Intervention de Isabelle Debré

Réunion du 27 juillet 2012 à 9h30
Loi de finances rectificative pour 2012 — Article 27

Photo de Isabelle DebréIsabelle Debré :

En voulant augmenter le forfait social qui pèse sur les entreprises pour les sommes qu'elles versent à leurs salariés au titre de la participation et de l'intéressement, la majorité de gauche commet une double faute.

C'est tout d'abord, une faute politique, car, mes chers collègues, vous allez pénaliser tous les salariés, notamment les plus modestes, ceux pour qui les sommes versées au titre de la participation et de l'intéressement constituent souvent leur seule capacité d'épargne.

Et cette épargne, vous ne pouvez l'ignorer, est utilisée fréquemment – pour ne pas dire principalement – comme apport personnel pour l'acquisition de leur première résidence.

Vous semblez également négliger le fait que la participation et l'intéressement permettent aux salariés de préparer leur retraite au moyen des plans d'épargne pour la retraite collectifs, les PERCO, et que les sommes déposées par les salariés sur ces plans d'épargne bénéficient souvent d'un abondement des entreprises.

Avec l'augmentation du forfait social, vous prenez la lourde responsabilité de mettre à mal l'épargne des salariés de nos entreprises, leur capacité à construire des projets et à se projeter dans l'avenir.

Contrairement à ce que vous n'avez eu de cesse d'affirmer au cours de la campagne électorale, avec cette mesure, vous vous attaquez bien aux classes moyennes, à tous les salariés, quel que soit leur salaire.

Vous commettez aussi une deuxième faute, celle-là économique.

Vous avez toujours considéré – à tort – la participation et l'intéressement comme un substitut de salaire. Il n'en est rien puisqu'il n'y a distribution d'un intéressement et d'une participation que lorsque la situation économique des entreprises le permet ou que les objectifs contenus dans les plans d'intéressement sont atteints.

Ces deux dispositifs sont par nature aléatoires et ne sauraient être assimilés au salaire, par nature pérenne, des collaborateurs de l'entreprise.

La participation et l'intéressement correspondent à un complément de rémunération qui récompense les efforts de tous les salariés dans l'entreprise. Quand des profits sont réalisés, ils sont redistribués, ce qui est une bonne chose, redistribution qui s'opère parfois selon la règle des trois tiers chère à notre collègue Serge Dassault : un tiers pour les salariés, un tiers pour les actionnaires, un tiers réinvesti dans l'entreprise.

En augmentant le forfait social, vous ignorez toutes les études – notamment celles du sociologue Patrick Guiol, qui figure au nombre des penseurs de la gauche – démontrant que la participation et l'intéressement agissent comme un puissant facteur de cohésion et sont une source de motivation collective dans les entreprises.

Enfin, cette épargne collectée est affectée le plus souvent au financement des entreprises en capital. Or une des faiblesses des entreprises françaises, notamment celles de taille moyenne, est leur sous-capitalisation.

En condamnant cette épargne, vous contribuer à affaiblir la compétitivité de nos entreprises. Par méconnaissance des réalités économiques et sociales, et peut-être par démagogie, vous vous attaquez à l'un des éléments les plus emblématiques de la politique de rassemblement que prônait le général de Gaulle. Vous cassez des dispositifs qui ont fait leur preuve. Vous pourrez malheureusement mesurer dans les mois à venir les dégâts de la politique régressive que vous menez.

Vous comprendrez donc aisément qu'il me soit totalement impossible de voter cet article. §

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