Interventions sur "judiciaire"

42 interventions trouvées.

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le texte qui vous est présenté est relatif au Parquet européen et à la justice pénale spécialisée. S’agissant de la constitution du Parquet européen, disons-le d’emblée, les dispositions proposées sont prometteuses. La capacité de transcrire dans notre droit, dans notre institution judiciaire, qui plus est dans un domaine régalien, un mécanisme très original constitue par ailleurs une bonne surprise. En effet, depuis plus de dix ans, il y a une aspiration à la constitution d’un Parquet européen et à une coordination entre pays, dans la mesure où nombre d’infractions sont transfrontalières. Si l’Europe est un marché unique, elle constitue également un système juridique porteur de vale...

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

...et conjoint, afin de garantir une protection effective de ses intérêts financiers. C’est la raison pour laquelle, sur le fondement de l’article 86 du traité de Lisbonne et sous l’impulsion de notre pays et de l’Allemagne, 22 pays de l’Union européenne ont signé, le 12 octobre 2017, le règlement mettant en œuvre une coopération renforcée et instituant un Parquet européen. Cette nouvelle autorité judiciaire viendra compléter l’arsenal constitué de l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), d’Eurojust, d’Europol et des parquets nationaux. L’ordonnance relative à la lutte contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union au moyen du droit pénal constituait une première étape vers ce renforcement de la lutte contre la fraude au niveau européen. Ce mouvement est aujourd’hui pours...

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

...inistre, nos combats sur tous ces sujets. Cependant, la création de ce parquet ne va pas sans soulever, à nos yeux, quelques questions. Qu’en est-il, d’abord, de la garantie d’indépendance promise aux parquetiers européens ? Le procureur mènera seul l’intégralité des investigations en matière d’atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne, et exercera les poursuites devant le tribunal judiciaire de Paris. « Si son indépendance est reconnue par le règlement, elle risque pourtant de rester une chimère si elle n’est pas entourée de garanties », estime le Syndicat de la magistrature. Or le projet reste muet sur les conditions de cette indépendance, le Gouvernement expliquant avoir fait le choix d’une mise à disposition du magistrat français souhaitant exercer ces fonctions. Aussi la cohéren...

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

...à l’enquête parquet ou selon les règles applicables à l’instruction, en se passant du juge d’instruction. Cela pose aussi question, d’autant que les compétences du parquet, pour l’instant limitées aux affaires financières, pourront ou pourraient par la suite être étendues, notamment en matière d’antiterrorisme. Nous serons vigilants sur ce point, sachant en outre que cette extension de l’arsenal judiciaire de l’Union européenne ne peut être pensée tout à fait indépendamment du reste de la politique européenne – je pense notamment à la politique sécuritaire de l’Union. De ce point de vue, nous gardons à l’esprit le modèle qui a présidé à la construction de l’espace européen sur la base du contrôle aux frontières et d’une fermeture aux extracommunautaires, modèle d’ailleurs largement inefficace pour ...

Photo de Alain MarcAlain Marc :

...tion du Parquet européen et de poursuivre l’amélioration des dispositifs actuels de notre droit national concernant la justice pénale spécialisée. Ce texte appelle plusieurs remarques. En premier lieu, la création du Parquet européen s’inscrit dans la perspective de la construction d’un espace européen de liberté, de sécurité et de justice. Afin de respecter la souveraineté des États en matière judiciaire, son organisation est cependant décentralisée : les procureurs européens délégués, désignés dans chaque État membre, seront chargés de conduire les enquêtes et de représenter le ministère public devant les juridictions de jugement nationales. Cette organisation décentralisée n’était pas celle qui avait été envisagée par la Commission européenne lorsque celle-ci avait présenté, en 2013, sa propos...

Photo de François BonhommeFrançois Bonhomme :

..., et d’assurer une plus grande cohérence et une meilleure coordination de ces efforts ». Or, en la matière, il y a bel et bien urgence à agir. Je rappelle que, entre 2010 et 2017, l’Office européen de lutte antifraude a recommandé le recouvrement de plus de 6, 6 milliards d’euros pour le budget de l’Union européenne. Il a par ailleurs présenté plus de 2 300 recommandations concernant des mesures judiciaires, financières, disciplinaires et administratives que devraient prendre les autorités compétentes des États membres et de l’Union européenne. Je rappelle également que l’Office européen de lutte antifraude ne dispose d’aucun pouvoir de sanction. La Commission européenne estime quant à elle que la fraude à la TVA pourrait, à elle seule, représenter près de 50 milliards d’euros de pertes par an po...

Photo de Jacques BigotJacques Bigot :

... matière de dépôt sauvage d’ordures et d’insalubrité générale, il n’y a pas non plus de poursuites, car il y a très peu de constatations, faute de moyens. Permettez-moi donc de douter quand vous nous dites aujourd’hui que ce texte marque votre ambition politique de sanctionner et de prévenir les atteintes à la biodiversité et à l’environnement ! Vous nous proposez un outil nouveau, la convention judiciaire d’intérêt public, qui s’appliquera en matière d’écologie, soulignant que cela permettra de mieux responsabiliser les entreprises, de réparer le préjudice et d’éviter une procédure lourde. Il s’agit surtout d’éviter une procédure lourde ! Nous savons tous que, lorsqu’on poursuit une entreprise pour des atteintes à l’environnement, il est essentiel d’avoir un dossier fourni, étayé par des constats ...

Photo de Joël LabbéJoël Labbé :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi dont nous discutons aujourd’hui comporte des dispositions très variées, plus ou moins attendues par nos concitoyens. L’adaptation de notre système judiciaire à l’instauration d’un Parquet européen, en particulier à l’installation de procureurs délégués dans chaque État membre, vient clore un long processus de négociations européennes. Le groupe du RDSE ne peut que saluer la mise en œuvre d’une nouvelle coopération renforcée au sein de l’Union européenne. Cela devrait permettre d’accroître la lutte contre les fraudes portant préjudice aux intérêts fina...

Photo de Sophie JoissainsSophie Joissains :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la protection des personnes et des biens requiert que notre organisation judiciaire soit en phase avec un monde où les échanges se multiplient sans considération des frontières, y compris quand ces échanges sont le fait de réseaux criminels bien organisés. Le projet de loi qui nous est présenté aujourd’hui entend, dans cet objectif, adapter la législation française à la coordination nécessaire avec le Parquet européen et à renforcer l’efficacité de la justice pénale spécialisée...

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mon propos portera sur l’article 8 de ce projet de loi, qui prévoit la création d’un nouvel outil pour lutter contre la délinquance environnementale – la convention judiciaire d’intérêt public – et celle de pôles régionaux spécialisés en matière d’atteintes à l’environnement. Je regrette, madame la ministre, que cette réforme de la justice environnementale ait surgi presque inopinément, au détour d’un projet de loi technique relatif au Parquet européen, sans que les commissions parlementaires compétentes n’en aient été ne fût-ce qu’informées avant la présentation du t...

Photo de André ReichardtAndré Reichardt :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en adaptant notre ordre juridique national pour y intégrer les principes, les missions et les structures du Parquet européen, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui marque l’aboutissement d’une évolution, que l’on peut assurément considérer comme majeure, de la coopération judiciaire européenne. En effet, celle-ci va désormais sortir du champ exclusivement intergouvernemental qui était le sien jusqu’à maintenant. Pour la première fois, une instance européenne disposera de compétences judiciaires propres en matière pénale. Le Parquet européen pourra ainsi poursuivre directement les infractions portant atteinte aux intérêts financiers de l’Union européenne, tels qu’ils ont été...

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

L’amendement est bien sûr de qualité ; toutefois, il me semble déjà satisfait. L’esprit du texte qui vous a été présenté, dans le cadre de ce que j’ai appelé une transposition « simple et pragmatique » dans notre système judiciaire, consiste à ne pas créer un droit de procédure pénale spécifique pour le Parquet européen. L’idée est donc que les deux procureurs européens délégués appliquent l’ensemble de nos dispositions de procédure pénale, qui apportent toutes les garanties, notamment celle du respect du principe du contradictoire. Le principe même de la réforme proposée va dans le sens que vous souhaitez, mon cher collè...

Photo de Joël LabbéJoël Labbé :

...oin de proximité ainsi que sur une exigence de simplification des procédures administratives. » La constitution de juridictions spécialisées semble aller à l’encontre de cet extrait de l’exposé des motifs du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, destiné à renforcer la proximité entre les administrations et les administrés. La concentration à Paris des instances judiciaires spécialisées, qu’elles soient à venir ou déjà en place, comme le parquet national antiterroriste, entraîne une distanciation géographique entre les justiciables et le juge. Elle conduit en outre à la concentration du personnel administratif et judiciaire dans la région où l’immobilier est le plus cher, privant d’autres territoires de la République d’un levier important de développement. On aura...

Photo de Joël LabbéJoël Labbé :

...et amendement vise donc à proportionner le montant de l’amende, calculé sur le chiffre d’affaires de la personne morale, aux avantages tirés de l’ensemble des infractions prévues par le code de l’environnement. Il s’agit d’une mesure d’équité. Je pense notamment aux très grandes entreprises qui peuvent se permettre d’être accompagnées juridiquement et qui pourront, grâce à la nouvelle convention judiciaire d’intérêt public, négocier leur peine. Cette situation est inéquitable au regard des petites entreprises qui s’efforcent de respecter la loi et ne tirent pas profit de leurs infractions, souvent non intentionnelles. En outre, cet amendement vise à mettre fin à la quasi-impunité de ces grosses entreprises, les peines prononcées aujourd’hui étant indolores et incitant à la constitution de provisio...

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

...délai relativement restreint. Par ailleurs, sur un plan plus politique, comme je l’ai souligné lors de la discussion générale, la véritable avancée de ce texte, en matière d’environnement, ne réside pas tant dans la création de juridictions spécialisées, qui ne traiteront que la partie médiane du spectre des infractions – j’y vois au moins une vertu pédagogique –, que dans celle de la convention judiciaire d’intérêt public. Monsieur Labbé, vous proposez que le montant de l’amende puisse aller jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires de l’entreprise, quand la convention judiciaire d’intérêt public fixe le plafond à 30 % de celui-ci. Il s’agit donc d’un outil ultra-puissant, dont la mise en œuvre sera rapide et loin d’être indolore, une publication étant en outre prévue. Enfin, la CJIP permettra, contrai...

Photo de Philippe BonnecarrerePhilippe Bonnecarrere :

La commission propose au Sénat de rejeter cette demande de renvoi à la commission de l’article 8. Comme je l’ai déjà souligné, la création de juridictions spécialisées en matière d’environnement va plutôt dans le bon sens, même s’il ne faut pas en exagérer l’importance. Surtout, la convention judiciaire d’intérêt public constituera un outil très puissant pour réprimer, à l’avenir, les infractions au code de l’environnement et aussi assurer une forme de prévention. Chers collègues du groupe socialiste et républicain, il serait d’autant plus dommage de renvoyer l’article 8 à la commission que la CJIP est un peu votre enfant. En effet, ce dispositif est apparu dans notre droit, en matière fiscale ...

Photo de Jacques BigotJacques Bigot :

...obiliser l’administration pour constater les infractions et créer des procureurs spécialisés. Mais à quoi bon créer des procureurs spécialisés par ressort de cour d’appel s’il n’y a pas de saisines, de rapports et de dossiers suffisamment solides et argumentés ? Nous considérons que, en l’état, cet article 8, c’est du vent ! Voilà la réalité ! On pourra envisager de mettre en place la convention judiciaire d’intérêt public, mais elle doit s’inscrire dans une stratégie globale. Quelle est votre ambition politique, madame la ministre ? Pour l’heure, nous ne le savons pas.

Photo de Guillaume GontardGuillaume Gontard :

...t répressif doit donc être porté à la hauteur des défis écologiques, pour la survie même de notre humanité. Nous partageons l’intention de renforcer la justice environnementale et ses moyens. Pour autant, les mesures de ce texte sont largement décevantes. Ainsi, l’article 8 prévoit la création d’une sorte de transaction pénale dans le domaine environnemental via la création de conventions judiciaires d’intérêt public. À l’image de ce qui existe en matière d’évasion fiscale, il s’agit d’ouvrir au ministère public la possibilité de traiter directement avec les délinquants environnementaux. D’une part, un tel dispositif existe déjà et il n’y a donc pas de nouveauté, notamment pour les délits les moins graves. D’autre part, nous jugeons ce mécanisme contre-performant en termes de symbole. Nous...

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Mon collègue Guillaume Gontard a plus précisément évoqué les dangers de la convention judiciaire d’intérêt public. Nous nous étions déjà opposés aux transactions pénales en matière d’évasion fiscale. Nous n’avons aucune raison de changer d’avis aujourd’hui, quand bien même l’objet de ces transactions, dont le principal intérêt est de remplir les caisses de l’État, a changé. Je n’y reviendrai donc pas. La question de fond que mon collègue a posée est de savoir de quel arsenal législatif et r...

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

... décidé d’emprunter. Deux mécanismes transactionnels permettent aujourd’hui de traiter les contentieux relevant du code de l’environnement. Grâce à la transaction et la composition pénales, près de 80 % des cas sont réglés en évitant la lourdeur d’un procès. Or transiger n’est aujourd’hui possible que pour les affaires les moins graves. Est-on sûr, dans ces conditions, que la nouvelle convention judiciaire créée à l’article 8 permettra de régler beaucoup de nouveaux cas ? Avons-nous une estimation du nombre d’affaires qui pourraient être réglées par le biais de la CJIP environnementale ? Par ailleurs, certains de mes collègues l’ont rappelé, comment peut-on être certain que la CJIP environnementale ne deviendra pas un moyen, pour certaines entreprises, d’éviter un procès et une condamnation public...