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Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, l’enquête nationale sur les violences envers les femmes réalisée en 2000 nous apprend que, en France, on dénombre chaque année 50 000 viols, 150 000 tentatives de viol, 400 000 autres violences sexuelles, soit au total 600 000 agressions sexuelles. En 2010, le ministère de l’intérieur a recensé 7 000 plaintes pour viol, 7 500 plaintes pour agression sexuelle. La même année, le ministère de la justice a enregistré 1 355 condamna...
Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons aborde un sujet sensible, celui du délai dont dispose la victime d’une agression sexuelle pour porter plainte contre son agresseur et faire en sorte que celui-ci soit poursuivi. Ce sujet est d’autant plus sensible que, à la différence des viols et des tentatives de viol, qui constituent des crimes et pour lesquels le délai de prescription de l’action publique est de dix ans, les autres agressions sexuelles constituent des délits pour lesquels le délai de prescription n’est donc que de trois ans. Si l’on considère, comme l’indique l’exposé des motifs de la proposition de loi, que le « ressenti immédiat » pour la victime et « les symptô...
En alignant le régime des agressions sexuelles sur celui des viols, ne risquerait-on pas de banaliser les formes les plus graves d’agressions sexuelles – je ne prétends pas que tel est l’objet de la proposition de loi – alors qu’il s’agit de réalités très différentes ? Il ne faut pas non plus sous-estimer les difficultés probatoires auxquelles seraient confrontées les victimes d’agressions sexuelles qui porteraient plainte plus de trois ans après les faits. En...
...tés à parler du drame qu’elles ont vécu. Les raisons de ce silence sont multiples : crainte, honte, peur de représailles, pressions sociales et professionnelles, déni, etc. Or, comme nous pouvons l’imaginer, ce refus de parler peut détruire des vies entières, celle des victimes bien sûr, mais aussi celle de leurs proches. À l’heure actuelle, nous savons que seule une femme sur dix ose parler des violences sexuelles qu’elle a subies. Ce chiffre tombe à 5 % pour les femmes victimes de viol ou de tentative de viol de la part de leur conjoint et à 2 % pour celles qui porteraient plainte dans de pareils cas. Selon une étude de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales parue en juillet dernier, 663 000 femmes ont déclaré avoir subi des violences physiques ou sexuelles entre...
Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous connaissons, en France, une situation paradoxale : des lois en progrès, mais des violences persistantes à l’égard des femmes, expression la plus extrême de la domination masculine. C’est toujours à la suite d’une longue mobilisation des féministes que des avancées juridiques voient le jour ; je pense notamment à la modification dans le code pénal du crime de viol en 1980 ou encore à la création du délit de harcèlement sexuel en 1992, délit défini désormais également par la loi. ...
Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, chers collègues, l’intention des auteurs de cette proposition de loi apparaît à première vue compréhensible. Elle est fondée sur le constat que la frontière entre viol et agression sexuelle est souvent étroite. Le vécu des victimes est même souvent identique, le traumatisme spécifique engendré par l’un ou l’autre restant trop souvent un tabou douloureux. Si nous comprenons donc l’objectif de ce texte, nous estimons qu’il s’agit en réalité d’une fausse bonne idée davantage dictée par des réactions passionnelles légitimes que par une démarche juridique approprié...
...e deux objectifs. Le premier, simple, mais indispensable, est le droit à être écouté et pris en charge par les professionnels de santé. On constate avec soulagement, cela a été dit, que de nombreuses structures, en particulier associatives, se sont développées depuis plusieurs années pour offrir un soutien psychologique, essentiel à la reconstruction – j’insiste sur ce mot – des victimes de ces violences. Mais cela ne suffit pas, les victimes détenant heureusement le droit à être également entendu par la justice et à participer au déclenchement des poursuites pénales. C’est ce second volet qui retiendra ici toute notre attention, puisqu’il cristallise l’ensemble des interrogations soulevées aujourd’hui par la proposition de loi. L’objectif visé par ses auteurs est d’allonger le délai de pre...
La présente proposition de loi tend à modifier le délai de prescription de l’action publique des agressions sexuelles autres que le viol. Notre droit établit une différence entre le viol et la tentative de viol, d’une part, et les agressions sexuelles, d’autre part. Alors que les premiers sont des crimes passibles d’au moins quinze ans d’emprisonnement, les secondes sont des délits punis de peines d’au moins cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. Cette distinction a également des conséquences sur le régime de la pre...
...ime des prescriptions. Reste que ne pas répondre aux questions que j’ai posées représente une vraie douleur et une vraie injustice pour les personnes concernées. Mesdames, mes chères collègues, à celles d’entre vous qui auront décidé de voter l’amendement de suppression de l’article 1er, cœur de la présente proposition de loi, je demande ce que vous répondrez aux associations de lutte contre les violences faites aux femmes quand elles vous interrogeront sur votre vote. Messieurs, mes chers collègues, à ceux d’entre vous qui voteront également cet amendement, je veux dire que, au fond, me semble-t-il, vous ne croyez pas à ces traumatismes considérables que connaissent les victimes. Il n’est pas important qu’une femme – puisque, on le sait, ce sont majoritairement des femmes qui sont victimes...
Le débat qui nous réunit cet après-midi traite d’un sujet grave. Force est de constater que les agressions sexuelles autres que le viol sont aujourd’hui injustement prises en compte. Au reste, le faible nombre de plaintes déposées témoigne de la grande complexité du problème, tant est fort le sentiment de honte, de culpabilité et de peur souvent ressenti par la victime, en particulier quand l’acte a été commis au sein du couple, conduisant à un sentiment partagé d’amour et de haine. Plusieurs orateurs ont estimé que le délai de ...
...que le coupable soit jugé, qu’il reconnaisse les faits qu’il a commis, qu’il comprenne leur gravité. Le coupable doit prendre conscience de la trace indélébile qui marque sa victime, de la déstructuration dont elle est l’objet, et dont nous recevons tous témoignage dans nos permanences. Je me souviens de la lutte des associations de femmes, des avocates, voilà une trentaine d’années, pour que le viol soit enfin criminalisé, et non plus correctionnalisé, pour qu’il soit jugé en cours d’assises. Ne le banalisons pas ! Si les raisons de droit ne doivent pas dominer, on ne peut pas ne pas en tenir compte. Le pire serait sans doute de donner des illusions aux victimes. Comme l’a indiqué Mme Génisson, il y a autre chose à faire. Pour ma part, je voterai l’amendement même si je comprends l’abstent...
...des hommes. Donc, le tabou existe, il n’y a pas de honte à le reconnaître, y compris pour un homme. Il reste un long chemin à parcourir avant que les femmes portent plainte pour les agressions sexuelles qu’elles subissent, surtout lorsque ces dernières sont commises dans la sphère des relations sociales et professionnelles. Conscient de cette situation, le législateur a voté la loi relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. Cette loi, intéressante, a permis des avancées, même si les moyens consacrés à son application restent insuffisants. Nous ne pouvons être que favorables au soutien psychologique des victimes, à leur accompagnement pour qu’elles portent plainte. Mais il ne faut pas noyer le...
J’ai déjà connu pareille mésaventure, et je puis vous assurer que c’est extrêmement désagréable. En votant cet amendement, nous commencerions une année qui est censée être consacrée à la lutte contre les violences faites aux femmes et à la condition des femmes en refusant de débattre d’un texte qui vise à mieux reconnaître les droits des femmes. Réfléchissons, mes chers collègues ! Est-ce un message positif que nous envoyons aux centaines de milliers de personnes, femmes ou hommes, victimes d’agressions sexuelles ? Certes, la majorité des victimes d’agressions sexuelles sont des femmes, Mme Borvo Cohe...
...s nécessaire. Enfin, il dispose que « le signalement aux autorités compétentes effectué dans les conditions prévues au présent article ne peut faire l'objet d'aucune sanction disciplinaire ». Certes, la question peut se poser de la manière dont cet article est appliqué. À ce propos, je dois dire que, lors des auditions auxquelles nous avons procédé, la présidente du Collectif féministe contre le viol m’a alerté sur l’existence de procédures disciplinaires engagées contre des médecins ayant signalé des mauvais traitements aux autorités. Tout en émettant un avis défavorable sur l’amendement n° 2, par cohérence avec la position de la commission des lois qui a proposé de ne pas adopter la présente proposition de loi, je trouverais bienvenu d’obtenir du garde des sceaux quelques explications sur ...