Interventions sur "négationnisme"

25 interventions trouvées.

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur, rapporteur :

...anité sont insupportables, car, au-delà des souffrances infligées aux victimes, ils remettent en cause l’identité et la part d’humanité de tout être humain et portent atteinte aux valeurs essentielles de nos civilisations. Les souffrances des rescapés et de leurs descendants sont indicibles, et nier la réalité des massacres commis et du génocide lui-même conduirait à perpétuer ces souffrances. Le négationnisme est odieux. Nous le condamnons tous, sans aucune réserve. La question qui nous est posée aujourd’hui est celle qui consiste à savoir s’il appartient à la loi pénale de dire quels événements historiques peuvent être discutés sur la place publique et quels événements historiques ne souffrent aucune discussion. Quelle est notre légitimité à nous, législateur, pour dire ce qu’est l’histoire ? Le Co...

Photo de Isabelle PasquetIsabelle Pasquet :

...nnée. Il s’agit de reconnaître les souffrances héritées du passé, d’offrir une réparation symbolique aux pires blessures de l’histoire et d’interdire la négation des pages les plus dramatiques du siècle passé. Voilà de quoi il s’agit ! Il n’est pas question de limiter la liberté d’expression ni d’entraver la recherche historique. Périodiquement, le gouvernement turc suscite des manifestations de négationnisme, lesquelles prennent la forme de profanations de lieux de mémoire arméniens, de stèles, de monuments commémoratifs ou bien encore de propos révisionnistes et négationnistes, qui se propagent en toute impunité sur internet. Nous avons tous en mémoire ce type de manifestations violentes et les actes de profanation commis à Lyon en 2006 visant explicitement la communauté arménienne. Au-delà de sim...

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

D’ailleurs, quelle hypocrisie dans l’argument de ceux qui affirment que le vote de ce texte permettra au Conseil constitutionnel de trancher sur la loi de 2001. C’est à juste titre que Robert Badinter nous demande de refuser d’examiner un texte inconstitutionnel et de ne pas nous laisser abuser par le ministre de l’intérieur, qui déclare qu’instaurer un débat général sur le négationnisme du génocide, découlant d’une décision-cadre de l’Union européenne de 2008, était normal. En effet, le texte proposé ne mentionne pas l’incitation à la haine que doit comporter la négation du génocide contre une communauté.

Photo de Hervé MarseilleHervé Marseille :

...nté politique. La menace d’une question prioritaire de constitutionnalité a d’autant moins de sens que la proposition de loi, voulue par le Président de la République, est destinée à protéger les libertés publiques. La loi de 2001 n’est assortie d’aucune contrainte : elle est purement déclarative. La liberté d’expression n’est pas en cause, car la proposition de loi qui nous est soumise vise le négationnisme outrancier. Le juge, monsieur le président de la commission des lois, et lui seul, peut sur le fondement de l’article 211-1 du code pénal qualifier juridiquement les faits. Dès lors, rien ne s’oppose à cette proposition de loi et rien ne justifie, non plus, le dépôt d’une motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité. Ce texte devrait donc recueillir tout le soutien qu’il mérite au sein ...

Photo de Philippe KaltenbachPhilippe Kaltenbach :

...t l’amitié qui doivent nous guider. La vérité, car ce qui s’est passé en Turquie ottomane en 1915 est bien un génocide. Aujourd’hui, tous les historiens sérieux qui ont travaillé sur ce sujet le reconnaissent. Les preuves sont aussi nombreuses qu’accablantes. La justice, car la loi de 2001 n’avait pas prévu de dispositif de sanctions contre celles et ceux qui la violeraient. Malheureusement, le négationnisme s’est développé et est devenu de plus en plus virulent. Nos concitoyens d’origine arménienne ont le droit d’être protégés contre ces propos et ces actes négationnistes, qui sont autant de coups de poignards dans leurs cœurs. Comme l’a écrit Elie Wiesel, « tolérer le négationnisme, c’est tuer une seconde fois les victimes ». La Shoah bénéficie de la loi Gayssot. Il était alors naturel que la néga...

Photo de Philippe KaltenbachPhilippe Kaltenbach :

...eurs. Des historiens, des journalistes, des écrivains, des intellectuels, des responsables associatifs d’origine turque et arménienne, des juristes ont exprimé des opinions très différentes sur la question. Je les remercie de nouveau de leur précieux concours. Légiférer, c’est écouter, débattre et décider. À l’issue de ces échanges, je suis encore plus convaincu de la nécessité de sanctionner le négationnisme. En le faisant, le législateur est bien dans le rôle que lui confère la Constitution. Ces dernières semaines, les détracteurs de la loi ont utilisé de nombreux arguments. Je souhaite y répondre pour éclairer le débat et ne laisser aucune amertume au sujet de cette loi, qui est du petit-lait pour les défenseurs de la vérité et de la justice. Tout d’abord, des voix se sont élevées pour dénoncer u...

Photo de Philippe KaltenbachPhilippe Kaltenbach :

...ype de dispositif législatif n’entrave le travail des chercheurs. Je crois qu’il faut préciser, tout d’abord, qu’une telle loi tendant à réprimer la contestation de l’existence des génocides présentera l’immense avantage de libérer le champ d’investigation des historiens des faussaires et des manipulateurs. Je voudrais aussi rappeler que la loi Gayssot du 13 juillet 1990, votée pour protéger du négationnisme la mémoire des victimes de la Shoah, n’a jamais gêné le travail des historiens.

Photo de Philippe KaltenbachPhilippe Kaltenbach :

...eur de démontrer qu’il ne vise pas tant la contestation du génocide en tant que telle que l’incitation à la haine raciale dont elle est porteuse. Pour ce qui serait une atteinte à la liberté d’expression, personne ne saurait contester que dans tout État démocratique la liberté d’expression connaît des limites. Ces limites ont ici, pour objet de prévenir toute incitation à la haine induite par le négationnisme. Par ailleurs, cette proposition de loi ne transformera pas le Parlement en tribunal. En effet, alors que la précédente proposition rejetée le 4 mai dernier était muette sur les éléments constitutifs du génocide contesté, l’actuelle proposition incrimine la contestation ou la minimisation d’un crime de génocide tel qu’il est défini par l’article 211-1 du code pénal. Le fait de renvoyer à une dé...

Photo de Luc CarvounasLuc Carvounas :

...cédés barbares au nom d’une idéologie nationaliste et raciste, ce qui constitue la première grande tragédie humaine du xxe siècle, les victimes des crimes de 1915 demeurent ancrées dans nos mémoires. L’acte génocidaire vise à l’anéantissement d’un groupe, d’un peuple. Mais il ne s’arrête pas là, une fois l’horrible forfait commis. La volonté génocidaire se perpétue incontestablement à travers le négationnisme. Si le génocide est l’anéantissement des corps, le négationnisme est l’anéantissement des mémoires. Quel rôle vient jouer le législateur dans cette affaire ? Selon certaines critiques, le Parlement se chargerait ici de délivrer une vérité historique officielle en empruntant un chemin intrusif à travers le champ de l’Histoire. D’autres critiques s’épanchent sur le caractère répétitif de l’adopti...

Photo de Bruno GillesBruno Gilles :

L’Histoire, qui admet le génocide arménien, nous rappelle également les liens profonds qui existent entre nos deux pays. Au nom des Arméniens réfugiés des massacres de 1915, que nous avons accueillis sur notre sol et dont les descendants font partie intégrante de notre nation, nous devons mettre un terme au négationnisme dont ils sont la cible. Mes chers collègues, nous devons toujours avoir à l’esprit, dans chacun de nos choix, de nos actes, de nos votes, les valeurs qui ont motivé notre engagement dans la vie publique. Pour ma part, je ne renierai pas les valeurs de justice qui m’animent. Il est juste que le droit protège la mémoire des victimes de génocides ; il est juste qu’il préserve l’honneur de leurs des...

Photo de Ambroise DupontAmbroise Dupont :

...rgent contre ce qu’ils qualifient parfois de « dérive ». D’éminents juristes soulignent aussi l’impossibilité pour le législateur de se prononcer sur l’Histoire, sur la vérité ou sur la fausseté de tels ou tels faits. En mai dernier, les débats sur le même sujet ont remis en évidence les problèmes de conformité à la Constitution qui ne manqueraient pas de se poser. Les moyens de sanctionner le négationnisme, que M. le rapporteur vient de rappeler, existent déjà et peuvent être appliqués. J’évoquerai simplement dans ce propos quelques aspects plus politiques du texte dont nous débattons qui relèvent, j’en ai bien conscience, de notre temps. Faut-il rappeler que la France a reconnu, il y a onze ans, le génocide arménien et que peu d’États ont affiché une position aussi claire sur cette question ? Po...

Photo de Sophie JoissainsSophie Joissains :

... Richard Lemkin pour qualifier le massacre des Arméniens – est le plus grave des crimes commis contre l’humanité. La loi française en reconnaît deux à ce jour : la Shoah, au travers de la loi Gayssot et le génocide arménien, par la loi de 2001. Or seule la négation de la Shoah est pénalement réprimée. La présente proposition de loi vise donc à combler une lacune du droit pénal, en incriminant le négationnisme de tous les génocides reconnus comme tels pas la loi française, sans en mentionner aucun expressément. Dans cet esprit, ce texte se présente comme une extension de la loi Gayssot à tous les génocides reconnus par la loi. Il n’est pas une transposition de la décision-cadre de 2008 du Conseil de l’Union européenne, qui fera l’objet d’un projet de loi ultérieur. Le titre initial du texte déposé pa...

Photo de Sophie JoissainsSophie Joissains :

...roit. Cet abus doit être puni par la loi Gayssot et par la présente proposition de loi. Je le répète, le génocide est un acte d’une telle gravité que cette restriction à la liberté d’expression paraît proportionnée aux objectifs poursuivis. La loi Gayssot tend à prévenir la résurgence d’un discours antisémite. Le texte que nous examinons aujourd’hui vise, lui, à prévenir l’influence en France du négationnisme d’État pratiqué aujourd’hui par la Turquie. Notre collègue Valérie Boyer, rapporteur de la proposition de loi à l’Assemblée nationale, a subi insultes et menaces. Des sites internet haineux ont fleuri, diffusant des thèses négationnistes et racistes anti-arméniennes, anti-grecques, anti-kurdes. Je tiens les noms de ces sites à votre disposition, si vous le souhaitez. Il faut savoir que la déché...

Photo de Nicolas AlfonsiNicolas Alfonsi :

...il vaut mieux, dans un domaine aussi sensible, s’exprimer par la voie de résolutions que par des propositions de loi. Si un recours prospérait et que nous étions ramenés à la case départ, le vote d’une résolution, aujourd’hui inutile – celui de la loi du 29 janvier 2001 y supplée –, retrouverait sa raison d’être. La proposition de loi est inutile parce que les moyens juridiques de poursuivre le négationnisme existent. De surcroît, si celle-ci était adoptée, la France donnerait aux magistrats le pouvoir de se substituer aux historiens – un pouvoir qu’aucun pays n’a jugé utile de leur reconnaître. Pour toutes ces raisons, le groupe RDSE votera la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité.

Photo de Jean-Michel BayletJean-Michel Baylet :

...tion de loi entre en contradiction avec les dispositions de l’article 34 de la Constitution, qui découle du principe de la séparation des pouvoirs. Il ne peut en aucun cas revenir au Parlement de se prononcer sur l’existence et la qualification juridique d’un quelconque fait ou événement en lieu et place des juges. La Cour de cassation impose une définition claire et précise du génocide cible du négationnisme. Faute d’une telle définition de la catastrophe de 1915 par une loi qui se borne à le reconnaître, l’inconstitutionnalité du texte que nous examinons ne semble faire aucun doute, comme l’a très bien exposé notre rapporteur, que je salue et félicite. C’est d’ailleurs en ce sens que s’est exprimé Robert Badinter, avec la force et le talent que nous lui connaissons, le 4 mai dernier, à cette tribune...

Photo de Natacha BouchartNatacha Bouchart :

...rménien a été reconnu par le gouvernement démocratique turc en 1919 ; certains de ses auteurs ont alors été condamnés par la cour martiale de Constantinople. Il devient urgent de réparer une injustice dont l’ensemble du peuple arménien souffre encore aujourd’hui. Le vide juridique ne sera totalement comblé qu’avec l’adoption définitive de ce texte. Je suis persuadée que seule la pénalisation du négationnisme prévue par cette proposition de loi offrira à toutes les victimes de ces monstruosités le meilleur moyen de reconstruire leur identité. Seule la menace d’une réelle sanction pourra empêcher les auteurs de négationnisme de continuer en toute impunité à faire souffrir des millions de personnes partout dans le monde. De plus, si ce texte est adopté, chaque fois qu’un génocide sera reconnu par la Fr...

Photo de Luc CarvounasLuc Carvounas :

...ans le but de veiller au respect d’une loi, en l’espèce celle de 2001. Cette proposition de loi, si elle est adoptée, n’empêchera pas les historiens, je l’ai dit tout à l’heure, de poursuivre librement leurs recherches. En revanche, elle permettra de démasquer les faussaires de l’histoire et de les marginaliser. Concrètement, l’expérience de l’application de la loi Gayssot visant à pénaliser le négationnisme de la Shoah a montré qu’aucun chercheur sérieux n’avait vu sa liberté de recherche entravée par une condamnation pénale. J’ajoute que l’intention du législateur n’est nullement de porter atteinte à la liberté d’expression. Chacun sait qu’elle a des limites légales. Dans le cas présent, nous veillons bien à prévenir toute incitation à la haine induite inévitablement par les discours négationniste...

Photo de Anne-Marie EscoffierAnne-Marie Escoffier :

...a-t-il demain si le Parlement s’entête à vouloir répondre à toutes les exigences mémorielles ? En l’occurrence, le terme « minimisé », introduit à l’article 1er, inquiète les historiens, qui doivent manier des chiffres et, souvent, donner des fourchettes, car ils ne disposent pas toujours des sources conduisant à la certitude. La négation ne doit faire l’objet, en droit, d’aucune indulgence. Le négationnisme est une insulte à la mémoire, tout le monde en convient. Mais sa déclinaison juridique, c’est-à-dire la contestation, la banalisation grossière et aujourd’hui la « minimisation », crée une marge d’appréciation du juge potentiellement handicapante pour la recherche historique et contraire au principe fondamental de notre procédure pénale que constitue la stricte interprétation des lois pénales. C...

Photo de Yannick VaugrenardYannick Vaugrenard :

D’ailleurs, les deux actes ont été condamnés par la Cour européenne des droits de l’homme. Fallait-il une loi ? Je pense que oui, car la vérité n’est pas toujours assez forte pour terrasser le mensonge. Le négationnisme, à l’instar du racisme, ne peut et ne doit pas être considéré comme une opinion. Ce sont l’un et l’autre des délits, condamnables par les lois de notre République ! Alors, oui, une loi est nécessaire pour tous les génocides ! Contrairement à ce qu’on entend parfois, ce n’est pas une loi contre la Turquie ! Cela va sans dire, mais cela va encore mieux en le disant. À mon sens, un jour viendra o...

Photo de Bariza KhiariBariza Khiari :

...ommunauté des historiens de travailler avec l’objectivité qui la caractérise. Comme elle relève de l’affect, de l’émotion, la mémoire est labile ; elle est pourtant nécessaire car elle rend toujours vivants ceux qui ne sont plus et qui nous ont précédés. Mais, pour reprendre les propos de Jacques Le Goff, « la mémoire […] ne cherche à sauver le passé que pour servir le présent et l’avenir. » Le négationnisme est une insulte à la mémoire. La loi, quant à elle, n’a pas vocation à trancher les rapports entre l’histoire et la mémoire. Comme l’a, à juste raison, souligné Robert Badinter, et comme l’ont rappelé plusieurs intervenants, « le Parlement n’est pas un tribunal. » Mes chers collègues, tout comme Jean-Michel Baylet, je m’interroge : comment aurions-nous réagi si un pays tiers avait légiféré pour ...