Intervention de Jacques Mézard

Réunion du 19 décembre 2012 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2012 — Rejet d'un projet de loi en nouvelle lecture

Photo de Jacques MézardJacques Mézard :

Si nous ne faisons rien, ce sont nos enfants et nos petits enfants qui devront payer le prix de notre irresponsabilité.

C’est pourquoi il est urgent de reprendre en main l’avenir de notre pays, en commençant par réduire le déficit public, sans pour autant mener une politique d’austérité aveugle qui inhiberait la croissance et nous plongerait dans un cercle vicieux récessif dont il serait fort difficile de sortir.

L’objectif de ramener le déficit à 4, 5 % du PIB en 2012 devrait être atteint grâce aux efforts, il faut le dire, des gouvernements successifs, dont celui de M. Ayrault. C’est en effet la première fois qu’est constatée en cours d’exercice une amélioration du solde budgétaire de l’État, qui correspond à un effort exceptionnel de l’ordre de 5 milliards à 6 milliards d’euros.

Pour parvenir au redressement de nos finances publiques, les hausses de prélèvements sont inévitables. Elles seront acceptées par nos concitoyens si elles sont lisibles et justes. Mais il est tout aussi indispensable de montrer l’exemple, en réalisant, partout où cela est possible, des économies.

Le Gouvernement a lancé le grand chantier de la « modernisation de l’action publique ». Le comité interministériel de modernisation de l’action publique qui s’est réuni hier doit « rapprocher l’administration des citoyens et simplifier les démarches pour les entreprises et les collectivités ». Ces deux chantiers seront difficiles à mener à bien, mais, en tout cas, je crois que nous pouvons tous être d’accord avec de tels objectifs. Il est essentiel, tout en réduisant les coûts, de préserver, et si possible d’accroître, la qualité et l’efficience de nos services publics.

Outre les économies qui peuvent être réalisées grâce à la rationalisation de certaines politiques publiques ainsi qu’à la suppression des doublons et de multiples commissions consultatives plus ou moins obscures et, surtout, peu efficaces, il y a, monsieur le ministre, un autre chantier à ouvrir pour retrouver des marges de manœuvre budgétaires, tout en renforçant la justice fiscale et sociale : celui du réexamen des niches fiscales. En effet, il y a là aussi des économies à réaliser.

La lutte contre la fraude fiscale, qui est un axe majeur du collectif budgétaire que nous examinons aujourd’hui, permettra également de redresser nos comptes publics et de rétablir, comme le demandent nos concitoyens, justice et équité dans notre système fiscal. L’action du Gouvernement en la matière, qui a débuté dès l’élaboration du collectif de juillet dernier, est incontestable. Il convient de poursuivre les efforts en ce sens.

J’en viens maintenant à la principale mesure de ce projet de loi de finances rectificative, à savoir la création du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi.

Tous les membres de la Haute Assemblée et la majorité des Français sont d’accord, le constat est plus qu’alarmant. Le taux de chômage dépasse 10 % et continue de monter, le déficit commercial atteint un record de 70 milliards d’euros, les fermetures d’entreprise se multiplient sur tout le territoire. Il fallait donc agir d’urgence, et c’est ce que le Gouvernement a fait en introduisant dans ce collectif budgétaire, par voie d’amendement, l’article 24 bis.

Ce fut probablement une décision difficile, emportant un certain nombre de conséquences assez regrettables –absence d’étude d’impact, latitude d’appréciation forcément limitée pour les parlementaires –, mais c’était la seule solution susceptible de permettre l’amorçage immédiat d’un nouveau projet afin de rendre la France compétitive, d’obtenir une croissance forte et créatrice d’emplois. Nous devons cela aux Français !

C’est pourquoi je regrette, à l’instar de la grande majorité des membres de mon groupe, que le Sénat ait supprimé en première lecture cet article. C’est un acte grave, car il s’agissait de la principale disposition du projet de loi. Le Gouvernement a donc été conduit à demander une seconde délibération et un vote bloqué. Cette situation a rendu impossible toute discussion sur le dispositif lui-même et sur les améliorations qui auraient pu lui être apportées. Je pense, par exemple, à la proposition de mon groupe d’élargir le bénéfice du CICE aux entreprises individuelles, question qui méritait un véritable débat.

Nous regrettons donc que cette discussion n’ait pu avoir lieu, car s’il y avait un article dans ce projet de loi de finances rectificative qui aurait dû faire consensus, c’était bien celui-là, tant la situation est grave et grande l’urgence. Certains groupes n’ont peut-être pas bien mesuré le poids de leur décision, mais c’est leur responsabilité !

C’est grâce à la productivité et à la compétitivité de nos industries que nous sortirons par le haut du marasme économique : il n’y a pas d’autre voie possible.

Enfin, ce projet de loi de finances rectificative est assez hétéroclite, eu égard notamment à l’adoption de cinquante-neuf articles additionnels par l'Assemblée nationale. Ceux qui avaient été adoptés par le Sénat ne seront malheureusement pas retenus.

Je me réjouis cependant que des propositions sénatoriales concernant notamment la cotisation foncière des entreprises et la révision des valeurs locatives foncières aient été reprises par les députés.

Permettez-moi, monsieur le ministre, de conclure mon intervention en abordant un point qui n’est pas directement lié à ce texte.

Si nous attendons la justice fiscale entre les citoyens, nous l’attendons aussi entre les territoires. Or je tiens ici à dénoncer ce qui s’est passé à l’Assemblée nationale au cours de ces dernières heures, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2013, à propos de la question de la péréquation entre les départements en matière de droits de mutation à titre onéreux.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion