Intervention de Mireille Schurch

Réunion du 12 février 2013 à 14h30
Diverses dispositions en matière d'infrastructures et de services de transports — Vote sur l'ensemble

Photo de Mireille SchurchMireille Schurch :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de la discussion de ce projet de loi, qui permet de marquer une étape importante dans le cadre du report modal et de la transition écologique. Le présent texte permet de rendre concrets les engagements du Grenelle de l’environnement et, donc, la mise en œuvre de l’écotaxe poids lourds.

Au regard des différents échanges que nous avons eus depuis hier, nous avons pu constater qu’une telle démarche, que nous imaginions consensuelle, n’était pas si simple et que, en tout état de cause, elle suscitait un certain nombre d’interrogations, voire de résistances. Les divers amendements déposés par l’opposition visaient ainsi clairement à réduire le périmètre de l’écotaxe et, par conséquent, son rendement et sa portée, bref à la vider de toute substance.

Parallèlement, un certain nombre de nos collègues ont évoqué leur crainte que sa mise en œuvre ne déstabilise les régions rurales. Une telle émotion est tout à fait compréhensible. Pourtant, même si nous sommes conscients que cette taxe va peser plus lourdement sur certains secteurs d’activités industrielles déjà largement pénalisés par la crise, nous estimons que la compétitivité des entreprises, notamment en zone rurale, passe principalement par la lutte contre la désindustrialisation de nos territoires, ce qui suppose une autre ambition politique et, sans doute, un autre projet de loi.

Au regard de l’objectif de réintégration des coûts externes de la route, et quand bien même il n’y aurait pas de solution alternative pour les chargeurs, il nous semble que le niveau d’imposition reste équilibré et que le mode de répercussion choisi permet d’apporter de la lisibilité.

Par ailleurs, le rendement de l’écotaxe va permettre de financer l’AFITF et, donc, le développement d’infrastructures de transports au sein même des territoires enclavés, ces zones rurales qui souffrent depuis tant d’année du désengagement de l’État des territoires.

L’écotaxe financera également la remise en état du réseau routier, puisqu’une partie de son rendement est affectée aux collectivités chargées des infrastructures routières. Nous serons, à ce titre, extrêmement vigilants quant aux choix de financement qui seront faits en termes d’infrastructures nouvelles, qu’elles soient ferrées ou routières, afin que celles-ci participent à un maillage fin en faveur de l’aménagement du territoire et de la mobilité de tous, notamment dans les zones les plus enclavées.

En outre, permettez-moi de vous rappeler, comme l’a fait hier M. le ministre, que le réseau soumis à l’écotaxe représente simplement 0, 5 % du réseau local total. Ainsi, le transport routier de proximité ne serait que faiblement impacté, ce qui semble à ce stade logique, puisque ce sont les longs transports routiers, ceux pour lesquels le report modal est possible, qui sont principalement ciblés.

De manière circonstanciée, permettez-moi de rapprocher la mise en œuvre de l’écotaxe du scandale lié à la circulation de la viande de cheval, qui défraie la chronique. Je souhaite ici vous faire remarquer, mes chers collègues, que si cette taxe existait déjà, elle aurait permis deux choses : premièrement, opérer une traçabilité des camions, ce qui aurait été utile pour reconstituer les faits ; deuxièmement, décourager, en les taxant, les circulations inutiles et favoriser par là même les circuits courts, conformément à l’objet pour lequel elle est aujourd’hui mise en œuvre.

Nous vous l’avons dit, ce qui nous interpelle dans la mise en place de cette taxe, c’est bien le contrat passé avec une société privée, qui trouve là une formidable rémunération, à hauteur de 280 millions d’euros par an, ce qui ampute clairement les ressources normalement destinées à l’AFITF. Vous serez, monsieur le ministre, vigilant et vérifierez avec soin l’efficacité de cette société, ce qui est bien le moins.

Nous sommes favorables au suivi prévu dans le texte, suivi amélioré à la suite de son examen en séance, afin de détecter d’éventuels dysfonctionnements qui auraient pu échapper à notre attention.

Mes chers collègues, le report modal, puisque tel est l’objectif premier de ce projet de loi, ne peut résider uniquement dans l’instauration d’une écotaxe, aussi juste soit-elle.

Pour qu’il puisse réellement s’opérer, encore faut-il que les conditions d’accès au rail soient satisfaisantes, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui, notamment au regard de l’état du fret ferroviaire de proximité.

Nous en avons discuté, le report modal nécessite de revoir également les conditions sociales du transport routier.

Monsieur le ministre, vous avez annoncé une grande réforme ferroviaire et engagé la réunification de la famille ferroviaire. Nous espérons que la voix de la France sera entendue au sein des institutions européennes, pour permettre une telle évolution.

Par ailleurs, nous vous appelons à ne pas accepter la libéralisation des transports de voyageurs à l’horizon 2019 tant que l’harmonisation sociale n’est pas réalisée. Vous avez d’ailleurs affirmé votre volonté en ce sens.

Au regard de tous les éléments dont je viens de vous faire part, et parce que ce projet de loi témoigne de la volonté courageuse de rendre enfin la taxe poids lourds opérationnelle, notre vote sera bien évidemment favorable.

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