Hors service de la dette et des pensions, la norme « zéro valeur » concerne l'ensemble de la dépense budgétaire, alors même que celle-ci peut évoluer indépendamment des décisions des autorités françaises : si un accord était décidé demain ou après-demain au Conseil européen, prévoyant une augmentation de la contribution française, il faudrait trouver une économie correspondante.
Un contentieux était connu, à défaut d'avoir été anticipé : le précompte mobilier. En revanche, aucun parlementaire n'était averti de celui qui concerne les OPCVM - je ne suis même pas certain que tous les membres du gouvernement précédent en aient eu connaissance. Ce fut une découverte très désagréable. Pour des raisons de procédure nous n'avons pas eu à dépenser 1,5 milliard d'euros en 2012, mais il faudra le faire en 2013 : il est clair que cela complique l'exercice budgétaire. Le chiffre global que vous avez donné est sans doute le bon, mais nous n'aurons pas à tout débourser en une fois : cela s'étalera au fur et à mesure de la constitution des dossiers. Nous avons proposé un modèle unique de confection de dossier afin de faciliter l'examen des demandes de remboursement. Ce contentieux coûtera cher, car les intérêts de retard seront lourds : ils datent pour certains de 2005-2006. On a trop repoussé l'obstacle, il faut à présent le franchir. Il y a un troisième contentieux, au sujet de la taxe sur les fournisseurs d'accès internet. Les conditions dans lesquelles cette taxe fut instaurée ne permettent pas d'avoir beaucoup d'optimisme sur son sort : tout indique qu'elle sera jugée incompatible avec la réglementation communautaire. Nous perdrons alors la recette, et il faudra de surcroît rembourser ceux qui ont été taxés. Cette taxe était censée compenser, pour France Télévision, l'arrêt de la publicité après un certain horaire. Par quoi remplacer cette recette ? Comment trouver les ressources pour rembourser ceux qui doivent l'être ? Une trentaine d'autres contentieux existent, parfois en matière fiscale : j'ai de laborieuses discussions avec le Commissaire européen chargé de la fiscalité. La France ne peut espérer les gagner tous, il faut donc faire la part du feu, privilégier ceux qui nous tiennent à coeur, comme la spécificité fiscale corse ou le taux de TVA réduit sur le livre électronique, et s'efforcer de trouver un compromis sur d'autres avec le Commissaire, sous peine de voir les actes de droit national être déférés devant la Cour de justice pour l'ensemble de ces contentieux, avec le risque de les perdre tous.
S'agissant des militaires, le montant des soldes a été manifestement sous-estimé, pour des raisons que j'ignore, mais sur lesquelles se penche actuellement une mission conjointe de l'inspection des finances et du ministère de la défense. Le système Louvois chargé de régler la paie s'est par ailleurs avéré déficient, les militaires n'ayant soit rien reçu, soit perçu un montant inférieur à ce qui leur était dû. Ce système a sans doute été très mal conçu, malgré son coût ; il est prématuré d'en parler avant les conclusions du rapport réalisé par la Défense et Bercy.
Le rendement de la TTF est effectivement décevant. Nous avons doublé le taux afin de garantir le rendement estimé : même ainsi, nous n'y parvenons pas. La relative atonie des marchés financiers ne peut expliquer à elle seule cette faiblesse. J'ajoute que certains contribuables non résidents ne la paient pas. C'est le cas en particulier des résidents d'Amérique du Nord : l'administration américaine estime en effet qu'il s'agit d'une taxe bénéficiant de l'extraterritorialité, et conseille donc vivement à ses ressortissants de ne pas la payer.
Les chiffres qui ont circulé sur le coût de la censure du Conseil constitutionnel me semblent surestimés. Sur les plus-values, la censure n'a pas touché la mesure essentielle, qui est la suppression de l'abattement forfaitaire de 1 525 euros pour une personne seule, et du double pour un couple. Or, c'est cette suppression qui générait la quasi-totalité des recettes. La censure d'une autre disposition a été sans conséquence pour les prévisions de recettes, puisque, faute de pouvoir les estimer, nous n'avions pas inscrit de recettes correspondantes au budget. Le Conseil a censuré l'article 40, relatif à l'Agence de gestion et de recensement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC), pour des raisons de forme : nous lui trouverons une place dans un autre véhicule législatif au cours de l'année, et la recette de 126 millions d'euros qui correspond sera au rendez-vous. Ainsi, le coût de cette censure a pu être important sur le plan politique, mais sur le plan budgétaire il est assez marginal : sur 20 milliards d'euros de recettes nouvelles, la censure porte sur 500 millions d'euros.