Je remercie M. Cambon de son intervention, qui traduit une grande élévation de pensées.
Aux remerciements qu’il a bien voulu m’adresser, je répondrai que l’intervention du Gouvernement devant le Parlement est prévue par l’article 35 de la Constitution.
Il a souligné le risque que constituait, pour le Mali, mais aussi pour la région et l’Europe, l’installation d’un régime terroriste, et a apporté à l’engagement de la France un soutien non ambigu.
Il m’a aussi interrogé sur le drame intervenu en Somalie. Le ministre de la défense aura l’occasion de lui apporter des réponses plus précises sur ce point lorsqu’il viendra devant le Sénat.
Je tiens, pour ma part, à déplorer ce drame en insistant sur le fait, même si cela est connu, qu’il n’y a aucune corrélation à établir entre les dates des différentes interventions.
Par ailleurs, je veux vous mettre tous en garde, ainsi que l’opinion française, contre une épouvantable instrumentalisation d’une victime française, qu’heureusement la presse ne semble pas avoir relayée. Selon certaines informations qui nous ont été récemment transmises, une autre instrumentalisation, peut-être plus horrible encore, se prépare au sujet de l’un de nos ressortissants ; j’espère que les uns et les autres adopteront la même attitude.
M. Cambon a également soulevé certaines questions posées par l’intervention française. Il n’est en effet pas contradictoire d’apporter un soutien sans faille à notre engagement, comme vous l’avez quasiment tous fait, tout en s’interrogeant sur certains points.
Au travers des interventions de M. Cambon et des orateurs qui se sont succédé, auxquelles j’apporterai une réponse commune, j’ai relevé trois questions principales : le risque d’isolement, le risque d’enlisement et le problème du développement.
S’agissant de l’isolement, la France agit, pour les raisons d’urgence qui ont été rappelées, avec les seuls Maliens. Plusieurs d’entre vous ont souligné que l’armée malienne, pour le moment, était faible. Est-ce à dire que nous allons continuer ainsi ? Pas du tout !
Nous sommes actuellement dans la première phase, celle de l’urgence. Dans une deuxième phase, le plus rapidement possible, nous souhaitons – et nous y travaillons ! – être rejoints par d’autres forces, parmi lesquelles la Mission internationale de soutien au Mali, la MISMA, dont je tiens à souligner – il y a parfois confusion sur ce point – qu’elle sera essentiellement composée de troupes africaines, mais pas seulement. La résolution 2085 adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies donne en effet une perspective plus large. Puis viendront, comme nous en aurons la confirmation demain, les militaires chargés d’assurer la formation des troupes maliennes et la sécurisation des formateurs de ces troupes.
Nous ne pouvons certes forcer personne, mais, tout en espérant que la conscience universelle existe, elle qui permet de passer de la conscience à l’action, nous ferons en sorte que d’autres forces, en provenance de différents pays, viennent nous aider.
Il est vrai que nous sommes au premier rang, même si les Maliens sont les initiateurs de cette intervention, mais il faut très vite une seconde phase, afin que nous puissions bénéficier de nombreux appuis.
Tels sont les faits.
Sur le plan diplomatique, à présent, nous ne sommes évidemment pas isolés, c’est même le contraire : il est rare qu’une intervention militaire recueille un soutien international aussi unanime.
Ce soutien durera-t-il ? Je ne peux pas en préjuger, car ce genre de situation est toujours complexe. Quoi qu’il en soit, on ne peut parler l’isolement diplomatique.
Quant à l’isolement militaire, il prendra fin lorsque les militaires français et maliens seront rejoints par d’autres forces, lors d’une deuxième phase qui doit intervenir, je le répète, le plus rapidement possible.
Pour ce qui est de l’enlisement, puisque certains d’entre vous ont prononcé le mot, c’est effectivement une menace, et il faut tout faire pour éviter qu’elle ne devienne réalité. C’est la raison pour laquelle les objectifs de l’opération ont été précisés par le Président de la République, et réitérés par le ministre de la défense et par moi-même.
De ce point de vue, je souhaite apporter une précision. Le fait de définir ces buts, notamment la défense de l’intégrité du Mali et l’organisation d’élections, ne signifie pas, dans notre esprit, que les troupes françaises devront rester sur place, dans les dispositions présentes, jusqu’au « bout du bout » du processus.
Nous sommes présents au Mali, en première ligne, parce qu’il y a urgence, et nous allons apporter tout notre soutien à ce pays ; mais il faut très vite que d’autres relais, notamment politiques, interviennent. Notre présence, que justifient bel et bien ces objectifs, n’est pas subordonnée à leur réalisation totale. J’espère, disant cela, être suffisamment clair.
Mais certains ont parlé de développement. Évitons les faux débats entre nous, mesdames, messieurs les sénateurs.
Bien évidemment, le sous-développement est une catastrophe absolue. À cet égard, je tiens à faire observer à ceux qui ont rendu hommage à M. Canfin, excellent ministre qui travaille à mes côtés, que, ce faisant, ils ont rendu hommage au Gouvernement.