Je vais presque tous les soirs au théâtre ou au cinéma, ce qui me donne une vision assez complète des oeuvres qui sont présentées au public : eh bien, je peux vous assurer que celles-ci reflètent de façon écrasante une vision masculine du monde, avec toute sa violence ; je ne suis pas la seule femme à avoir été choquée par la programmation du théâtre de l'Odéon et ce qu'elle véhicule de monstrueux. Et l'on peut en dire aussi beaucoup de la programmation des chaînes de télévision qui s'adresse à un public nombreux et dont la part la plus assidue est souvent la plus modeste. Ce public finit par considérer ce qu'on lui projette comme un reflet normal de la réalité.
A titre d'exemple, j'ai demandé à Rémi Pfimlin de réaliser des statistiques portant sur le nombre de femmes assassinées dans des fictions diffusées à la télévision française ; je les attends toujours, mais faites ce décompte et vous serez édifiés !
Il ne faut en effet pas envisager cette question du seul point de vue des artistes : il faut aussi l'aborder sous l'angle du public qui reçoit les spectacles car, après tout, notre travail, à nous artistes, c'est d'apporter au public un point de vue sur le monde.
Or, il faut bien voir à quoi aboutit ce laisser-faire en matière de nominations qui conduit à privilégier presque exclusivement des visions masculines des choses : cela débouche sur une violence inouïe que l'on tolère et dont on abreuve le public soir après soir.