Intervention de Jacques-Bernard Magner

Réunion du 3 octobre 2012 à 14h30
Débat sur les conditions de la réussite à l'école

Photo de Jacques-Bernard MagnerJacques-Bernard Magner :

En effet, la mise en œuvre d’une véritable politique d’égalité des chances dès l’école maternelle implique à la fois une pédagogie différenciée et un rééquilibrage des objectifs de l’école maternelle, qui ne doit plus simplement être dans l’anticipation des enseignements de l’école élémentaire.

On peut aussi se féliciter du retour au prérecrutement, qui permettra de restaurer une filière de promotion sociale.

Les conditions d’entrée dans le métier d’enseignant sont une préoccupation majeure. Elle n’a malheureusement pas été assez prise en compte ces dernières années. En témoigne le dernier rapport de la Cour des comptes, qui dresse un véritable réquisitoire contre la gestion des ressources humaines dans l’éducation nationale, en particulier pour ce qui concerne les enseignants débutants. À cet égard, une plus forte mixité au sein des établissements, entre néotitulaires et enseignants chevronnés, devra être recherchée afin de développer un véritable accompagnement à l’entrée dans le métier. L’identification de maître accompagnateur, qui constituerait une forme de tutorat, pourrait être expérimentée, à l’instar du contrat de génération, dans les établissements réputés difficiles.

L’élève reste avant tout un enfant : enfant de sa famille, de son quartier, de son village… Son environnement est une donnée fondamentale à prendre en compte dans la réussite éducative. Il convient de replacer l’école, l’établissement, dans son environnement, à travers une cohérence des politiques éducatives territoriales, peut-être à l’échelon d’un bassin de vie prenant en compte la nécessaire mixité sociale. Dans cette perspective, l’établissement scolaire est bien l’élément central à appréhender en lien avec les autres structures du champ de « l’éducation globale », qu’elles soient périscolaires, communales ou associatives.

Il est grand temps de retrouver la notion de communauté éducative, pour une école plus ouverte, où l’enfant est considéré dans sa globalité. Les maîtres ont un rôle pivot à jouer dans le dialogue avec les autres partenaires de la communauté éducative : les parents, les élus, les intervenants extérieurs, … Dès leur formation, les enseignants doivent être sensibilisés à cette dimension de leur métier, qu’il faut désormais orienter vers la coéducation plutôt que vers la standardisation des pratiques.

C’est cette communauté éducative qui doit être associée à la révision des rythmes scolaires, avec en vue la création de parcours cohérents et complémentaires d’éducation, car c’est le même enfant qui parcourt les différents espaces et temps éducatifs.

Dans la lutte contre l’échec scolaire, la continuité des parcours éducatifs, du « fil continu », pour les élèves en rupture qu’on appelle les « décrocheurs » sera une question centrale dans la mise en œuvre de chemins différents pour réussir. Actuellement, le manque de deuxième chance représente un fléau pour notre école républicaine et pour la réussite de tous.

Contre le décrochage scolaire, nous avons besoin d’apporter des réponses diverses, construites sur le terrain, avec des allers-retours possibles entre les différentes solutions proposées, et non pas de « plaquer » des réponses toute faites, uniformes pour tout le monde et partout.

Pour chaque école, chaque établissement scolaire, il faut un projet pédagogique coconstruit. Le projet pédagogique d’établissement, en tant que coconstruction d’un projet partagé par une équipe enseignante, devra être le cœur de cette démarche d’éducation globale.

Enfin, redéfinir le métier d’enseignant implique de réfléchir aux modes d’évaluation pertinents des pratiques professionnelles. Il faut passer d’une évaluation individuelle pour classer à une évaluation collective pour progresser.

Poursuivant notre idée de coconstruction du projet pédagogique, nous souhaitons une auto-évaluation collective du fonctionnement de l’établissement qui ne se confondrait pas avec l’inspection individuelle des enseignants.

En conclusion, la refondation de l’école que nous appelons de nos vœux permettra de réhabiliter un service public d’éducation pour tous. L’école devra être au cœur du dialogue avec les collectivités locales, les parents, les associations partenaires de l’école, tout particulièrement celles de l’éducation populaire, dans une démarche de coconstruction. Il s’agira de recréer de vrais liens entre les différentes institutions et partenaires du milieu éducatif, en restaurant la confiance et en redonnant des marges de manœuvre aux enseignants.

Au sein de cette communauté éducative, l’enseignant aura toute sa place, mais ce réel changement des pratiques éducatives nécessitera une redéfinition du métier et, par conséquent, du statut des enseignants. Ce sera le rôle de la concertation que de définir les grandes lignes de ce nouveau cadre référentiel, qui se concrétisera par la loi d’orientation et de programmation que vous nous présenterez, monsieur le ministre.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion