Monsieur le président, mesdames les ministres, madame la présidente de la commission des affaires sociales, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans le présent débat sur le financement de l’hôpital public, il me revient, en ma qualité de président de la délégation sénatoriale à l’outre-mer, de traiter de la question particulièrement délicate des hôpitaux sur ces territoires.
Comme dans bien des matières, là où la situation est grave en France dite « hexagonale », elle est dramatique dans nos régions éloignées. Je vais principalement illustrer mon propos par l’exemple des hôpitaux de la Martinique, mais ce que je vais évoquer pour le CHU de Fort-de-France est largement transposable à celui de Pointe-à-Pitre et à la majeure partie des hôpitaux outre-mer.
Le dossier de ces hôpitaux est compliqué, voire effrayant par l’ampleur des chantiers. Ainsi, à la fin de 2011, les trois principaux hôpitaux de la Martinique accusent un déficit cumulé de 147 millions d’euros.
Les causes d’une telle situation sont multiples. Certaines relèvent de problèmes d’organisation et de gestion qu’il convient de traiter. Il s’agit en particulier des doublons d’activités, des problèmes de sureffectifs, pas tant dans les soins que dans les secteurs administratifs et techniques, des incertitudes quant à la qualité de gestion, s’agissant notamment du circuit de facturation et de la multiplication des créances irrécouvrables.
Cependant, il serait trop facile de se contenter de cette part de l’explication. Il convient également d’examiner les causes structurelles des grandes difficultés que rencontrent les hôpitaux outre-mer. Et, une fois de plus, on en revient nécessairement à la question de l’éloignement, de l’insularité et de la faible taille des populations de chacun des territoires concernés.
En effet, certaines activités régionales, ou parfois même interrégionales, engendrent presque nécessairement un surcoût.
On peut prendre l’exemple des grands brulés, de la neurochirurgie ou encore de la chirurgie cardiaque. Ces activités ne peuvent pas être rentables au regard d’un bassin de population dont la dimension est trop faible. Pour autant, doit-on renoncer à prodiguer ces soins à nos populations ?
Autre exemple, nous supportons une majoration anormale du tarif des produits sanguins labiles. Ce « sur-tarif » représente un coût de plusieurs millions d’euros chaque année pour nos hôpitaux. Par ailleurs, même entre les outre-mer, on constate sur ce point des écarts inexplicables d’un territoire à l’autre.
C’est alors que se pose la question de la solidarité nationale. De toute évidence, en l’état actuel des choses, certains coûts ne sont pas assez compensés par l’État au titre des crédits d’assurance maladie.
Ainsi, le coefficient géographique qui nous est actuellement appliqué est de 26 %, alors même que l’État sait, pour les avoir parfaitement étudiés, que ces surcoûts, non réductibles, sont supérieurs à 30 %.
Mesdames les ministres, mes chers collègues, il ne s’agit pas pour moi de prétendre que l’organisation est parfaite et que tout n’est que faute de moyens financiers. Il s’agit cependant d’attirer votre attention sur le fait que la réorganisation hospitalière – et plus largement celle de l’offre de soins – est vouée à l’échec si on ne traite pas le problème de fond des surcoûts. Il faut donc un engagement fort de l’État pour accompagner les hôpitaux outre-mer.
En conclusion, je constate la nécessité d’une réorganisation de l’hôpital public afin qu’il soit plus performant, mais la notion de performance ne procède pas exclusivement d’une logique économique. La performance, c’est celle d’un système de soins capable à la fois de bien traiter tous les patients, où qu’ils se trouvent, de mieux prendre en charge les plus vulnérables et de faire progresser la recherche. §