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Notre droit pénal établit une distinction claire entre le viol et la tentative de viol, crimes passibles d'au moins quinze ans de réclusion, d'une part, et les autres agressions sexuelles, délits punis de peines d'au moins cinq ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende, d'autre part. Cette distinction a des conséquences sur le régime de prescription de l'action publique : alors que les viols et tentatives de viol peuvent être poursuivis dans un délai de dix ans à compter de leur commission, ce délai est de trois ans seulement en matière d'agression sexuelle. Or, selon l'auteur de la proposition de loi, notre collègue Muguette Dini, le traumatisme causé par une agression sexuelle est semblable à celui causé par un viol, et les victimes, qui n...
Je suis quant à moi partagée ; mon groupe n'a d'ailleurs pas discuté de ce texte. Certes, il est toujours problématique de modifier le régime des prescriptions et la hiérarchie des crimes et délits. Mais la révélation des agressions sexuelles fait toujours l'objet d'un énorme tabou dans notre pays, surtout quand elles ont lieu entre proches. Au grand dam de certains de mes amis, j'ai voté l'allongement à vingt ans du délai de prescription des agressions sexuelles les plus graves contre les mineurs. Chez les majeurs, les plaintes restent rares, ce qui t...
...ès défavorable à cette proposition de loi, et je sais gré à M. le rapporteur de sa sage position. Il s'agit en effet d'une « fausse bonne idée ». Pour avoir souvent plaidé dans ce genre d'affaires, je sais qu'il faut être prudent. Il est prioritaire de protéger les victimes, mais pas dans n'importe quelles conditions. Nous avons suffisamment protégé les victimes mineures en allongeant le délai de prescription et en le faisant courir à partir de leur majorité. Mais juger une affaire dix-huit ou dix-neuf ans après les faits peut produire des dégâts considérables dans les familles.
Notre droit pénal est fondé sur une hiérarchie entre crimes, délits et contraventions. Aligner les délais de prescriptions de délits sur celui de crimes serait une dérive. ( M. Jean-Jacques Hyest le confirme) Entendons les magistrats : lors des audiences solennelles de rentrée, ils sont nombreux à avoir dénoncé l'accumulation de lois parfois contradictoires, et ils ont souhaité disposer d'une vision claire de l'appareil répressif. Peut-être faut-il procéder à une réforme globale de la prescription en matière pénale,...
Je comprends l'objectif des auteurs de ce texte, et je constate moi aussi que les violences faites aux femmes sont encore l'objet d'un tabou qu'il faut lever, beaucoup d'infractions ne donnant lieu à aucune poursuite. Mais je suis du même avis que le rapporteur. C'est d'abord une question de principe : faut-il revoir le régime des prescriptions ? Montesquieu disait qu'il ne faut toucher aux lois que d'une main tremblante... La prescription est une contrainte, mais c'est aussi la garantie d'un débat judiciaire fondé sur les preuves. En outre, la distinction des crimes, délits et contraventions est au fondement de notre système pénal : si l'on veut aligner les délais de prescription, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout, et considérer tou...
Je souscris à l'analyse nuancée du rapporteur. Ses objections juridiques sont fondées ; le texte ne poserait pas les mêmes problèmes si l'on avait préféré une solution intermédiaire, en allongeant le délai de prescription sans le porter à dix ans. Une remarque seulement. M. le rapporteur demandait si les agressions sexuelles étaient plus traumatisantes que d'autres violences ; je crois pour ma part, comme beaucoup d'associations féministes, qu'elles font des dégâts très spécifiques. Il faut veiller à ne pas banaliser les violences sexuelles, qui ont, hélas, un ancrage ancien dans notre société. Heureusement, les c...
En adepte de Montesquieu, comme M. Anziani, j'observe avec une grande réserve la succession des textes aggravant les peines et allongeant les délais de prescription. C'est une tentation à laquelle il faut savoir résister. Si nous votons cette proposition de loi, nul doute que nous serons saisis dans les mois à venir d'autres textes modifiant le régime de la prescription pour d'autres infractions. Nous avons assez critiqué la tendance à légiférer à chaque fait divers pour ne pas tomber dans ce travers. Mieux informer et accompagner les victimes serait mille f...
Je remercie le rapporteur, qui aurait pu citer également le rapport de Jean-Marie Coulon, dont les conclusions étaient les mêmes que celles de notre mission d'information : il proposait d'allonger les délais de prescription de trois à cinq ans pour les délits et de dix à quinze ans pour les crimes, en préservant la cohérence d'ensemble. Il y a près de vingt ans, nous avons su mener une réflexion d'ensemble sur le nouveau code pénal. Mme Tasca a raison de souligner la spécificité des violences sexuelles, mais c'est d'une véritable politique pénale que nous avons besoin, plutôt que d'une nouvelle loi. Chaque fois que ...