Intervention de Guillaume Garot

Commission des affaires économiques — Réunion du 14 novembre 2012 : 1ère réunion
Audition de M. Guillaume Garot ministre délégué auprès du ministre de l'agriculture de l'agroalimentaire et de la forêt chargé de l'agroalimentaire

Guillaume Garot, ministre délégué :

Nous sommes préoccupés par la filière porcine : avec Stéphane Le Foll, nous avons réuni le 30 octobre dernier, pour la première fois, l'ensemble des acteurs de cette filière pour travailler à la présentation d'une nouvelle stratégie pour le porc d'ici trois mois. Un compromis historique entre la performance économique et la performance écologique va devoir être trouvé : c'est la condition de l'avenir de la filière. Tant que les éleveurs de porcs seront tenus pour de méchants pollueurs, il ne sera pas possible d'avancer. Comment bâtir un consensus historique ? L'Allemagne se préoccupe de l'environnement : les élevages sont devenus des lieux de production énergétique avec la méthanisation. Pourquoi ne pas faire de même en France ? Nous pourrons nous interroger sur la taille des élevages quand nous aurons répondu à l'exigence écologique. Nous devrons simultanément résoudre trois autres problèmes : premièrement, les abattoirs, surtout en Bretagne, sont en grande difficulté et cette question doit être traitée au niveau national. Il ne faut d'ailleurs pas examiner la situation d'un seul groupe mais regarder globalement l'état de l'outil d'abattage en France. Deuxième point : il va falloir monter en gamme pour créer de la valeur ajoutée, comme l'a dit à juste titre Martial Bourquin. Dernier point : nous devrons améliorer les exportations de viande porcine, notamment dans les pays émergents. Une fois que nous serons d'accord sur ces points, nous pourrons déterminer quel est le volume de production porcine que nous devons viser en France : 23 ou 26 millions de têtes.

La justice s'est prononcée pour le pôle frais de l'entreprise Doux. Certains sites ont été repris et d'autres non. Nous avons sauvé, sur les sites placés en liquidation, 861 emplois sur un peu plus de 1 700. Malheureusement, 857 personnes n'ont pas retrouvé d'emploi. Cependant, nous n'avons laissé personne au bord du chemin : un dispositif d'accompagnement social très puissant a été mis en place avec un contrat de sécurisation professionnelle. Chaque salarié bénéficie pendant douze mois d'un accès facilité à la formation, d'un accompagnement pour la recherche d'un emploi et du versement de 100% de son salaire net pendant un an.

Pour ouvrir toutes les portes, nous avons financé une étude afin d'examiner la viabilité industrielle du site de Graincourt qui n'a pas été repris. Ses conclusions seront rendues publiques avant la fin de l'année.

Le 28 novembre prochain, le tribunal de Quimper se prononcera sur la part du groupe Doux qui relève des produits frais et élaborés : Charles Doux et ses actionnaires devraient présenter un plan de continuation. L'Etat sera vigilant car ce plan ne pourra pas être adossé ad vitam aeternam sur des restitutions aux exportations. Le plan de continuation devra ternir compte de l'arrêt prévisible des restitutions dans la future PAC et garantir les 2 000 emplois restants.

Vous m'avez interrogé sur les abattoirs et les contrats de prestation au sein de l'Union européenne. L'Allemagne en use beaucoup : le coût du travail horaire dans les abattoirs y est d'environ 7 euros contre 20 euros en France - et 30 euros au Danemark : ne prétendons pas que le coût du travail est l'unique raison du défaut de compétitivité de la filière française, les capacités d'exportation du Danemark sont supérieures aux nôtres ! D'autres difficultés expliquent donc cette situation. Le problème des contrats de prestation, cette forme de dumping social, est d'ores et déjà posé sur la table ; nous le traiterons au niveau européen. L'urgence reste malgré tout de mobiliser nos énergies pour défendre la nouvelle PAC qui fait l'objet de nombreuses attaques budgétaires. Stéphane Le Foll sera à pied d'oeuvre lors du prochain Conseil européen des 22 et 23 novembre, conformément à l'engagement du président de la République.

Pourquoi inclure le bois dans les rencontres régionales ? Les enjeux sont voisins en termes de calendrier. Aux rencontres régionales pour l'avenir de l'agro-alimentaire et du bois du premier trimestre 2013 succédera une rencontre nationale sur le bois. La balance commerciale du bois est déficitaire de 6 milliards d'euros, un chiffre considérable ! Le tableau n'est guère réjouissant : comme les pays en développement, nous exportons du bois rond et importons des meubles. Imaginez le travail qu'il faut mener pour construire une filière bois : il faut tout reprendre de A à Z. La réflexion est en cours, je ne détaillerai pas nos pistes, d'autant que les rencontres régionales seront l'occasion de trouver des premières réponses à des questions concrètes : quels lieux de production en France, quels débouchés, quelle place pour le bois-énergie ? La perspective sera globale pour des raisons évidentes : comment parler du tronc, en oubliant les branches ?

Le gaspillage alimentaire doit faire l'objet d'une grande politique nationale qui engage chaque citoyen. Il suppose d'abord une prise de conscience. Partons des chiffres : chaque année, les Français jettent 20 à 30 kg de nourriture. Si l'on considère l'ensemble du processus, de la production à l'assiette, la France jette 150 kg de nourriture par an et par habitant. Autrement dit, même si ce chiffre est inférieur à la moyenne européenne de 190 kg, nous gaspillons beaucoup tout au long de la chaîne. Comment faire ? Travailler avec tous les acteurs, notamment la grande distribution, en s'inspirant des Britanniques qui sont très en avance dans ce domaine. Prenons l'exemple des promotions différées. En faisant vos courses, vous découvrez que vous pouvez acheter trois paquets de yaourts pour le prix de deux. Vous rentrez chez vous et les rangez dans le réfrigérateur. Quelques jours après, on s'aperçoit que la date limite de consommation est dépassée. Ne peut-on pas conserver la promotion en gérant différemment le temps ? Si ! Il suffit de prendre les deux packs la première semaine et revenir la semaine suivante prendre le troisième. On y gagnera dans l'organisation de son réfrigérateur...

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