Intervention de Dominique Voynet

Réunion du 31 mai 2006 à 15h00
Gestion durable des matières et des déchets radioactifs — Article 8, amendement 154

Photo de Dominique VoynetDominique Voynet :

Vous avez fait mine de plaisanter, je n'ai pas dit que vous ne preniez pas ces questions au sérieux.

Je crois tout simplement que, si nous nous posons des questions sur la réversibilité, c'est parce que nous sommes confrontés à un défi inédit. En effet, la demi-vie des matières et des déchets radioactifs qui sont destinés à être stockés dans les couches géologiques profondes excède les capacités de projection de l'esprit humain. Cent ans, comme l'a dit M. le ministre délégué, c'est long, trois cents ans, cela ne paraît pas techniquement accessible. Quid de vingt-quatre mille ans, durée qui est celle de la demi-vie du plutonium ?

On l'aura compris au fil du débat, il ne s'agit pas tant de reprendre les déchets, dont on ne sait d'ailleurs plus très bien s'ils seront ou non « conteneurés », que de garder la mémoire du site.

J'avais d'ailleurs cru comprendre que la barrière géologique avait justement pour objet d'éviter un travail trop lourd pour la mise en place de conteneurs. Mais j'ai réalisé hier, au cours du débat, que certains n'excluaient pas le « conteneurage » des déchets de haute activité à vie longue. Ce mot de « conteneurage » est un terme affreux, mais il fait partie du terrible jargon que nous utilisons ici.

Les mots ont un sens et je voudrais pointer la divergence qui existe entre l'amendement présenté par M. Biwer et celui qui est défendu par le Gouvernement.

M. Biwer nous demande d'adopter un amendement visant à prévoir que « le Gouvernement présente un projet de loi autorisant la création d'un centre de stockage réversible ».

Quant à l'amendement n° 154 rectifié, il est ainsi rédigé : « Le Gouvernement présente ensuite un projet de loi fixant les conditions de réversibilité ».

Une précision s'impose donc.

Gérard Longuet a évoqué le large soutien des parlementaires de la Meuse à ce projet, en évoquant la « conversion » de deux députés initialement hostiles. Or je viens de relire leurs interventions à l'Assemblée nationale. L'un d'entre eux y a d'ailleurs défendu une question préalable. Tous deux ont insisté sur le fait que le consentement des populations avait été obtenu dans un contexte très différent, puisqu'il s'agissait alors de créer plusieurs laboratoires et de tester la réversibilité.

J'ai sous les yeux la lettre du président du conseil général de la Meuse - nous l'avons tous reçue -, qui évoque une motion votée à l'unanimité des membres du conseil général mettant notamment en évidence « le refus de l'hypothèse d'un stockage irréversible » et insistant - c'est le point fondamental pour le conseil général - sur le fait que le principe de réversibilité ne doit pas avoir de durée minimum.

J'ai donc l'impression qu'il s'agit d'un jeu de dupes : on adopte des formulations ampoulées et ambiguës qui visent à laisser croire aux populations que la réversibilité est un concept robuste. Pour ma part, j'y vois plus que jamais une figure de rhétorique !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion