Interventions sur "restitution"

11 interventions trouvées.

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly, rapporteure de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, ce n'est pas sans une certaine émotion que je m'exprime devant vous en cette fin d'après-midi tant le sujet de cette proposition de loi me tient à cœur. La restitution des restes humains a toujours figuré parmi les grands combats de mon mandat de sénatrice depuis l'affaire des têtes maories conservées au muséum de Rouen, laquelle m'avait conduite à déposer en 2008 une proposition de loi pour en permettre la restitution. Il s'est toujours agi à mes yeux d'une question de dignité de la personne humaine, de justice, de respect des cultures et de mémoire.

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly, rapporteure :

Comme tous les biens appartenant aux collections publiques, les restes humains sont inaliénables. Ils ne peuvent pas être restitués sans avoir été préalablement sortis des collections, ce qui implique l'autorisation du législateur. D'où le nombre très faible de demandes de restitution auxquelles la France a accédé jusqu'ici : cinq en tout, et encore seulement deux ont été réalisées par voie parlementaire, qui est pourtant la seule juridiquement licite. Souvenons-nous de la restitution en 2020 des crânes algériens par le biais d'une convention de dépôt ! C'est la raison pour laquelle la commission de la culture plaide, depuis déjà plusieurs années, pour l'adoption d'une déroga...

Photo de Jean-Pierre DecoolJean-Pierre Decool :

...e passé de manière suspecte, voire illégitime, nos collections publiques. Parfois collectés en tant que trophées de guerre ou de conquête, ils témoignent d'un temps révolu et de pratiques anciennes qu'il ne nous appartient pas de juger. Notre rôle, en revanche, est de réparer par la loi les éventuelles injustices. Nous nous sommes récemment félicités de l'adoption du projet de loi facilitant les restitutions des biens spoliés aux familles juives pendant la Seconde Guerre mondiale. Son examen a été l'occasion d'échanges et de témoignages d'une grande émotion en ces murs. De la même manière, notre groupe se félicite de l'adoption à l'unanimité de ce texte en commission, la semaine dernière. Il s'agit d'une loi de dignité, essentielle, qui nécessitait un espace parlementaire dédié. En effet, les reste...

Photo de Thomas DossusThomas Dossus :

...llement le retour de sa dépouille. Ce n'est qu'en 2002 que la France a enfin accédé à sa demande et que Saartjie Baartman a pu enfin être inhumée dignement sur la terre de ses ancêtres, 200 ans après y avoir été arrachée. Cette affaire terrible a fait bouger les lignes et le regard que nous portons sur notre histoire. Désormais, nous connaissons un vaste mouvement, compréhensible, de demandes de restitutions de biens culturels liés à ce passé, un mouvement comme je l'ai dit compréhensible, mais qui comporte des risques d'inflation législative non désirée. En effet, chaque sortie de ces collections doit être prévue au travers d'une loi. Nous partageons donc le besoin d'un cadre clair et transparent pour les restitutions. Ce texte constitue en la matière une étape salutaire, le respect de la dignité ...

Photo de Julien BargetonJulien Bargeton :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, madame la rapporteure, cette proposition de loi que nous adopterons aujourd'hui est très solennelle et émouvante. Elle prend place dans un contexte particulier, celui des lois relatives à des restitutions. Le Gouvernement a commencé par présenter une série de textes précis sur un tel sujet. À présent, nous nous engageons dans une phase consacrée à des lois-cadres. La première était la loi-cadre relative à la restitution ou la remise de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites de 1933 à 1945. La deuxième est celle que vous nous présente...

Photo de Lucien StanzioneLucien Stanzione :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le temps est venu de répondre à une réalité dérangeante en reconnaissant l'histoire tragique liée à nos musées et collections publiques. Ainsi, cette proposition de loi représente une avancée significative dans le traitement des demandes de restitution de restes humains en offrant un cadre clair et transparent tout en favorisant le dialogue scientifique et culturel avec les pays demandeurs. Trophées de guerre, vols, pillages et profanations de sépulture : certaines pièces de nos musées ont été collectées dans des circonstances inacceptables et incompatibles avec le principe de respect dû à la dignité de chaque individu. Tel un écho du passé, c...

Photo de Pierre OuzouliasPierre Ouzoulias :

...ait en quelque sorte son supplice public. Reconnaissons que cette monstration avait quelque chose de monstrueux. Il m'est agréable de souligner que c'est au Sénat, en la personne de notre collègue Catherine Morin-Desailly, que s'imposa l'idée que nous ne pouvions plus traiter les restes humains du passé avec l'indignité que nous refusons désormais aux morts du présent. Son action en faveur de la restitution des têtes maories a été exemplaire et décisive. Une méthode a été alors mise en œuvre et elle inspire aujourd'hui la présente proposition de loi. Permettez-moi de résumer les trois principes sur lesquels elle repose : la demande doit être instruite d'État à État ; elle doit être fondée sur un travail scientifique transparent et collégial ; et les vestiges restitués sont destinés à recevoir un tr...

Photo de Pierre-Antoine LeviPierre-Antoine Levi :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, lorsqu'on explique à l'extérieur ce que l'on fait dans cet hémicycle, il est des sujets qui interpellent plus que d'autres. Je ne sais, mes chers collègues, si vous avez fait l'expérience d'expliquer que vous alliez légiférer sur la restitution de restes humains… Auprès d'un auditoire profane, le succès, je peux vous l'assurer, est garanti.

Photo de Pierre-Antoine LeviPierre-Antoine Levi :

...euples. C'est le cas par exemple, en ce moment, pour l'Australie concernant des restes humains aborigènes. Cette réalité géopolitique vient à son tour soulever un problème et un enjeu juridique. En effet, les restes humains conservés dans les collections publiques sont protégés par le principe d'inaliénabilité du domaine public. C'est exactement la même problématique que pour ce qui concerne la restitution des biens juifs spoliés sous le nazisme, sujet sur lequel nous avons légiféré voilà peu de temps. Toutefois, la situation des restes humains semble encore plus délicate juridiquement, dans la mesure où la procédure de déclassement n'est pas appropriée pour les faire sortir du domaine public aux fins de restitution. Car l'article R. 115-1 du code du patrimoine interdit le déclassement du domaine...

Photo de Bernard FialaireBernard Fialaire :

...es humains doivent être traités avec respect, dignité et décence ». Le code du patrimoine les considère comme des biens publics inaliénables et imprescriptibles. Les principes d'inaliénabilité et d'intérêt public compliquent ainsi la procédure de déclassement. À ce jour, seule l'intervention du législateur permet de sortir de l'impasse. Ces dispositions restrictives font obstacle aux demandes de restitution, alors même qu'un large consensus se dégage autour de la nécessité de les rendre possibles. En 2022, le Sénat a pourtant adopté l'article 2 d'une proposition de loi définissant un cadre général de sortie. Nous pouvons regretter, madame la ministre, qu'elle soit encore dans les tiroirs du Gouvernement et de l'Assemblée nationale. Le Sénat n'a pas été le seul à évoluer sur ce sujet. Dès 1986, le ...

Photo de Max BrissonMax Brisson :

Madame la présidente, madame la ministre, madame l'ambassadrice, mes chers collègues, la proposition de loi que j'ai eu l'honneur de rédiger avec Catherine Morin-Desailly et Pierre Ouzoulias a été adoptée à l'unanimité par notre commission ; elle marque l'aboutissement des travaux conduits par le Sénat sur la question particulière des restes humains. Au-delà, et sur l'ensemble du sujet des restitutions, comme l'a souligné Catherine Morin-Desailly, qui porte depuis longtemps, avec constance et expertise, cette question au Sénat, notre pays a besoin d'affirmer une position claire et de se doter d'un cadre partagé pour répondre aux demandes de restitution en toute transparence. Car le sujet est complexe et sensible. La sortie de ces biens met en jeu le principe d'inaliénabilité de nos collection...