Intervention de Francis Delattre

Réunion du 19 décembre 2012 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2012 — Rejet d'un projet de loi en nouvelle lecture

Photo de Francis DelattreFrancis Delattre :

Pour l’essentiel, le présent projet de loi de finances rectificative est devenu le véhicule d’une réforme bâclée autour d’un thème essentiel pour notre pays : la compétitivité de nos entreprises.

Après le matraquage fiscal des entreprises et des entrepreneurs organisé par la première loi de finances rectificative présentée, en juillet dernier, par le nouveau pouvoir et prévoyant le prélèvement de 10 milliards d’euros d’impôts nouveaux, il était habile, en termes de communication, d’annoncer trois mois plus tard au monde économique un pacte pour la compétitivité de l’industrie française. Ce dispositif est issu du rapport Gallois, lequel relevait au moins que les charges sociales pesant sur le travail sont trop élevées.

Monsieur le ministre, ce problème unanimement reconnu avait été traité par le biais d’un transfert fiscal, à hauteur de 13 milliards d’euros, mis en place via la loi dite « anti-délocalisations » de mars 2012, que vous avez annulé dès votre arrivée au pouvoir en invoquant le modèle social français, qui a pour particularité d’engendrer, depuis trente ans, un chômage de masse…

Par rapport au diagnostic de M. Gallois, ce dispositif amorçait sérieusement et immédiatement le choc de compétitivité préconisé pour redonner à nos entreprises des marges, les aider à résoudre leurs problèmes de trésorerie ou à reprendre leurs investissements, aujourd’hui en chute libre.

Mais votre obsession de détricoter le travail des prédécesseurs, par essence injuste, vous conduit à transformer ce projet de loi de finances rectificative en un véhicule de dépannage, inadapté eu égard à l’urgence, complexe et d’un financement aléatoire.

Sans votre comportement irresponsable, les entreprises de notre pays bénéficieraient aujourd’hui des allégements de charges indispensables à beaucoup d’entre elles pour retrouver des prix compétitifs sur les marchés, alors que cette merveille de montage de technologie financière qu’est le CICE sera largement inopérante en 2013, ses effets devant s’étaler jusqu’en 2017 ; pour le moins, son dispositif n’est pas adapté à l’urgence de la situation économique du pays.

Par ailleurs, ce crédit d’impôt, présenté initialement comme une créance fiable et négociable par les entreprises, a perdu l’essentiel de sa liquidité dès lors que des critères de conditionnalité ont été introduits par l’Assemblée nationale. Qui dit conditions dit contrôles, en l’occurrence contrôles fiscaux !

Les bénéficiaires pourront-ils réunir plus ou moins simultanément les sept conditions énumérées à l’alinéa 3 de l’article 24 bis ? Les contentieux fiscaux, avec les craintes qui les accompagnent, seront légion. Pour les PME et les PMI, en particulier, un dispositif fiscal incitatif doit absolument être simple et sûr, au contraire du meccano que vous proposez, monsieur le ministre !

Non seulement les 20 milliards d’euros de ristournes fiscales à accorder jusqu’en 2017 relèvent de la cavalerie budgétaire, mais, au surplus, cette somme sera bien insuffisante pour créer un quelconque choc de compétitivité. D’ailleurs, le texte n’est accompagné d’aucune étude d’impact ; les 300 000 emplois nouveaux annoncés relèvent d’un savant calcul de M. le rapporteur général.

Au surplus, les commerçants, les artisans, les travailleurs indépendants, les professions libérales, qui constituent la colonne vertébrale de l’emploi dans nombre de nos territoires et sont déjà fortement touchés par les charges et les impôts que vous avez votés depuis six mois, sont les grands oubliés de ce pseudo-choc de compétitivité.

S’agissant du financement, d’un côté vous prévoyez une hausse de la TVA, de l’autre vous annoncez 10 milliards d’euros d’économies sur les dépenses publiques. Mais nous ne voyons pas le début du commencement d’une économie dans ce texte.

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