Intervention de Jean-Marie Pelt

Mission d'information sur les pesticides — Réunion du 12 juin 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Jean-Marie Pelt professeur émérite des universités en biologie végétale président de l'institut européen d'ecologie iee

Jean-Marie Pelt :

En effet. Je vous citerai deux exemples pour illustrer mon propos sur les effets des pesticides sur le système immunitaire. Comme vous le savez, la mer d'Aral s'est asséchée en raison du trop grand nombre de plantations de coton alentour, qui exigeaient une irrigation importante et l'usage massif de pesticides. Une étude sur l'état immunitaire des Ouzbeks ayant travaillé dans les champs de coton montre qu'ils sont tout le temps malades.

De la même façon, les enfants inuits attrapent des otites et des rhumes à répétition parce que les molécules contenues dans les pesticides sont plus abondantes qu'ailleurs dans l'air des pôles en raison des jets streams. Une statistique canadienne montre que les petits Inuits attrapent douze fois plus d'otites que les petits Québécois.

Pour ma part, je ne suis pas un spécialiste des pesticides. Je suis un écologiste généraliste. Je me suis toutefois penché sur la question pendant deux mois pour écrire un livre. Je suis sorti assez pessimiste de ce travail. Par ailleurs, j'ai participé au Grenelle dans les groupes OGM et biodiversité. J'ai donc vu naître le plan Ecophyto mis en place par le groupe santé et environnement. Aujourd'hui, je trouve que la situation ne progresse pas.

Pour la rédaction de mon livre, je me suis inspiré de l'un des principes centraux de l'Institut européen d'écologie, à savoir de ne jamais dénoncer un problème sans proposer de solutions. En tant que biologiste de la santé, j'ai le sentiment que l'évaluation des produits est aujourd'hui impossible pour deux raisons.

D'une part, un recul de trente ans serait nécessaire pour mettre en évidence en laboratoire les effets cancérogènes d'un produit. De tels tests sont donc exclus. D'autre part, les chercheurs sont aujourd'hui devenus très prudents sur ce que l'on appelle les effets cocktail. Nous savons désormais que les mélanges de produits entraînent des phénomènes pathogènes différents de ceux engendrés par les produits isolés.

Une étude a montré que trois pesticides testés séparément sur des mulots pouvaient n'avoir aucun effet notoire sur leur progéniture tandis que leur mélange à dose égale engendrait des hypospadias chez 60 % des nouveau-nés. La réalité de l'effet cocktail est donc démontrée. De même, les plantes médicinales doivent être associées pour avoir un effet sur la santé. Dans ces conditions, il est impossible de tester toutes les combinaisons entre les 150 000 molécules existantes.

La solution consisterait donc à s'orienter vers des produits alternatifs baptisés préparations naturelles peu préoccupantes (PNPP). Par exemple, j'ai été alerté par des oenologues de Bordeaux dont le vin avait été interdit aux États-Unis en raison de la présence de pesticides dans les bouteilles. Ils m'ont demandé d'animer une journée de travail réunissant des scientifiques et des vignerons afin d'évoquer les alternatives possibles. Une jeune femme, originaire de Lausanne, nous a rapporté avoir testé différentes tisanes et constaté que la tisane de rhubarbe donnait de bons résultats. Je lui ai demandé si elle avait essayé les tisanes d'aloès, de cascara ou du Bourdel. Elle m'a regardé, stupéfaite. Pourtant, toutes ces plantes contiennent des anthraquinones, dont je savais qu'ils étaient très fortement antifongiques de par mes travaux menés en Afrique noire.

Là-bas, lorsque l'on attrape des dartres en raison de la transpiration causée par le climat équatorial, on ramasse des feuilles de cassia, arbuste aussi fréquent que notre noisetier, on les frotte sur la dartre, et celle-ci disparaît. Dans mon laboratoire, j'ai rapporté quelques-unes de ces feuilles pour les appliquer sur des cultures de champignons. J'ai pu constater leur admirable efficacité. Les feuilles de cassia constituent donc une alternative aux pesticides pour le mildiou.

De telles alternatives sont très nombreuses mais les grands groupes de pression agroalimentaires et agrochimiques qui leur font face n'ont pas l'intention d'abandonner leurs vieilles méthodes. C'est à ce niveau que les choses doivent bouger. Et il me semble qu'elles bougent. Je suis de plus en plus souvent invité à m'exprimer sur les pesticides dans des lycées agricoles. Je constate donc une évolution importante. Aujourd'hui, au niveau de l'enseignement de l'agronomie et de l'agriculture, des pistes nouvelles sont explorées.

J'ai par ailleurs dédié mon livre à l'INRA, dont les chercheurs travaillent beaucoup sur la stimulation des défenses naturelles. Cette piste très importante s'inscrit dans une stratégie nouvelle. Actuellement, la médecine utilise les « anti- », et l'agronomie les « -cides ». Dans les deux cas, les produits administrés cherchent à tuer. Désormais, nous nous dirigeons vers des stratégies jouant avec la nature au lieu de jouer contre elle.

De nombreux exemples figurent dans mon livre. Il est capital d'appuyer ces nouvelles stratégies, aussi bien dans le domaine de la recherche qu'au niveau des grandes orientations, afin que nos jeunes comprennent qu'il est possible de cultiver la terre sans pesticides. Trop souvent, comme pour l'énergie nucléaire, on entend la phrase : « On ne peut pas faire sans ». Il est vrai qu'on ne peut pas « faire sans » tout de suite, mais dans le temps, tout est possible. Encore faut-il savoir où l'on souhaite aller. Les objectifs clairs d'un plan comme Ecophyto permettent de donner une direction et de développer certaines pistes très prometteuses.

Je terminerai par la plus prometteuse de toutes, mais également la plus étrange et la plus ignorée. Je n'ai rencontré dans ma vie qu'un seul génie. Docteur en biologie moléculaire et en physique quantique et brillant mathématicien, il a remarqué que la biologie, science des gènes, de la chimie et des protéines, ne prenait pas du tout en compte les vibrations des protéines. En effet, la matière est à la fois corpusculaire et vibratoire. Par le calcul, il réussit aujourd'hui à déterminer la vibration correspondant à une protéine spécifique.

Il a travaillé, sur la protéine défendant la vigne contre le mildiou. Sa stimulation par vibration la rend beaucoup plus efficace. Il fait donc entendre une musique de trois minutes à des vignes et rencontre un grand succès.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion