Intervention de Fabienne Keller

Réunion du 23 janvier 2013 à 14h30
Débat sur les nouvelles menaces des maladies infectieuses émergentes

Photo de Fabienne KellerFabienne Keller :

… en définissant les priorités de la recherche sur les maladies infectieuses, ces priorités ne pouvant relever de la seule décision des industriels de la santé. Sur ce point, par exemple, nous sommes très mal outillés pour lutter contre la tuberculose, parce que pendant longtemps cette maladie n’a plus concerné que les pays du Sud, et non les pays solvables ; nous avons ainsi pris plus de dix ans de retard en matière de prévention.

J’ai mené ce travail de réflexion et d’enquête avec une équipe restreinte, mais j’ai pu compter sur l’aide désintéressée et très efficace des chercheurs, des praticiens, des universitaires des principales disciplines concernées, à qui je renouvelle l’expression de ma gratitude. Je salue d’ailleurs la présence dans nos tribunes du professeur Catherine Leport, qui dirige un groupe de travail sur ce sujet au sein du Haut Conseil de la santé publique.

Je suis consciente que ce travail reste très en deçà de ce que pourrait être un exercice national de prospective mettant en relation tous les métiers et toutes les professions concernés avant que ne survienne une nouvelle pandémie.

C’est à ce type d’exercice que se sont livrés les Britanniques en 2002, avec l’appui d’environ trois cents spécialistes réunis autour d’une dizaine de thèmes centraux. C’est un exercice assez comparable que les États-Unis réalisent systématiquement chaque année. C’est pourquoi, madame la ministre, je me permets de plaider auprès de vous pour que notre pays s’engage dans la même voie.

Coordonnés par une équipe restreinte pluridisciplinaire, les représentants de toutes les professions concernées apprendraient d’abord à se connaître, voire à se respecter, à échanger leurs pratiques et à développer des réflexes communs. Je pense aux professions de la santé, bien sûr – non seulement publiques, mais aussi privées, à commencer par la médecine de ville –, ainsi qu’à celles de la sécurité, de la communication, des transports – de nombreux agents pathogènes voyagent avec les marchandises –, des collectivités territoriales, de l’enseignement, du tourisme.

Ces représentants des professions se concerteraient, au sein de plusieurs groupes de travail, sur quelques exercices de simulation, par exemple d’un retour du H1N1, avec peut-être des variantes en termes de létalité ou de gravité de la maladie, ou du développement du chikungunya dans le sud-ouest de la France. Ils pourraient également travailler sur des thématiques transversales, comme l’usage des réseaux sociaux en phase épidémique, les règles de la communication de crise, la médecine des voyages, notamment pour les destinations les plus à risques, l’interaction entre la santé humaine et la santé animale. À cet égard, je voudrais rendre hommage aux compétences existant aujourd’hui, notamment à l’INRA, en matière de santé animale.

Je forme le vœu que cette proposition d’instaurer un exercice de prospective, souhaité également, au mois de décembre dernier, en conclusion du séminaire du Val-de-Grâce, qui a été créé sur l’initiative de spécialistes des maladies infectieuses émergentes et regroupe les agences sanitaires françaises et de nombreux autres partenaires d’autres professions, reçoive un accueil favorable de la part du Gouvernement.

Les moyens à mettre en œuvre pour réaliser cet exercice sont modestes et ils permettraient sans doute d’éviter dans le futur des dépenses et, surtout, des dégâts humains qui risquent d’être considérables en l’absence d’anticipation d’un événement hélas prévisible.

Je ne doute pas que vous aurez à cœur, madame la ministre, de nous apporter, surtout d’apporter à nos concitoyens, des assurances sur ce point. §

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