Intervention de Sophie Élizéon

Délégation sénatoriale à l'Outre-mer — Réunion du 5 décembre 2012 : 1ère réunion
Audition de Mme Sophie élizéon délégué interministérielle pour l'égalité des chances des français d'outre-mer

Sophie Élizéon, déléguée interministérielle pour l'égalité des chances des Français d'outre-mer :

En fonction depuis quelques semaines, je réponds à votre deuxième invitation avec respect et fierté. J'ai la plus grande estime pour le travail parlementaire au service des territoires ultramarins. Le Sénat a d'ailleurs été pionnier en la matière, comme en a témoigné à nouveau la conférence-débat du 23 novembre.

La Délégation interministérielle pour l'égalité des chances des Français d'outre-mer a été créée dans le but de garantir un accès identique à la citoyenneté à l'ensemble de nos compatriotes des outre-mer installés dans l'hexagone. Pour remplir cette mission ambitieuse, j'ai défini un cap, une méthode, des actions concrètes.

Il ne saurait y avoir d'action pertinente sans une connaissance fiable des personnes sur lesquelles nous devons porter notre attention. Or ce n'est pas encore le cas. C'est pourquoi je souhaite que nous disposions dès 2013 d'un outil d'évaluation et de prospective sociologique, économique et démographique. Un tel outil est déjà en cours d'élaboration au sein de l'Observatoire national des originaires d'outre-mer, dont certains d'entre vous ont nécessairement entendu parler. Il nous appartient de l'interroger, de le faire évoluer, et d'en utiliser l'ensemble des ressources pour évaluer, corriger et pérenniser l'ensemble des actions qui nous incombent.

Simultanément, je souhaite que la Délégation mette tout en oeuvre pour illustrer et valoriser l'audace des ultramarins de l'hexagone dans le monde de l'entreprise comme à l'université, dans le sport comme dans les arts. En suivant ce fil rouge, nous assemblerons les rouages d'un mouvement vertueux vers l'égalité. Nous entendons développer des actions concrètes autour de trois axes. La prévention d'abord : nous voulons anticiper les situations d'inégalité, en accompagnant les ultramarins dès leur arrivée en métropole. Le travail mené par le RSMA en matière d'insertion professionnelle pourrait être prolongé en hexagone : nous avons évoqué avec M. Loiacono l'hypothèse d'une expérimentation commune. Je souhaite aussi que les ultramarins de métropole soient mieux représentés au sein des communautés d'experts, dans les médias généralistes, dans les colloques et séminaires de premier plan, ou dans les instances consultatives comme le Conseil économique, social et environnemental. S'il est important de poursuivre le travail de reconnaissance d'une culture ou d'une identité propre et différente selon chaque département ou territoire d'outre-mer, il reste vital de rappeler ce qui rassemble et fédère. En 2014, à l'occasion des commémorations du soixante-dixième anniversaire du débarquement et du centenaire de la première guerre mondiale, je souhaite que le rôle des Français et Françaises des outre-mer soit reconnu et exposé. Notre communauté se définit autant par ses différences culturelles que par ses attachements républicains.

Mon deuxième axe d'action vise à agir et corriger les inégalités dont souffrent les ultramarins en métropole. Des actions positives pour gommer les difficultés d'accès à l'emploi, à la formation doivent être poursuivies et renforcées. Le sujet crucial de la continuité territoriale vers les outre-mer nécessite un engagement constant : les conventions avec les transporteurs aériens, que j'ai commencé à consulter, doivent être renouvelées et consolidées. Afin de mieux informer les ultramarins des solutions qui leur sont offertes, la Délégation pourra s'appuyer sur les réseaux associatifs présents dans l'hexagone, mais aussi sur les bénévoles du Défenseur des droits répartis sur l'ensemble du territoire - j'ai d'ailleurs rencontré M. Baudis en début de semaine. En outre, il convient de sensibiliser les bailleurs et les acteurs du service public de l'emploi à l'obligation légale de ne faire aucune différence de traitement entre les citoyens français. Il n'est pas tolérable que les cautions solidaires résidant dans les territoires ultramarins soient encore perçues comme défaillantes a priori par de nombreux bailleurs privés, ni que les relevés d'identité bancaire des comptes domiciliés outre-mer soient considérés comme étrangers par certains opérateurs de téléphonie dans l'hexagone.

Troisième axe : diffuser. Ce gouvernement a mis en place au sein de chacun des cabinets ministériels des référents spécifiquement dédiés aux outre-mer, qui diffuseront la démarche de notre Délégation et instilleront dans les services publics de L'État une prise de conscience de la réalité de ces inégalités. J'ai commencé à les rencontrer. Ainsi, il sera plus aisé de proposer des actions de sensibilisation des acteurs publics aux préjugés directs et indirects. Je souhaite aussi qu'un programme d'action interministériel interne et externe soit élaboré, qui se concrétiserait par des rubriques systématiques dans les parutions des différents services gouvernementaux, de plans de formation spécifiques des agents d'accueil en contact avec le public, ou encore de sensibilisation des partenaires des services de l'État aux spécificités des publics et territoires ultramarins. Nous commencerons cette démarche en partenariat avec les ministères dont les portefeuilles sont les plus immédiatement concernés par nos priorités : le logement, la culture, la jeunesse, les sports et la vie associative, l'éducation nationale, ainsi que la ville.

Le lieu de convergence de toutes ces actions sera la Cité des outre-mer, à laquelle le ministère des outre-mer travaille et pour laquelle la Délégation apportera tout son concours, afin que la diversité de nos concitoyens soit reconnue par tous comme constitutive de notre tissu national. Tout cela ne peut se faire sans votre soutien ni sans votre concours. Vous êtes la voix de nos compatriotes des outre-mer, c'est grâce à vos observations que nous resterons en contact avec nos territoires et pourrons donner corps à nos ambitions. Celles-ci sont grandes. Elles sont soutenues par des crédits qui ne sont pas faramineux, puisque la nature interministérielle de notre structure peut lui valoir l'appui des crédits d'autres ministères. Pour cela également, votre soutien me sera nécessaire.

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