Intervention de Jean Bizet

Réunion du 10 octobre 2012 à 14h30
Nouvelles perspectives européennes — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Jean BizetJean Bizet :

Si la coordination des politiques économiques n’avait pas existé, quelle aurait été la différence ?

Il serait donc souhaitable d’aller plus loin. Nous en avons fait l’expérience, une monnaie unique et des politiques économiques nationales divergentes aboutissent à l’inefficacité. Nous avons besoin d’une coordination plus contraignante.

Pour cela, je le souligne encore une fois à titre personnel, la Commission européenne devrait recevoir des pouvoirs accrus. Une fois des normes et des objectifs de politique économique arrêtés en commun, elle devrait pouvoir suspendre les mesures nationales allant manifestement à l’encontre de ces objectifs et de ces normes ; ensuite, le Conseil se prononcerait.

En quoi s’agirait-il d’une atteinte insupportable aux souverainetés nationales, puisque l’objectif serait tout simplement de faire respecter des orientations arrêtées en commun ? Notre collègue François Zocchetto n’a pas dit autre chose voilà quelques instants. Tant qu’il n’existera pas de mesure de ce type, je crains que la coordination des politiques économiques ne demeure un vœu pieux.

Sur le plan budgétaire, nous avons davantage avancé. Malgré tout, l’union budgétaire, sous sa forme actuelle, reste de nature négative. Elle est là pour empêcher les déficits excessifs et obliger à rendre soutenable la dette publique. Cette discipline commune est nécessaire et même absolument indispensable, mais ne faudrait-il pas la compléter par des mesures plus positives ? Il n’est pas souhaitable que la discipline commune soit uniquement synonyme de rigueur budgétaire : elle doit aussi ouvrir des perspectives positives, traduisant l’intérêt d’agir en commun.

On peut bien sûr rêver d’un budget européen bien plus important. Je ne rappellerai pas les ratios évoqués précédemment par M. Placé, ils traduisent à mon avis un idéal inaccessible.Or, nous le savons, le contexte n’est pas favorable et, de toute manière, l’essentiel des moyens figure dans les budgets nationaux. C’est pourquoi une union budgétaire plus positive devrait, me semble-t-il, prendre la forme d’une coordination plus étroite et plus contraignante des politiques budgétaires.

Alain Lamassoure donnait en ce sens l’exemple du soutien à la recherche. À défaut d’avoir un budget européen suffisant, nous pourrions rendre plus efficaces les soutiens à la recherche, en réalisant une véritable synergie entre le budget européen, d’une part, et les budgets nationaux, d’autre part, de manière à pouvoir véritablement « mettre le paquet » sur certains domaines constituant des priorités européennes. Pour arriver à ce résultat, il faudrait sans doute une intervention plus marquée de la Commission dans les procédures budgétaires nationales. Pour ma part, je n’y verrais pas une hérésie, loin s’en faut.

La réflexion engagée par le président Van Rompuy, à la demande du Conseil européen, sur l’« achèvement de l’Union économique et monétaire » me paraît donc une occasion à saisir pour concrétiser enfin ce « gouvernement économique européen » que nous réclamons depuis si longtemps.

Nous avons fait le choix d’une monnaie unique : comme tout choix, il a ses avantages, mais aussi ses contraintes. Ce choix étant fait, mieux vaut en tirer toutes les conséquences ; sinon, nous perdrons les avantages sans nous affranchir des contraintes. Les pays de la zone euro ne peuvent plus définir isolément leurs politiques économiques et budgétaires. Cela veut dire qu’entre notre engagement européen et nos orientations actuelles, il faudra choisir. Nous ne pourrons pas indéfiniment prôner la coordination et en refuser les conséquences lorsqu’elles nous dérangent. Nous ne pourrons pas rester les seuls à privilégier l’augmentation des impôts sur la réduction des dépenses. Nous ne pourrons pas rester les seuls à refuser les réformes structurelles et à revenir sur celles qui ont été réalisées, quand nos partenaires font exactement le contraire !

En conclusion, je regrette sincèrement, monsieur le ministre délégué, que cette déclaration sur les nouvelles perspectives de la construction européenne ne soit pas suivie d’un vote. Ce vote aurait précisément marqué un temps fort de la politique européenne de votre Gouvernement et de votre majorité, à moins que vous ne craigniez de montrer au grand jour l’ambiguïté et l’incohérence qui vous unissent ! L’Europe méritait décidément beaucoup mieux que cela !

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