Intervention de Damien Siess

Délégation sénatoriale à l'Outre-mer — Réunion du 14 novembre 2012 : 1ère réunion
La zone économique exclusive des outre-mer : quels enjeux ?- Audition de M. Damien Siess directeur-adjoint direction productions et énergies durables agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie ademe

Damien Siess, directeur-adjoint à la Direction productions et énergies durables de l'ADEME :

Le critère déterminant du classement est le ratio entre le coût et le productible, notamment la quantité d'énergie produite in fine. D'autres projets sont plus immédiatement rentables. Il ne m'appartient pas de juger si ce sont les projets les plus chers ou les moins matures qui mériteraient justement d'être aidés...

Le deuxième projet très important est le projet SWAC à Saint-Denis, à La Réunion, d'un budget de 140 millions d'euros, dont 20 millions d'euros d'aides financés par l'ADEME et 30 millions d'euros de la région, du Fonds européen et du FEDER. C'est un projet de climatisation qui utilise de l'eau profonde pour fournir du froid renouvelable. Ce projet est porté par un consortium au sein duquel GDF-Suez est le leader. La société Climespace et la Caisse des Dépôts sont également parties prenantes. Le deuxième intérêt du projet est qu'il permet un effacement électrique : les pompes à chaleur ont besoin de moins d'électricité que les climatiseurs pour produire du froid. Le coefficient de performance est donc très élevé, de l'ordre de 10 (l'énergie obtenue sous forme de froid est 10 fois supérieure à l'énergie utilisée par la pompe à chaleur).

Or, chaque production électrique dans les zones non interconnectées comme La Réunion étant plus chère que la moyenne nationale, la différence est compensée par la CSPE, le système de péréquation qui sert à payer le tarif de première nécessité. Un système peu coûteux en électricité comme ce projet SWAC permet donc de faire des économies sur la CSPE. L'objectif économique de ce projet est qu'EDF puisse rémunérer la société porteuse du projet pour les kilowatts heure électriques non appelés (les effacements) et qu'ensuite cette rémunération soit répercutée sur la CSPE mais de façon moindre que ce qui aurait été répercuté si on avait seulement fait tourner les climatiseurs. En revanche, le dispositif actuellement prévu par la CSPE ne permet pas de compenser l'effacement avec de la CSPE. Peuvent être compensés les seuls trois domaines suivants : tarif de première nécessité, production dans les zones non interconnectées et production renouvelable. Il n'existe pas de rémunération possible par la CSPE d'économies d'énergie ni sur le stockage. C'est paradoxal au regard des enjeux à moyen et long termes. Cela nécessiterait une modification législative. C'est l'objet d'un amendement à la proposition de loi du député M. François Brottes instaurant une tarification progressive de l'énergie. Cet amendement permettrait à la CSPE de compenser l'effacement électrique. Une telle disposition aurait un fort impact sur la faisabilité du projet SWAC.

Ce projet devra par ailleurs obtenir l'aval de la Commission européenne, compte tenu des niveaux d'aide apportés. Cela suppose encore un an de discussion pour que les financements publics accordés soient validés avant le commencement du projet.

D'autres projets de même nature sont en cours, mais moins avancés : l'un à Saint-Pierre à La Réunion, porté par EDF, sera sans doute déposé prochainement. Si le projet ETM Martinique ne se fait pas du tout et qu'il est décidé de faire autre chose que de l'électricité, l'eau profonde froide serait alors utilisée directement dans un autre réseau de froid et éventuellement dans d'autres territoires.

L'ADEME soutient par ailleurs des projets houlomoteurs, à un stade d'avancement encore moindre. Je souhaite citer un projet qui met en évidence l'importance du stockage : c'est un projet de steppe marine en Guadeloupe, à un stade expérimental pour l'instant, et qui permettrait le stockage de l'électricité sur le même principe que les steppes en zone montagneuse, avec des dénivelés et un système de réservoirs aval et amont. Ces systèmes ont de très bons rendements, proches de 85 % à 90 %. On peut réaliser ce type de projet soit en bord de mer, à proximité d'une falaise par exemple, soit en pleine mer avec des digues et des lagons artificiels. Il s'agit d'une technologie d'avenir, nous en sommes au stade de la recherche-développement.

En conclusion, il faut continuer la recherche-développement technologique, notamment pour permettre le développement d'un certain nombre de filières qui ont un fort potentiel à la fois en termes d'enjeux énergétiques pour l'outre-mer et pour l'industrie française. À terme, il faut non seulement développer les espaces marins proches des côtes, mais utiliser aussi la ZEE. Aujourd'hui, on en est encore au stade de la recherche - développement.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion