Intervention de Claudy Lebreton

Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 4 décembre 2012 : 1ère réunion
Table ronde sur les conférences territoriales

Claudy Lebreton, président de l'assemblée des départements de France :

De nombreux acteurs ont porté la mise en place de cette conférence dite « B15 », devenue « B16 » avec la participation de Concarneau, devenue une communauté d'agglomération il y a peu. Je fais partie de ces acteurs, avec Pierre Méhaignerie, Edmond Hervé, que je salue ici, ainsi que le président Jean-Yves Le Drian. Lorsque celui-ci en a eu l'initiative, nous avions tous accepté le principe d'un lieu d'échange, où le département, le conseil régional, les communautés d'agglomération et l'association des petites et moyennes villes de Bretagne pouvaient se retrouver, avec l'idée que le monde rural serait représenté grâce au département et à la région, et surtout que les exécutifs siègeraient en personne sans délégation à des vice-présidents. Il ne s'agissait là aucunement de défiance, mais de permettre, pour aborder les grands sujets concernant l'espace géographique régional, que les acteurs qui comptent soient personnellement présents autour de la table. C'est important car, depuis quelques mois, j'observe une certaine dérive - qui n'est pas le fait de Pierrick Massiot, jeune président de région - consistant à être absent ou bien à envoyer aux réunions un vice-président ou le directeur général, qui ne sont pas décisionnaires sur les sujets qui doivent engager l'avenir des collectivités.

Ce lieu de rassemblement et d'échange est pertinent, la preuve en est que d'autres régions s'en sont dotées, en l'adaptant à leurs spécificités locales, à l'image de la Franche-Comté ou de Rhône-Alpes.

J'illustrerai mon propos sur la nécessité d'un lieu d'échange et de dialogue régional à travers deux sujets auxquels toutes les collectivités sont sensibles. Sur le TGV, quelles que soient nos sensibilités, nous voulions tous réaliser les travaux entre Le Mans et Rennes afin de mettre la Bretagne à moins de trois heures de Paris. La discussion, y compris sur la répartition financière entre les collectivités territoriales, s'est réalisée au sein de la conférence territoriale. Cette instance était donc absolument nécessaire pour nous retrouver et échanger sur un sujet aussi important, au-delà des appartenances politiques. Je note d'ailleurs que la Bretagne est souvent citée comme un exemple en matière de dialogue. Au niveau du très haut débit, pour lequel je siège à la commission des réseaux d'initiative publique (CRIP), qui donne un avis sur les schémas régionaux d'aménagement numérique, les acteurs présents représentant l'État, les opérateurs et les autres collectivités ont été stupéfaits de la qualité du schéma régional breton, permise par le compromis trouvé entre les partenaires, et ce malgré les imperfections qui peuvent exister, comme l'a souligné Pierre Méhaignerie.

Il y a effectivement quelques écueils qu'il convient de surmonter. D'abord, faire en sorte que cette conférence ne se transforme pas en une instance animée par et pour la région, de sorte que le dialogue et la recherche du consensus évolueraient finalement vers une forme de tutelle, risque qui peut exister comme nous avons pu le constater. D'ailleurs, au sein du « B16 », nous avons voulu aborder il y a quelques mois la question de la gouvernance et de l'organisation. Nous souhaitions en effet, après plusieurs années de fonctionnement, disposer d'un bilan d'efficacité car nous ne voulons pas en faire un « machin » évoluant progressivement comme une nouvelle collectivité au-dessus des autres collectivités.

Ceci étant dit, à titre personnel, je tire de cette instance la conviction qu'il s'agit de quelque chose d'extrêmement positif pour la gestion des grands dossiers concernant l'espace régional.

L'avis de l'assemblée des départements de France (ADF), s'agissant de l'idée de conférences régionales généralisées dans le cadre du prochain projet de loi du gouvernement, est d'abord que celles-ci n'auraient de sens que dans l'hypothèse de la création d'un Haut conseil des territoires se dupliquant par ce biais dans les régions.

Ensuite, au-delà du noyau dur sur lequel tout le monde est d'accord, c'est-à-dire le conseil régional, le département et les communautés d'agglomération, nous devons régler la question de la représentation de l'espace rural, sinon nous risquons d'écarter des communes de la délibération. Comme le disait Pierrick Massiot, l'exercice sera compliqué si nous élargissons cette instance à 40, 50, voire 70 participants, l'objectif étant d'harmoniser les positions.

Mais je suis convaincu, compte-tenu des difficultés financières auxquelles nous sommes confrontés depuis des années, que si nous ne recherchons pas davantage de coopération et de mutualisation entre nous, nous allons au-devant de grandes difficultés. C'est pourquoi l'ADF n'est pas hostile, sur le principe, à la création, dans cet esprit, de ces conférences territoriales. En revanche, s'il s'agit d'en faire une nouvelle collectivité, nous ne sommes pas d'accord.

La question de la gouvernance reste également pour nous fondamentale. Les travaux doivent-ils être conduits sous la responsabilité de l'exécutif régional, voire du préfet ? Cela a été écarté. Le préfet doit-il est présent ? Il nous parait plus opportun qu'il soit là pour échanger sur les projets intéressant l'État et les collectivités territoriales. Nous pourrions également nous inspirer du fonctionnement d'autres institutions, notamment européennes, où les mécanismes de présidence tournante sont à l'oeuvre.

C'est pourquoi nous devons éviter, dans le texte de loi, de trop formaliser l'organisation de ces instances afin de laisser de l'espace à la liberté et à la spécificité locale en faisant confiance aux collectivités territoriales. Le cas de l'Île-de-France, par exemple, ne peut évidemment pas être envisagé de la même manière que pour les régions Bretagne, Pyrénées ou encore Alsace. Nous souhaitons donc de la souplesse dans l'organisation. N'oublions pas que ces conférences territoriales trouvent leur origine dans l'idée d'une suppression de la clause générale de compétence et de l'élaboration de schémas régionaux de compétences partagées pour répondre à ses conséquences.

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