Si l’on regarde hors de nos frontières, en Espagne comme en Suède, on constate que le loup peut, dans ces deux pays, faire l’objet d’une régulation en fonction de ses effectifs et des atteintes à la faune et aux troupeaux dont il est responsable.
En Suède, il existe de facto une espèce de plan de chasse. En Espagne, les chasseurs peuvent obtenir une licence de tir dans les zones où le loup a été constaté en surabondance, le produit de cette licence étant affecté à la compensation des dommages en faveur des éleveurs.
Je signale, par ailleurs, que la Fédération nationale des chasseurs, la FNC, dans le cadre du programme Médialoup, a analysé précisément le statut et les pratiques de gestion du loup en Europe. Ses préconisations seront bientôt présentées publiquement, le 7 février prochain. Dommage que nous n’ayons pas eu connaissance de ces éléments d’information, qui auraient pu enrichir utilement le débat d’aujourd’hui !
Pour ce qui me concerne, je pense que le statut d’espèce sauvage du loup ne saurait nous faire perdre de vue une évidence : dans nos pays fortement peuplés et abritant un élevage répandu jusqu’en moyenne montagne, le loup doit faire l’objet d’une gestion. Que cette gestion soit avisée, c’est évident, mais qu’elle soit refusée au nom d’une idéologie sans support scientifique, voilà ce que j’ai du mal à accepter.
Cette gestion et cette régulation du loup pourraient reposer sur quelques principes simples.
Il faut exprimer de façon concrète et explicite, dans un plan national d’action sur le loup, le ou les objectifs de la politique du loup en France. Combien de loups veut-on dans un pays aussi peuplé et aménagé que la France ? Où accepte-t-on le loup ? Quels sont les scénarios de recolonisation ?
Il faut prendre en compte la prédation sur les troupeaux, bien sûr, mais aussi sur d’autres espèces sauvages sensibles, telles que le chevreuil ou le mouflon. Ce dernier est en train de disparaître dans certains secteurs, car, contrairement au chamois, qui se sauve rapidement, le mouflon pense qu’il peut faire face au loup. Résultat : il disparaît totalement dans certains secteurs !
Il faut rechercher l’acceptation locale des éleveurs, des élus, des habitants, seul gage de pérennité des efforts entrepris, par tout un ensemble de mesures adaptées.
Il faut associer les chasseurs aux projets de conservation et de suivi du loup, INTERREG, LIFE, DREAL. C’est un gage d’efficacité. Néanmoins, à l’évidence, il ne faut pas remettre en question leur participation à l’indemnisation des dégâts.
Il faut définir, vous avez été plusieurs à le dire, des aires géographiques pertinentes, ce qu’envisagent les auteurs de la présente proposition de loi. Il faut intégrer, comme dans certains pays d’Europ, une gestion adaptative et différenciée de la population par grands massifs, et non globalement, au niveau national. Il faut fixer des objectifs et des quotas de prélèvements pour les Alpes du Nord, pour les Alpes du Sud, pour les Pyrénées, pour le Massif central et pour le massif jurassien-vosgien.
Il faut intégrer, enfin, dans le plan national d’action, les lignes directrices et les principes européens sur la gestion des grands prédateurs en Europe, tels qu’édictés par le Conseil de l’Europe, par exemple pour la compatibilité de la chasse – locale ou de tourisme – et du développement de l’espèce, comme dans d’autres pays d’Europe.
Mes chers collègues, il me semble tout à fait possible de donner une place au loup dans notre pays, je suis même tenté de dire toute sa place, mais rien que sa place. Cela exige simplement de refuser l’idéologie pour privilégier la recherche et le respect du « local ».
C’est dans cette perspective que la création de zones d’exclusion pour les loups trouve toute sa justification. C’est un instrument, un outil parmi d’autres, qui peut nous permettre de progresser. Je suis donc tout à fait prêt à voter cette proposition de loi pour manifester mon soutien aux principes qui l’animent.
Je me demande, toutefois, si, ce faisant, nous n’aurions pas traité qu’une partie du problème seulement. Le loup est un animal extraordinaire, fascinant à bien des égards, qui mérite peut-être plus et mieux. La suite des débats parlementaires et la prise en compte des préconisations à venir, notamment de la FNC, nous permettront sans nul doute de progresser sur cette voie.
Dans le même temps, nous aurons aussi à réfléchir sur le statut de l’animal, qu’il soit sauvage, domestique ou d’élevage. C’est un sujet considérable dont le Saint-Hubert Club de France, dans son colloque organisé lundi dernier ici même, au Sénat, nous a montré toutes les facettes avant de nous indiquer un certain nombre de pistes de réflexion. Peut-être aurons-nous le temps de revenir sur ce sujet ? C’est en tout cas ce que je souhaite.
Mes chers collègues, comme vient de le rappeler Charles Revet, le groupe UMP votera cette proposition de loi. Nous demanderons qu’elle soit mise aux voix par scrutin public, monsieur le président, car il faut que les positions de chacun soient claires !