Interventions sur "algérie"

11 interventions trouvées.

Photo de Valérie BoyerValérie Boyer, rapporteure :

La proposition de loi déposée par Temal et plusieurs de ses collègues du groupe Socialiste Écologiste et Républicain a deux objectifs qui se traduisent dans ses deux articles. Le premier tend à reconnaître la responsabilité de la France dans la répression de la manifestation pacifique d'Algériens réclamant l'indépendance de leur pays à Paris le 17 octobre 1961 et les jours suivants. Le second article prévoit une commémoration annuelle en hommage aux victimes de cette répression. Je ne reviendrai pas sur les faits et sur le déroulement de la journée du 17 octobre 1961 et des jours suivants. Je rappelle simplement que le texte qui nous est soumis à une vocation symbolique et mémorielle e...

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Je vous ai écoutée avec attention. Selon vous, si l'on décidait de commémorer le 17 octobre, il faudrait commémorer aussi bien d'autres événements. Pendant longtemps on a préféré parler des « événements » d'Algérie. La « guerre » n'a été reconnue que tardivement. Bien des atrocités ont eu lieu, de part et d'autre, c'est vrai. Toutefois, les faits qui se sont passés le 17 octobre 1961 sont particulièrement marquants : des corps ont été jetés dans la Seine ! Si on repousse à chaque fois ce genre de tentatives destinées à prendre en compte les souffrances, on ne fera rien et on ne parviendra pas à construire u...

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

En écoutant notre rapporteure, j'ai eu l'impression, par moments, qu'elle réécrivait l'histoire. Le couvre-feu était dû à la guerre d'Algérie ; des manifestations avaient lieu à Paris. On ne peut dissocier les deux. Les habitants de l'Algérie, dites-vous, étaient Français, c'est vrai, mais le décret Crémieux de 1870 ne visait pas les Arabes musulmans - c'est d'ailleurs toujours un point de friction entre juifs et musulmans en France. Il est difficile d'affirmer aussi que Maurice Papon était seul responsable de la répression : il n'a pa...

Photo de Guy BenarrocheGuy Benarroche :

Le dossier est complexe et sensible. Le conflit en Algérie était une véritable guerre, qui a laissé des cicatrices profondes. Je salue cette proposition de loi visant à créer un jour de commémoration officiel pour rendre hommage aux victimes d'une répression organisée. Le Président de la République l'a reconnu, en qualifiant les crimes commis cette nuit-là « sous l'autorité » de Maurice Papon, et non « par » Maurice Papon - j'insiste - d'« inexcusables p...

Photo de Jacqueline Eustache-BrinioJacqueline Eustache-Brinio :

Merci à notre rapporteure d'avoir rappelé le contexte historique. Je suivrai son avis. Nous avons tous une volonté d'apaisement s'agissant de la guerre d'Algérie. Je ne suis pas sûr que ce genre de texte, qui nous installe dans une repentance permanente, y contribue. Il ne faut pas confondre le travail des historiens et celui du législateur. Il appartient aux historiens de rappeler ce que la France a fait de mal et de bien. Des atrocités ont été commises, il faut le reconnaître. Mais des Français vivant en Algérie ont aussi été meurtris, et on n'en parle ...

Photo de Patrick KannerPatrick Kanner :

Notre rapporteure préférerait que l'on parle de manifestants de nationalité française, plutôt que de manifestants algériens. Or, c'est lors d'un comité interministériel du 5 octobre 1961 que le préfet de police a décidé de mettre en place un couvre-feu « pour tous les travailleurs musulmans algériens » entre 20 h 30 et 5 h 50. Ceux qui se rendaient à leur travail pendant le couvre-feu devaient fournir un formulaire de leur employeur visé par le service d'assistance technique aux Français musulmans d'Algérie. Cette o...

Photo de Brigitte LherbierBrigitte Lherbier :

L'« apaisement » est un mot qui est revenu souvent. J'ai eu, parmi mes élèves, beaucoup d'étudiants d'origine algérienne. Ils veulent savoir ce qui s'est passé et se tournent vers les historiens. En revanche, dans les banlieues, les jeunes ne sont pas animés par un désir de recherche historique : ils sont en recherche d'identité ; tout est prétexte pour trouver, dans l'histoire, un exutoire à leur mal-être et des justifications à la violence. C'est compréhensible, car ces jeunes sont tiraillés entre deux culture...

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

...l y a une forme de partialité à vouloir faire reconnaître la responsabilité de la France, et non simplement du préfet de police, voire de sa hiérarchie, pour des événements qui s'inscrivent dans un conflit qui a connu tant d'autres atrocités. Est-il justifié de reconnaître unilatéralement, comme les bourgeois de Calais, notre responsabilité, sans attendre de réciprocité de la part du gouvernement algérien, qui est l'héritier d'un mouvement qui a aussi commis des actes de barbarie ? Peut-être les Algériens considèrent-ils qu'ils avaient le droit pour eux, mais des atrocités ont bien eu lieu. Si je trouve ignoble la répression du 17 octobre 1961, je trouve excessif de reprendre les termes utilisés par Jacques Chirac en 1995 pour reconnaître la responsabilité de la France dans la rafle du Vél' d'Hiv...

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Je remercie notre rapporteure d'avoir fait référence à la proposition de résolution que nous avions déposée en 2012 et qui avait été, d'ailleurs, adoptée. Toutefois, je ne peux partager ses conclusions. Certains propos tenus à l'instant m'ont heurtée. Je ne peux accepter d'entendre que les jeunes d'origine algérienne seraient des abrutis qui recherchent un prétexte à la violence. Ce qu'ils veulent, c'est connaître la vérité. Il conviendrait de verser aux archives nationales les archives de la préfecture de police. Voilà qui constituerait un acte d'apaisement !

Photo de Éric KerroucheÉric Kerrouche :

...r. Ce n'est pas parce que l'on désigne les choses avec le même mot qu'elles deviennent identiques. La gravité d'un acte ne saurait en excuser un autre. Vous évoquez la réciprocité. Mais ce n'est pas la question de ce texte ! Faire un devoir de mémoire, reconnaître la responsabilité de la France dans la répression du 17 octobre 1961, ce n'est pas se mettre en situation de faiblesse par rapport à l'Algérie. C'est simplement reconnaître la responsabilité de la France à l'égard des victimes. J'ai été heurté par les propos de Brigitte Lherbier. Évitons d'essentialiser les sujets, en accréditant l'idée que les populations immigrées d'origine algérienne seraient incapables de s'intégrer, qu'il s'agit de populations à problèmes...

Photo de Valérie BoyerValérie Boyer, rapporteure :

...et, qui était un homme de gauche. Il ne me semble donc pas que je puisse être suspectée pour cette référence. Toutefois, ce n'est pas par la loi que nous pourrons apaiser cette question. Le travail mémoriel est important, mais à mon sens il ne sera pas facilité par ce texte. Monsieur Kanner, je rappelle que la notion juridique employée à l'époque était effectivement celle de Français musulman d'Algérie. On employait alors le terme d'Algérien comme celui de Breton, de Provençal ou d'Alsacien. Toutefois, vous avez raison, les personnes issues des trois départements d'Algérie étaient alors considérées comme des citoyens de seconde zone, et ce, quelle que soit leur religion. Je vous rappelle les propos de Gaston Defferre sur les rapatriés. À l'époque, la violence des propos et des actes était extrê...