Intervention de Xavier Pintat

Réunion du 15 octobre 2009 à 9h30
Accord de coopération avec l'inde pour le développement des utilisations pacifiques de l'énergie nucléaire — Adoption d'un projet de loi

Photo de Xavier PintatXavier Pintat, rapporteur de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’Inde est appelée à devenir l’un des grands acteurs de la vie internationale, au sein de laquelle elle joue un rôle positif et constructif.

La France entend renforcer, à juste titre, le partenariat stratégique qu’elle a noué voilà plus de dix ans avec ce pays, dont elle appuie notamment l’accession à un siège permanent au Conseil de sécurité des Nations unies.

Notre pays dispose de compétences industrielles et technologiques correspondant aux principales attentes de l’Inde dans des domaines clés pour son développement économique.

Confrontée à d’immenses besoins énergétiques, l’Inde doit impérativement développer sa production d’électricité. Le recours à l’énergie nucléaire figure parmi les axes qu’elle a retenus, car il répond au double objectif de limiter sa dépendance énergétique et de ne pas alimenter le réchauffement climatique.

L’expertise acquise par la France dans ce domaine la rend particulièrement bien placée pour répondre aux attentes de l’Inde, en accord avec l’action qu’elle mène en faveur du développement responsable des usages pacifiques de l’énergie nucléaire.

Toutefois, l’accès de l’Inde aux coopérations internationales dans le domaine nucléaire civil, que ce soit avec la France ou avec d’autres pays fournisseurs, ne pouvait se concevoir que dans un cadre compatible avec le régime international de non-prolifération nucléaire.

C’est à la lumière de cette exigence que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné l’accord qui est aujourd’hui soumis à l’approbation du Sénat.

La commission a tout d’abord constaté que les conditions d’une ouverture de la coopération internationale à l’Inde dans le domaine nucléaire ont fait l’objet, dans les instances internationales compétentes, de négociations approfondies durant trois années.

L’Inde était restée jusqu’à présent non seulement en dehors du traité sur la non-prolifération, mais également hors de toutes les règles internationales relatives à la non-prolifération nucléaire.

Sous l’effet des discussions engagées avec les États-Unis, comme avec la France, sa position a notablement évolué.

L’Inde a adopté un plan de séparation de ses activités nucléaires civiles qui a été approuvé par son Parlement, puis officiellement transmis à l’Agence internationale de l’énergie atomique à l’été 2008.

Au terme de ce plan, les deux tiers des capacités nucléaires indiennes actuelles seront placées sous les garanties de l’AIEA, et il en ira de même pour tous les futurs réacteurs civils à construire.

Cette décision, consacrée par un nouvel accord de garanties et par un protocole additionnel qui donne à l’AIEA les pouvoirs d’inspection et de contrôle les plus étendus sur les installations et activités civiles soumises aux garanties, représente incontestablement une avancée.

Elle s’accompagne d’autres engagements importants vis-à-vis de la communauté internationale, d’une part, de ne pas transférer de technologies d’enrichissement et de retraitement aux États qui ne les possèdent pas et d’établir un système national de contrôle des exportations sur la base des listes de contrôle des exportations et directives du Groupe des fournisseurs nucléaires ; d’autre part, de maintenir son moratoire unilatéral sur les essais nucléaires et de collaborer à la conclusion d’un traité multilatéral d’interdiction de la production de matières fissiles pour les armes nucléaires.

La commission a également relevé que cette démarche avait recueilli l’aval du conseil des gouverneurs de l’AIEA et que la levée des restrictions à l’exportation avait été adoptée par consensus par les quarante-cinq États du Groupe des fournisseurs nucléaires, qui compte non seulement les pays de l’Organisation de coopération et de développement économique, l’OCDE, mais également la Russie, la Chine, l’Afrique du Sud, l’Argentine ou le Brésil.

Enfin, la commission tient à souligner la singularité de la situation indienne liée à ses besoins énergétiques et aux enjeux environnementaux qui en découlent, mais aussi à des faits objectifs attestant que l’Inde n’a jamais été à l’origine de flux de prolifération en matière nucléaire et qu’elle a fait l’objet d’un comportement responsable en ce domaine.

Nous avons considéré que les engagements pris par l’Inde constituaient autant de pas en direction d’un régime international de prolifération dont aucune discipline ne lui était jusqu’alors applicable.

L’accord de coopération du 30 septembre 2008 pour le développement des utilisations pacifiques de l’énergie nucléaire est l’aboutissement de plusieurs années de discussions dans le cadre du partenariat franco-indien, mais il se conforme très strictement aux principes qui ont été arrêtés par les instances internationales au vu des engagements pris par l’Inde.

Il s’agit d’un accord-cadre, dont la mise en œuvre pourra s’effectuer au travers d’accords spécifiques.

Il prévoit cependant clairement, conformément à la décision du Groupe des fournisseurs nucléaires, que les exportations de biens et de technologies nucléaires vers l’Inde ne pourront s’effectuer que vers des installations soumises aux garanties de l’AIEA. Les matières, équipement et technologies transférés seront ainsi soumis aux garanties de l’AIEA.

En conclusion, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a estimé que cet accord était particulièrement important à plusieurs titres.

Il l’est, tout d’abord, pour les relations politiques franco-indiennes, car il constitue un élément majeur du partenariat stratégique que nous avons décidé de développer avec ce grand pays. Vous avez parfaitement souligné cette importance stratégique, énergétique et environnementale, monsieur le secrétaire d’État, parce que c’est un pays que vous connaissez bien.

Cet accord est également important par ses enjeux économiques, tant pour l’Inde, qui souhaite développer l’énergie nucléaire pour faire face à des besoins énergétiques en forte augmentation, que pour la France, dont les acteurs industriels sont bien placés pour participer au développement des capacités indiennes.

Enfin, cet accord s’inscrit, il faut le rappeler, dans le contexte d’une évolution notable du statut de l’Inde au regard du régime international de non-prolifération nucléaire, au travers d’engagements précis qui lui ouvrent désormais l’accès à la coopération nucléaire civile.

D’autres pays, à commencer par les États-Unis, vont contribuer à ces coopérations. Il nous paraît indispensable que la France puisse également s’y consacrer.

C’est pourquoi, mes chers collègues, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous demande d’adopter le projet de loi autorisant l’approbation de cet accord franco-indien.

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