Intervention de Christiane Demontès

Réunion du 31 juillet 2012 à 14h30
Harcèlement sexuel — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Christiane DemontèsChristiane Demontès :

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre des droits des femmes, monsieur le président-rapporteur, madame la présidente de la délégation aux droits des femmes, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme de l'examen du projet de loi relatif au harcèlement sexuel.

Je rappelle que le Gouvernement avait demandé l'examen de ce texte en procédure accélérée, une demande parfaitement justifiée puisque, à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel avait répondu, le 4 mai 2012, en prononçant l'abrogation immédiate de l'article 222-33 du code pénal, qui définit le délit de harcèlement sexuel. Le texte avait été jugé insuffisamment précis quant aux éléments constitutifs de l'infraction.

Les sénateurs et sénatrices de toutes les sensibilités se sont mobilisés : sept propositions de loi ont été déposées au Sénat et une commission spéciale a été constituée, qui a procédé à de nombreuses auditions. Mesdames les ministres, je crois pouvoir dire que vous avez pu vous appuyer sur ces travaux pour élaborer votre projet de loi.

Le présent texte répond à un double objectif : d'une part, combler le vide juridique créé par la décision du Conseil constitutionnel ; d'autre part, donner la définition la plus précise possible du harcèlement sexuel, en la rapprochant de la directive européenne.

L'examen par le Sénat a permis d'apporter plusieurs modifications. Je pense notamment à l'alourdissement des peines et des amendes, mais aussi à la création d'une nouvelle circonstance aggravante : le fait de profiter de la particulière vulnérabilité ou dépendance de la victime résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale. Je veux ici vous remercier, mesdames les ministres, d'avoir, lors de la lecture du projet de loi au Sénat, permis que cette circonstance aggravante soit inscrite dans le texte, ce qui est une première. Je reprends à mon compte le point de vue de notre collègue Jean-Jacques Hyest, et je pense tout comme lui que cette circonstance aggravante pourra par la suite opportunément être étendue à d'autres délits.

Le Sénat a également ajouté le critère de l'identité sexuelle à la liste des discriminations énoncées à l'article 225-1 du code pénal. L'article 2 ter permet aux associations de lutte contre le harcèlement sexuel d'exercer les droits reconnus à la partie civile, conformément au souhait de ces associations, qui est ici pris en compte.

Des coordinations et mises en cohérence ont, bien entendu, été introduites dans le code du travail et dans le code du travail applicable à Mayotte, ainsi que dans le statut de la fonction publique. Peut-être conviendra-t-il d'ailleurs ultérieurement de modifier plus largement le statut de la fonction publique, car les fonctionnaires ont des droits et des obligations comme les autres salariés.

L'Assemblée nationale a elle-même apporté des modifications au texte, en particulier en supprimant, à l'article 1er, la mention des « ordres, menaces ou contraintes », pour conserver la seule référence à « toute forme de pression grave », afin d'éviter, comme l'a souligné Jean-Jacques Hyest, toute déqualification de l'agression sexuelle.

Nos collègues députés ont aligné la sanction prévue pour le harcèlement moral sur celle qui est introduite pour le harcèlement sexuel.

Ils ont souhaité maintenir la définition in extenso du harcèlement sexuel et du harcèlement moral dans le code du travail, plutôt que de procéder à un renvoi au code pénal. On ne va pas refaire le débat ; la question de la méthode peut effectivement se poser, mais la solution retenue ne me semble pas devoir poser de problèmes.

Les députés ont également adopté un amendement rendant obligatoire l'affichage dans les entreprises du texte des articles 222-33 et 222-33-2 du code pénal.

Enfin, ils ont introduit un article 7, qui a d'ailleurs été réécrit par les rapporteurs en CMP, et qui prévoit que le tribunal correctionnel ou la cour d'appel peuvent accorder, à la demande de la partie civile, réparation du préjudice subi par les victimes de harcèlement sexuel lorsque l'action publique est éteinte en raison de la décision du Conseil constitutionnel du 4 mai 2012.

Nous allons donc approuver les conclusions de la commission mixte paritaire, et ce, comme cela a été fait à l'Assemblée nationale et lors de la CMP, par un vote unanime de toutes les composantes politiques de notre assemblée.

Mes chers collègues, nous avons atteint notre objectif : voter une loi suffisamment claire, qui servira à protéger les victimes et à décourager les harceleurs.

La campagne d'information que vous allez lancer, madame la ministre des droits des femmes, et la circulaire ministérielle que vous allez adresser au parquet, madame la garde des sceaux, constituent bien évidemment des éléments forts : il faut que cette loi soit connue et que les tribunaux l'appliquent.

(Protestations sur les travées de l'UMP.) Aujourd'hui, nous sommes pleinement satisfaits de voter cette loi utile.

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