Dans le domaine des vaccins, 800 postes devraient être supprimés, compensés en théorie par la création, liée à l'atteinte des objectifs d'activité, de 300 nouveaux postes. Il n'y a toutefois aucune garantie sur ce point.
Cela concerne les fonctions support, la recherche ainsi que la production industrielle, en particulier sur le site de Marcy-l'Etoile. L'arrêt de la production de certains vaccins va y faire disparaître 567 postes.
La direction invoque un manque de compétitivité et une augmentation de 27 % du coût de revient des productions françaises entre 2007 et 2011. L'expert mandaté par le comité central d'entreprise a montré que la méthode de calcul de Sanofi était faussée : on se situe en réalité à 20 %. Ce chiffre est lié à l'augmentation des effectifs dans la même période, qui a permis une hausse du chiffre d'affaires. Il est plus pertinent d'analyser le ratio entre l'évolution du prix de revient des productions françaises et le chiffre d'affaires : son évolution n'est que de 3,6 % en quatre ans, soit moins de 1 % par an. L'écart par rapport au reste du monde est limité, car le coût de revient des productions qui y sont réalisées a augmenté de 18 % sur la même période.
En réalité, ce sont les choix stratégiques faits ces dix dernières années par la direction qui sont les véritables causes de ces arrêts de production. Entre les coupes dans les projets de recherche, qui ont déjà été effectuées et qui sont la raison pour laquelle la modernisation de la technique de production des vaccins contre la pneumonie et les oreillons n'a pas été effectuée. Le manque d'investissement dans l'outil de production est généralisé : l'infrastructure n'a pas été modernisée ces cinq dernières années, malgré les appels en ce sens de notre part à la direction. La recherche d'une plus grande rentabilité et la réduction des coûts ont été sa priorité, tout en augmentant la redistribution des bénéfices aux actionnaires.
L'affirmation selon laquelle il n'y a pas de délocalisations est fausse. Dès 2015, le vaccin acellulaire contre la coqueluche ne sera plus produit à Marcy-l'Etoile mais en Inde. Le transfert de la production du vaccin contre l'hépatite A vers ce même pays est en cours. Quant à la production des vaccins contre la rougeole et la rubéole, il est prévu qu'elle soit arrêtée dès 2013 et transférée temporairement dans une autre unité pour 2014. Sa pérennisation est conditionnée à la réalisation d'importants travaux de rénovation qui ne seraient entrepris que si la rentabilité est assurée. De plus, les postes de production sont supprimés dans le cadre du plan de restructuration. La direction n'a plus que deux solutions : soit l'arrêt complet de la production, soit son transfert en Inde. Elle entretient le flou, tout en renégociant le prix du vaccin contre la rougeole à la hausse, comme il n'y a que deux producteurs dans le monde, avec l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Elle se livre à un véritable chantage.
Il est bien sûr de la responsabilité de la direction d'une entreprise d'adapter celle-ci aux évolutions de son marché. Nous contestons toutefois le postulat sur lequel les restructurations de Sanofi sont conduites, c'est-à-dire l'augmentation de la rentabilité pour améliorer la rémunération des actionnaires. Face à nous, la direction est intraitable et déroule son rouleau compresseur.
La seule solution est de légiférer : Sanofi n'est pas la seule entreprise concernée par ces plans purement boursiers. Il faut améliorer la régulation et donner plus de pouvoir aux comités d'entreprise (CE). La loi doit empêcher non seulement les licenciements boursiers mais, plus largement, les suppressions d'emplois à visée boursière. L'utilisation du terme « licenciement » serait trop restrictive et permettrait à de nombreuses entreprises de contourner l'interdiction en recourant, comme Sanofi l'a fait, à des plans de départs dits « volontaires ». Il faudrait que le motif économique qui justifie la suppression des emplois soit analysé en fonction de l'utilisation faite par l'entreprise de ses bénéfices. Dès lors qu'une part de ceux-ci supérieure à un seuil prédéterminé est consacrée au versement de dividendes ou au rachat d'actions, l'entreprise se porte bien et ne doit donc pas pouvoir supprimer des emplois. De même, les entreprises en difficulté qui peuvent avoir besoin de licencier ne devraient pas, dans les années suivantes, pouvoir redistribuer une part importante de leurs bénéfices aux actionnaires.
Un droit d'opposition aux suppressions de postes devrait être reconnu au CE en amont, avant qu'elles n'aient été effectuées. La législation actuelle permet aux entreprises de réaliser des licenciements qui ne sont pas conformes à la loi : c'est seulement une fois qu'ils ont eu lieu qu'un recours peut être déposé.
Les financements publics dont bénéficient les entreprises, comme le CIR, devraient être conditionnés à des objectifs scientifiques et industriels ainsi qu'à des engagements en matière d'emploi et d'activité.
Enfin, il faudrait inciter les entreprises à investir proportionnellement aux bénéfices qu'elles engrangent, afin d'éviter que les outils de production se dégradent. Les privilèges exorbitants des dirigeants, comme les retraites-chapeau ou les parachutes dorés, devraient être réduits.
L'adoption d'une telle loi est urgente car il n'y a pas d'autre solution face à l'avalanche actuelle des plans sociaux et au risque fort d'explosion sociale qu'elle comporte.