Je crois qu'il faut inscrire ce débat dans une visée d'émancipation humaine qui repose sur la nécessaire prise en compte de la différence de l'autre, différence qui est aussi celle du genre.
Or, cette appréciation de l'altérité s'ancre dès l'enfance. Revenant de Suède, je retiens en particulier le travail mené dans les crèches où sont menées des expérimentations visant à déconstruire les stéréotypes sexués à travers l'activité, les jouets, l'habillement... Si ce discours doit être porté dès l'enfance, je ne sous-estime pas le poids du sexisme dans l'Éducation nationale où l'on sait bien, en particulier dans le primaire, que les enseignants sont majoritairement des enseignantes.
Nous sommes pourtant conscients de la nécessité de prendre des mesures d'urgence.
En choisissant pour thème de réflexion « femmes et travail », la délégation est motivée par la nécessité de faire reculer les formes les plus précaires de travail, auxquelles vos professions n'échappent pas, en particulier les artistes qui s'inscrivent dans le régime de l'intermittence du spectacle.
Vous parliez tout à l'heure des préjugés à déconstruire, notamment concernant la question des femmes et de l'art, mais il me semble qu'un autre préjugé particulièrement ancré concerne la place de la culture dans nos sociétés : il ne faut pas réduire la culture à un « supplément d'âme » comme le font tant de gens aujourd'hui. J'estime, pour ma part, que la culture, parce qu'elle permet l'ouverture à l'autre et donc donne la capacité d'être un citoyen, fait partie, comme la sécurité sociale, du socle des missions de service public.
Aujourd'hui, l'abandon des programmes d'éducation artistique dans les programmes de l'Éducation nationale prouve bien que l'accès à la culture n'est plus considéré comme une priorité de nos politiques publiques.
Je vous l'ai dit en commençant notre rencontre : nous arrivons à la fin de nos auditions portant sur notre thème de réflexion annuel. Toutefois, ce que nous venons d'entendre ce matin apporte une nouvelle illustration de la place réductrice assignée aux femmes - « muses » en art plutôt que créatrices - que nous avons rencontrées dans d'autres professions que les vôtres.
Notre réunion, par ailleurs, me conforte dans l'idée de proposer aux autres membres de la délégation d'orienter nos prochains travaux vers le thème des femmes dans la culture.
Enfin, vous nous avez suggéré un certain nombre de pistes d'actions que nous allons relayer, pourquoi pas dès cette année, auprès de la ministre de la culture pour ce qui est des actions symboliques à prendre d'urgence.