Intervention de Ronan Kerdraon

Commission des affaires sociales — Réunion du 12 décembre 2012 : 1ère réunion
Nomination de rapporteurs

Photo de Ronan KerdraonRonan Kerdraon, rapporteur :

Plusieurs collectivités territoriales ont mis en place leur propre dispositif, à l'image de la région Pays-de-la-Loire qui a lancé à la rentrée 2011 un « pass complémentaire santé », dont le montant peut s'élever jusqu'à 100 euros pour l'acquisition d'une première complémentaire ; 3 500 jeunes en ont bénéficié au cours de l'année 2011-2012. Si de telles initiatives méritent d'être saluées, elles posent cependant la question du risque de rupture d'égalité entre les jeunes selon leur lieu d'études. Sans doute la mise en place d'un chèque santé au niveau national, préconisation que le rapport de Laurent Wauquiez formulait déjà en 2006, devrait-elle être envisagée.

Il est difficile d'avoir une appréciation univoque de la situation de la population étudiante dans son ensemble, mais il apparaît clairement que certains étudiants sont dans une situation particulière de fragilité, notamment les étudiants étrangers, qui représentent aujourd'hui 12 % de la population étudiante. A Nantes, le président d'une association, qui apporte une aide alimentaire aux étudiants étrangers, nous a expliqué que la plupart d'entre eux sous-estiment largement les difficultés administratives et financières auxquelles ils vont être confrontés. Celles-ci deviennent parfois kafkaïennes et peuvent être une source importante de stress conduisant à la dégradation de leur état de santé physique et psychologique. Pour améliorer leurs conditions d'accueil en France, il conviendrait de simplifier leur parcours administratif, de limiter les visites médicales qui leur sont demandées et de faciliter leur accès au système de couverture maladie français.

Les structures qui, au sein des établissements d'enseignement supérieur, assurent le suivi sanitaire des étudiants et effectuent auprès d'eux des actions de prévention, sont confrontées à un manque chronique de moyens ainsi qu'à l'absence d'une véritable politique de santé publique. Les services universitaires de médecine préventive et de promotion de la santé (Sumpps) assurent ce suivi dans les universités. Au nombre de cinquante-neuf, répartis sur l'ensemble du territoire, ils ont pour mission d'organiser, en particulier, au moins un examen préventif par étudiant au cours des trois premières années passées dans l'enseignement supérieur. Le décret paru en 2008 les autorise à se constituer en centres de santé afin d'exercer une réelle activité de soins auprès des étudiants. Ce statut doit certainement être encouragé, même si les directeurs de Sumpps nous ont indiqué qu'il n'était pas indispensable pour remplir certaines missions.

Les Sumpps - quel sigle ! - souffrent d'un manque de visibilité. L'enquête de 2011 d'EmeVia sur la santé des étudiants révèle que seulement 1,9 % d'entre eux s'y rendent lorsqu'ils sont malades. De plus, ils s'adressent d'abord aux étudiants inscrits à l'université. Si 80 % des services ont signé des conventions avec d'autres établissements d'enseignement supérieur, ces partenariats ne suffisent pas à couvrir l'ensemble de la population étudiante, notamment les étudiants en BTS ou en classe préparatoire, qui continuent d'être scolarisés dans les lycées.

En outre, leurs moyens humains et financiers sont insuffisants pour qu'ils exercent leurs missions dans des conditions satisfaisantes. Moins d'un tiers des directeurs disposent d'un contrat de travail à durée indéterminée et seulement 15 % sont présents à temps plein. Or, le manque de stabilité à la tête des services nuit à l'engagement d'une dynamique de long terme et à la mise en place de projets ambitieux, comme de partenariats. La variabilité des statuts et la relative précarité des personnels se retrouvent du haut en bas de l'échelle.

Deux sources principales de financement viennent alimenter le budget des Sumpps : d'une part, une dotation budgétaire de l'Etat qui s'établissait à 5,2 millions d'euros pour l'année scolaire 2009-2010, son montant étant jugé largement insuffisant par l'ensemble des acteurs ; d'autre part, une participation des étudiants comprise dans leurs droits de scolarité, fixée à 5 euros depuis la rentrée 2012 après être longtemps restée figée à 4,57 euros, soit 6 millions d'euros en 2009-2010.

D'autres structures peuvent venir en aide aux étudiants, tels les bureaux d'aide psychologique universitaires, où des équipes pluridisciplinaires les accueillent gratuitement. Il n'y en a cependant que vingt sur l'ensemble du territoire, aux statuts et conditions de fonctionnement très variables. Leur action n'a fait l'objet d'aucun bilan.

Nos recommandations concernent le fonctionnement des Sumpps. En premier lieu, il convient de mettre fin à la situation de précarité dans laquelle se trouvent trop de leurs personnels. Le guide des bonnes pratiques pour le recrutement et la gestion des personnels non statutaires des services de médecine préventive, publié en 2010, doit être mieux appliqué et sa portée renforcée.

Etendons à tous les Sumpps le statut de centres de vaccination, une mission au coeur de leur rôle de prévention. Malgré les contraintes, une hausse de leur budget nous semble indispensable, à charge pour eux de nouer des partenariats avec les autres structures de soins sur le territoire.

Moins coûteux et très simple à mettre en oeuvre : remplacer l'acronyme peu harmonieux de « Sumpps » leur donnerait plus de lisibilité et indiquerait clairement leur mission de fournir des soins aux étudiants ; leurs méthodes de communication, notamment en ce qui concerne la visite médicale de prévention, gagneraient à être améliorées par la mutualisation des meilleures pratiques observées.

A plus long terme et avant toute mesure d'ampleur, il serait utile de disposer d'un rapport d'inspection évaluant la situation des Sumpps, leur positionnement et leurs perspectives d'évolution. Le principe d'autonomie des universités, qui fait dépendre les Sumpps du niveau d'engagement de leur président, ne devrait pas s'opposer à une meilleure coopération, à un échange des bonnes pratiques et à un pilotage stratégique au niveau national. La question du rattachement des Sumpps est ouverte ; une organisation étudiante prône leur gestion par les Crous pour assurer un guichet unique, mais aucune autre ne partage cette position.

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