Intervention de Loïc Cauret

Délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 4 décembre 2012 : 1ère réunion
Table ronde sur les conférences territoriales

Loïc Cauret, vice-président de l'assemblée des communautés de France :

Il se trouve que je fais aussi partie des communautés de communes de Bretagne, donc j'interviens ici à deux titres, d'une certaine manière, mais avec une expérience différente de celle de mes prédécesseurs puisque je fais partie d'une communauté de communes non-membre du « B16 ». Ceci change un peu la vision des choses par rapport à ce qui a été dit. Le « B16 » a permis un certain nombre de décisions et de discussions sur les grandes infrastructures et les grandes politiques. Je veux simplement citer deux faits qui ont, à un moment donné, amené la région et d'autres à s'interroger sur la place des communautés. Premièrement : la mise en place, en fonction d'une volonté politique conjointe de l'Etat et de la région, d'un établissement public foncier. Celui-ci a fini par être créé, malgré des difficultés que tout le monde ici connaît. Pour ce faire, il a fallu impliquer les 130 communautés de communes du territoire, sans quoi cela n'aurait pas fonctionné sur le terrain. Le « B16 » ne pouvait suffire. Deuxième exemple, un peu de même nature : le schéma de cohérence régionale d'aménagement numérique (Scoran). Pour le schéma très haut débit, là encore, nous avions à faire face à de très grandes disparités entre les zones prises par l'opérateur et les autres. Dès lors, comment organiser la solidarité ? Un débat sur la nécessité d'une large solidarité du territoire a eu lieu en présence des plus petites communautés de communes, et nous avons organisé un certain nombre de conférences sur le sujet. Les communautés de communes non-membres du « B16 » ont activement pris part à la réflexion pour surmonter les inégalités territoriales, notamment dans les zones de la Bretagne centrale qui ont une forte spécificité. A cette occasion, on a constaté très concrètement que si l'on n'avait pas, à un moment donné, intégré et impliqué nos communautés de communes dans le débat, au niveau régional, il aurait manqué un maillon. Des discussions ont eu lieu avec la région, à l'époque, sur la possibilité d'une intégration de représentants de communautés de communes à titre consultatif, comme cela existe déjà pour le Scoran et pour l'établissement public foncier (EPF). Aujourd'hui on voit bien - je m'exprime là avec mes deux « casquettes » - que, sans représentation des communautés de communes, c'est-à-dire de ceux qui sont les opérationnels, les maîtres d'ouvrage sur les territoires, on a - et Claudy Lebreton en parlait tout à l'heure - des grandes politiques qui s'organisent en un endroit, puis des communautés de communes à qui on demande ensuite de mettre en oeuvre, dans le cadre de contrats, les orientations qui ont été adoptées sans elles. Il y là un problème non de tutelle mais de politique un peu « dirigée ». Si, comme le prévoit la nouvelle politique du schéma de développement économique, nous sommes amenés à discuter d'urbanisme et de foncier au plan régional (comme c'est le cas actuellement en Bretagne via une charte régionale), de santé (débat qui intervient maintenant, nouvellement porté par les collectivités), de gestion territoriale, de l'emploi et des compétences, avec des collectivités maîtres d'ouvrage, si l'on discute de toutes ces grandes politiques au plan régional, on ne peut se passer, à un moment ou à un autre, d'impliquer les maîtres d'ouvrage opérationnels du terrain. Leur représentation, de taille raisonnable, nous semble nécessaire. Les possibilités d'organisation doivent donc être souples, pour que soient opérationnels ces regroupements d'intercommunalités qui ont des pertinences de territoire et qui agissent sur beaucoup de choses (le plan de lutte contre les algues vertes, l'eau, etc.). En outre, leur représentation dans les conférences régionales est d'autant plus nécessaire que ces collectivités brassent beaucoup d'argent. Cette condition nous paraît impérative, sinon les communautés auront l'impression d'être appelées à assumer des politiques qu'elles n'auront pas eu la possibilité de discuter en amont, ce qui serait, au minimum, une faute de goût. Ainsi, de notre point de vue, les conférences régionales doivent nécessairement intégrer la possibilité d'une représentation des intercommunalités (c'est le cas en Bretagne pour les seules communautés d'agglomération). En faisant cette proposition, nous sommes confortés par la notion de contrat. On passe des contrats à partir du moment où l'on s'est mis d'accord sur les politiques et non pas si l'on vous dit : voilà la base générale, vous n'avez qu'à signer. L'idée est d'être partenaires et co-opérationnels sur la mise en oeuvre des politiques. Il ne peut y avoir de tutelle, cela serait disproportionné et contraire à la gouvernance régionale telle qu'on l'entend.

Dernier point : la question de la présence de l'Etat. Il nous semble que l'Etat doit être présent dans ces conférences territoriales car un certain nombre de compétences lui appartiennent encore. Il faut gérer ces compétences là où elles doivent être mises en oeuvre. Par ailleurs, l'Etat est aussi le garant de la cohésion, et il est nécessaire d'être en adéquation avec les politiques nationales. Quant à une gouvernance tournante ou organisée, pourquoi pas ? Nous n'avons pas de desiderata particuliers, si ce n'est, comme l'a dit Claudy Lebreton, qu'il ne peut y avoir une tutelle implicite ou indirecte. Ce point nous paraît très clair.

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