Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 10 octobre 2012 à 14h30
Nouvelles perspectives européennes — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Vous auriez pu être compris par vos collègues et vos alliés de gauche sans recourir à de tels faux-semblants.

Je ne voterai pas davantage ce traité parce qu’il a été négocié par Nicolas Sarkozy. Sans doute Jean-Vincent Placé a-t-il eu raison de reconnaître, avec sa candeur politique habituelle, que le traité qui nous est soumis aujourd’hui est bien le traité « Merkozy ».

Je voterai ce traité pour des raisons de fond : je le voterai d’abord parce qu’il s’agit d’un traité de crise, et ensuite parce qu’il prévoit l’institution de la règle d’or.

Commençons par la situation de crise : on oublie vite, bien trop vite, mes chers collègues ! Je voudrais vous rappeler les rouages de l’engrenage infernal qui a failli broyer notre économie et fait aujourd’hui encore souffrir des millions de Français et d’Européens. À la crise des subprimes et à la faillite de Lehman Brothers a succédé la crise des dettes souveraines, la première vague touchant la Grèce, l’Irlande et le Portugal, la deuxième atteignant l’Espagne et l’Italie – on s’est même demandé si une troisième vague ne frapperait pas la France. Voilà le contexte, et on ne peut en séparer le traité budgétaire.

Combien de psychodrames, de sommets, de reculades aura-t-il fallu pour qu’une solution émerge enfin ? Il s’agit d’une double solution, une solution « siamoise » même, associant un mécanisme de solidarité à un traité budgétaire : d’un côté, la main tendue, l’entraide, de l’autre, la responsabilité, la règle, l’engagement. Ces deux aspects sont indissociables. Peut-on voter l’un de ces textes et rejeter l’autre ? Non ! J’ai voté le mécanisme de solidarité, et je voterai donc le traité budgétaire : c’est une question de cohérence.

Monsieur le ministre délégué, vous avez de la chance : vous faites face à une opposition constructive et responsable. Vos amis n’ont pas voté le mécanisme de solidarité : c’est tout de même incroyable ! Je pourrais vous présenter une anthologie des petites phrases prononcées à cette occasion par Nicole Bricq et Jean-Marc Ayrault… Où est la cohérence dans cette démarche, comment peut-on voter le traité budgétaire si l’on n’a pas voté le mécanisme de solidarité ? Monsieur le ministre délégué, nous sommes une opposition responsable : nous ne voulons pas affirmer notre intérêt partisan, mais l’intérêt de la France et celui de l’Europe.

Alors que certains sont sans doute en train d’hésiter, comme cela m’est arrivé par le passé, je pense que nous devons nous rappeler dans quelle situation nous nous trouvions il y a seulement quelques mois. On pouvait alors se demander si c’était la spéculation ou les États qui triompheraient. Quelle alternative existait-il à la réunion d’au moins vingt-cinq États autour d’une solution viable ? Aucune. C’est la première raison pour laquelle je voterai ce traité.

La deuxième raison, c’est que le traité prévoit l’institution de la règle d’or. Il y a un peu plus de quatre ans, j’ai déposé une proposition de loi constitutionnelle visant à créer une règle d’or en France. En effet, depuis 1975, c’est-à-dire depuis plus de trente ans, aucun budget n’a été voté à l’équilibre, que ce soit par la droite ou par la gauche. L’addiction de notre pays à la dépense publique est donc trop forte pour que nous espérions la réduire sans garde-fou.

La dette issue de l’accumulation des déficits est une bombe à retardement pour notre indépendance nationale. Je demeure souverainiste, et on ne peut parler de souveraineté lorsqu’on se place sous la dépendance des marchés financiers ; c’est une évidence.

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