Quand l'OCDE s'inquiète au sujet des Beps, cela vaut pour l'ensemble des multinationales, pas seulement celles de l'économie numérique. Le tax planning et la localisation des bénéfices dans les territoires à faible fiscalité est certes facilité, dans l'économie numérique, par le poids des actifs immatériels. En outre, je le répète, ces entreprises jeunes ont été organisées dès l'origine, du fait notamment de leur financement par le capital risque, pour l'optimisation fiscale. Mais d'autres secteurs pratiquent également l'évaporation des bases d'imposition. Si la Grande-Bretagne peut taxer Starbucks, c'est parce que l'entreprise a des établissements stables. Si les bénéfices fondent, c'est à cause de redevances liées aux actifs incorporels et comptabilisées en charges déductibles. Avec les entreprises de l'économie numérique, le point d'entrée que constitue l'établissement stable n'existe pas, ce qui constitue une difficulté supplémentaire. Je partage votre analyse sur la nécessité d'éviter de créer de multiples taxes sectorielles. En matière de fiscalité, rien ne vaut l'IS : c'est l'impôt synthétique par excellence.
Vous avez raison sur l'harmonisation, elle est insuffisante. Mais la TVA et l'IS sont deux choses différentes. Pour la TVA, le principe est acquis pour 2015 avec une mise en oeuvre réelle à partir de 2019. En revanche, il n'a jamais été question d'harmonisation de l'IS au niveau européen. L'Union européenne a une compétence en matière de coordination des régimes fiscaux nationaux, mais pas plus. Il y a quelques initiatives mais les Etats ne sont pas d'accord sur les critères de répartition. Des initiatives comme celle de l'assiette commune consolidée de l'impôt sur les bénéfices restent très marquées par les modèles économiques traditionnels. Dès lors, une négociation autonome en matière numérique serait sans doute préférable.