Intervention de Jean-Yves Pineau

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 12 décembre 2012 : 1ère réunion
Atelier de prospective : quel avenir pour nos campagnes

Jean-Yves Pineau :

Je suis directeur du Collectif Ville Campagne, association nationale basée à Limoges et créée en 1995. Je suis au contact quotidien de locaux, d'élus et de techniciens qui veulent vivre en ruralité.

Mes propos sont issus de travaux de réflexion et de réunions d'acteurs autour de ces questions d'attractivité et de politiques d'accueil.

Ces questions sont d'abord d'ordre politique et de société. En référence à Laurent Davezies, je dirais qu'il est important de renouer les destins des territoires de la République si nous souhaitons être encore capables dans quelques années de parler de République. Il s'agit là d'un sujet urgent. Je m'adresse aux sénateurs.

J'aimerais prendre par ailleurs le contre-pied de ce qui s'est dit cet après-midi. J'ai entendu que le fait urbain a gagné. Selon moi, c'est le fait rural qui a véritablement gagné. Les urbanistes les plus en pointe ont inventé le concept de ville nature. Lorsque la ville s'est créée, elle s'est protégée de la nature qui était considérée comme hostile. L'association des maires de France nous rappelle que 100 % des Français vivent sous influence rurale, que ce soit en termes d'alimentation, d'aménagement de l'espace ou de cadre paysager.

Je cite ici « trois bonnes raisons de désespérer » :

 · Le développement local est mort. Qui met au coeur de son activité le développement local ?

 · Il est certes nécessaire de décentraliser mais il serait dommage de devoir par la suite recentraliser à des niveaux régionaux. Par ailleurs, qu'en est-il de la représentation politique et citoyenne dans de futures collectivités territoriales qui risquent demain de poser des questions de compétence, d'organisation et d'impulsion des dynamiques entre métropoles, départements, régions et EPCI ?

 · Si nous continuons de raisonner via un modèle bientôt épuisé, fondé sur une énergie peu coûteuse, sur l'exploitation des ressources naturelles et la concentration des moyens, je ne conçois pas de quelle manière nous pouvons élaborer des politiques. Il me semble nécessaire de changer de paradigme et de mode de lecture.

Pour résumer, je dirais qu'il existe trois chantiers :

 · Comment mettre en oeuvre des politiques qui visent à construire des écosystèmes territoriaux ouverts et reliés ?

 · Comment accompagner la transition écologique des territoires, notamment énergétique ?

 · Il me semble urgent et crucial de mettre en oeuvre la question de la circulation de l'innovation sur les territoires auprès des citoyens. Une montée en compétence et en connaissance est nécessaire pour réfléchir sur les causes de cette crise et trouver des issues de sortie.

Les Français nous disent qu'aujourd'hui les territoires qualifient la ville. Or, le débat porte actuellement davantage sur la ville qualifiant les territoires, même si les citoyens apportent la preuve contraire chaque jour. Par ailleurs, nous nous situons dans une mise en tension très forte des territoires de vie avec les territoires administrés. Il me semble nécessaire de dépasser les territoires car ces derniers sont dépassés par les acteurs économiques et les citoyens. Où se situent donc les cadres de coopération interterritoriaux ? Ces cadres restent à construire.

Débat

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