir sans restriction ses archives, un siècle après les faits. La rédaction de l’article 1er pèch...
... plus douloureux que celui que nous avons aujourd’hui. Si nos pensées, notre compassion vont assurément vers les Arméniens, cela ne saurait cependant dicter notre conduite. Il nous faut, dans cet hémicycle, faire abstraction de cette montagne de douleurs pour faire droit à la raison. Je suis bien placée, par mon histoire personnelle, pour connaître la situation des diasporas. C’est autour de la mémoire que le lien presque charnel à la terre originelle se maintient, faisant de chaque membre un gardien du temple. Cela explique l’engagement souvent plus fort des représentants des diasporas par rapport à ceux qui vivent dans le pays. L’exil est toujours une douleur, car les souffrances vécues dans un temps parfois même très ancien se transmettent de génération en génération. Milan Kundera parle mêm...
...éparation des pouvoirs est un principe essentiel que le législateur doit s’imposer seul, sans s’en remettre au contrôle a posteriori du juge constitutionnel. Si le législateur n’est pas dans cet état d’esprit, il alimente le soupçon d’une loi qui ne serait que l’émanation d’un rapport de forces. Le génocide est le crime le plus odieux qui soit : le nier, c’est le perpétuer ; en refuser la mémoire, c’est prolonger la souffrance. Le génocide des Arméniens est un fait incontestable ; il a d’ailleurs été à l’origine même de la notion de génocide, qui a vu sa traduction juridique s’appliquer à la Shoah. Une partie des crimes commis ont déjà été jugés par les tribunaux turcs, avant que leur négation ne constitue l’un des éléments fondateurs du régime de Mustafa Kemal Atatürk. La France, nous d...
...Nicolas Sarkozy à l’Élysée. Dénier une perspective européenne à la Turquie est une erreur historique : cela provoque des crispations remettant en cause l’aboutissement et la réalité de la transition démocratique portée par l’AKP depuis son avènement au pouvoir. Cette perspective a favorisé les intellectuels et les universitaires turcs qui, depuis des années, travaillent à la reconstitution de la mémoire et parlent sans tabou du génocide arménien. Certains, comme Hrant Dink, ont donné leur vie pour cela. Avec les arrestations de journalistes ou de militants des droits de l’Homme, l’on ne peut que constater aujourd’hui les effets de la dérive autoritaire de l’AKP. Je refuse de participer à une opération où MM. Sarkozy et Erdogan construisent leur antagonisme pour aller à la recherche des voix nat...
...re l’humanité, crime de guerre ou génocide – pouvaient passer pour académiques. Désormais, les historiens s’interdiront de débattre des Arméniens pour ne pas risquer d’être emprisonnés. Je note que des historiens de grande valeur, dont la qualité des travaux est universellement reconnue, risquent désormais des ennuis judiciaires. Je pense à Pierre Vidal-Naquet, le combattant des « assassins de la mémoire », et à Madeleine Rebérioux, la lumineuse spécialiste de Jean Jaurès qui fut pendant longtemps présidente de la Ligue des droits de l’homme. L’histoire n’est ni commémoration, ni religion, ni mémoire : c’est une science et, à ce titre, la vérité qu’elle tend à établir n’est pas stable.
...utile, opportuniste et inopportun. Je ne reviendrai pas sur la question préjudicielle de constitutionnalité majeure qu’il soulève, valable pour toutes les lois mémorielles, que Robert Badinter qualifie de « compassionnelles ». Cela étant, je voterai contre l’article 1er et contre cette proposition de loi dangereuse, qui risque de ruiner tous les efforts et les travaux entrepris sur un travail de mémoire en Turquie par les deux communautés. Grâce à l’initiative de nombreux intellectuels, …
Je voudrais d’abord souligner la qualité du débat de ce jour sur les questions importantes soulevées par la présente proposition de loi. Moi aussi, je condamne évidemment toute forme de négationnisme, qui constitue une atteinte odieuse à la mémoire des disparus et à la dignité des victimes. Un génocide a eu lieu, et je tiens à exprimer, au nom de la commission que je préside, notre respect pour le peuple arménien et les terribles épreuves qu’il a endurées. Je ne reviendrai pas sur les interrogations que suscitent les lois dites « mémorielles », quelles qu’elles soient. La proposition de loi que nous examinons revêt, selon certains orateurs...
Aujourd’hui, avec cette proposition de loi, je crains que nous ne fassions un pas supplémentaire dans la mauvaise direction. C’est pourquoi je ne voterai ni l’article 1er ni l’ensemble du texte que nous examinons. Je comprends les préoccupations des uns et des autres. Loin de moi la volonté de minimiser l’ampleur du génocide arménien et la nécessité de préserver la mémoire des disparus. Par ce vote, je souhaite simplement rappeler les intérêts à long terme de la France et le contexte géopolitique particulièrement préoccupant dans lequel nous vivons actuellement. Cet hémicycle n’est pas le lieu pour réfléchir à ce que devrait être une politique étrangère rénovée. Mais il m’arrive de penser que nous pourrions mieux protéger les intérêts de la France si nous arrivion...
...s entretenons avec notre nation. C’est bien cette question qui nous est posée car, en légiférant sur des sujets historiques, nous touchons à quelque chose de particulièrement sensible, qui est au cœur même de l’idée que nous nous faisons de la nation, dont nous sommes les représentants dans cette assemblée. La nation s’est construite au fil du temps et des épreuves. Elle est donc l’élément d’une mémoire, mais cette mémoire est distincte de l’histoire. L’une des erreurs que vous commettez en votant ce texte, c’est de prétendre faire l’histoire en rappelant une mémoire. Il faut distinguer l’une de l’autre, surtout si l’on veut faire l’histoire par la mémoire au moyen du droit et de la loi. Au-delà de notre rapport à la nation, ainsi posé, c’est notre rapport à notre mémoire nationale qui est en j...
...e se révèle gravement préjudiciable à la position de la France. La politique de mon pays ne se fait pas au prétoire, non plus que devant les tribunaux correctionnels. Il est par ailleurs souhaitable, comme le recommandait le général de Gaulle, de ne pas s’immiscer dans les affaires intérieures d’autres pays, attitude dont on connaît les conséquences. L’association de la délicate question de la mémoire et de la souffrance à une démarche législative, qui plus est de nature pénale, est peut-être l’ingrédient le plus dangereux, voire le plus fatal, car elle aboutit à piéger tout le monde, comme certaines interventions ont pu nous en donner l’illustration. En sollicitant l’homme politique, nous risquons de le grever d’une charge qui ne lui échoit point, celle de se prononcer sur des questions hist...
...d’opportunisme ! Sur des questions aussi sensibles, les arguments d’autorité ne sont pas acceptables. C’est au regard des droits de l’homme, portés si haut par notre pays à travers le monde, que l’on peut dire que cette proposition de loi contrevient à la liberté d’expression et à la liberté de la recherche. Commémorer les barbaries, quelles qu’elles soient, poursuivre et renforcer le devoir de mémoire est une chose. Légiférer, ainsi que c’est notre rôle, en est une autre. Par conséquent, de même que j’ai voté en toute responsabilité et conscience le 29 janvier 2001 la reconnaissance publique par la France du génocide arménien de 1915, de même, aujourd'hui, parce que je ne confonds pas l'histoire et la mémoire, je voterai contre un texte qui nous conduit à une violation des principes de la Con...
...’appuient toujours sur des valeurs essentielles, notamment le principe de la séparation des pouvoirs. Ce texte est ambigu. Qui plus est, il est inutile, parce que d'autres lois existent qui peuvent permettre de condamner pénalement ceux qui contestent la réalité historique et incitent à la haine. Par ailleurs, il est terriblement dangereux. Comme l’a dit Gaëtan Gorce dont je salue les propos, la mémoire doit rassembler et non diviser ou porter atteinte à la cohésion sociale. Enfin, ce texte est inopportun car il compromet nos relations avec la Turquie. C’est un grand pays, dont la puissance intrinsèque et régionale lui permettra d’étendre son influence dans le bassin méditerranéen. Je conclurai en rappelant cette règle selon laquelle, lorsque le chef d'État se rend à l'étranger, il ne se prono...
...e cohérence en nous donnant les moyens de sanctionner la négation du génocide. J’entends bien les arguments de certains de mes collègues, mais la question de la constitutionnalité est-elle à la hauteur des responsabilités qui sont les nôtres ? L’objectif premier du négationnisme, j’y insiste, est de falsifier l’histoire pour nier une réalité historique et effacer toute trace des génocides de la mémoire. Personne ne peut l’accepter ! Je conclus mon propos en réaffirmant que garantir à chacun le respect auquel il a droit en tant qu’être humain est un moyen efficace pour combattre le communautarisme. Notre inertie et notre silence seraient coupables : ne pas légiférer sur la pénalisation du négationnisme serait un sinistre retour en arrière ! Pour toutes ces raisons, je voterai cette propositi...