Intervention de Jacques Legendre

Réunion du 27 juillet 2012 à 9h30
Loi de finances rectificative pour 2012 — Article 24

Photo de Jacques LegendreJacques Legendre :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, certains sujets sont susceptibles, je le crois, de nous rassembler. Parmi ceux-ci figure la politique du livre : la défense du livre et de l'existence, sur l'ensemble du territoire national, d'un réseau de librairies capable de jouer les médiateurs entre un public qui aime lire et les auteurs qu'il s'agit de promouvoir. Ce réseau va des auteurs aux lecteurs, en passant par les libraires.

Dans le passé, cette politique a été soutenue par de grandes figures de nos différentes formations. Sur la proposition de M. Jack Lang, nous avons soutenu le prix unique du livre. L'an dernier encore, le Sénat a soutenu aussi le prix unique du livre numérique, et nous pouvons tous être fiers de ce beau combat. Un consensus s'est manifesté également quand, dans le passé, nous avons tenu à ce que le livre bénéficie d'un taux minoré de TVA.

L'an dernier, nous avons eu un débat quand il a semblé utile de faire passer ce taux minoré de 5, 5 % à 7 % pour toute une série de produits, dont le livre. À l'époque, la commission de la culture, à l'unanimité, avait souligné les difficultés liées à ce relèvement du taux de TVA, parce que les libraires risquaient, sur ce point, d'être victimes de la bonne idée que nous avions soutenue auparavant, à savoir le prix unique du livre. En effet, le prix du livre est fixé non par le libraire, mais par l'éditeur. Le relèvement du taux de TVA risquait donc d'être supporté non pas par l'éditeur, mais par le libraire, en fin de course, à un moment où les libraires connaissaient une situation relativement difficile, parce qu'ils doivent faire face à la concurrence de nouveaux modes de distribution du livre – on le voit bien avec l'action d'une grande société venue de l'extérieur, Amazon – et parce qu'ils doivent également s'adapter à la concurrence, ou à la complémentarité, du livre numérique. Voilà pourquoi, mes chers collègues, il me semble intéressant d'ouvrir un débat sur l'abaissement de 7 % à 5, 5 % du taux de TVA sur le livre numérique. En ce qui nous concerne, nous ne saurions être choqués par cette proposition.

En revanche, il nous paraît plus grave de penser que l'on aurait réglé le problème du livre en baissant le taux de TVA. Les représentants des libraires auditionnés par la commission de la culture, mercredi dernier, nous ont rappelé que le retour au taux réduit de TVA de 5, 5 % impliquerait de modifier une nouvelle fois un million de prix dans les bases de données interprofessionnelles, ce qui représente un coût, qu'un risque de bug informatique existait, que leur fragilité économique était inquiétante et que leur avenir ne dépendait donc pas uniquement du taux de la TVA. La ministre de la culture elle-même estime que la librairie indépendante, pour se maintenir, devrait atteindre un taux de rentabilité de 2 % en fin d'année. Or, d'après une étude récente réalisée par Xerfi, ce taux avoisinait 0, 3 % en 2009 et il s'est encore dégradé depuis. Nous devons donc être particulièrement vigilants !

Les libraires indépendants ont présenté une proposition très constructive : ils suggèrent de maintenir le taux de TVA à 7 % jusqu'au 1er janvier 2013, parce que cette mesure permettrait de dégager près de 50 millions d'euros, au lieu de 30 millions d'euros si la baisse du taux était appliquée dès la fin de l'été. Ce surplus de recettes de 20 millions d'euros pourrait alimenter un fonds de soutien à la librairie indépendante qui délivrerait des prêts de trésorerie et des aides à l'exploitation. Ce fonds contribuerait à préserver la diversité culturelle ainsi que la présence et l'emploi culturels sur nos territoires.

Monsieur le ministre, nous ne comprenons pas que le Gouvernement n'accède pas à cette proposition qui semble constructive. Nous sommes prêts – au moins ceux d'entre nous qui sont membres de la commission de la culture – à voter cet abaissement du taux de TVA à 5, 5 % si le Gouvernement donne une suite favorable à cette proposition des libraires. Sinon, il nous faudra reconnaître que nous avons laissé passer une occasion d'aider efficacement les libraires qui en ont actuellement bien besoin !

J'espère donc que la cause de la lecture et du livre pourra nous rassembler, même en cet été un peu chaud !

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