Intervention de Ronan Dantec

Réunion du 12 février 2013 à 14h30
Éco-participation pour les équipements électriques et électroniques ménagers — Adoption en procédure accélérée d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Ronan DantecRonan Dantec :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il va m’être assez facile de m’exprimer sur la présente proposition de loi puisque, voilà quelques semaines, comme plusieurs de mes collègues, notamment Gérard Miquel, auteur de ce texte, j’avais déposé, au nom du groupe écologiste, dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances rectificative, un amendement allant dans le même sens, lequel avait été adopté avant que la première partie ne soit rejetée par le Sénat.

Cette proposition de prorogation avait donc été, d’une certaine manière, une victime collatérale d’un débat plus général. J’ai cependant le sentiment qu’elle est moins menacée ce soir…

Par ailleurs, je me réjouis que la commission du développement durable ait adopté la présente proposition de loi à l’unanimité de ses membres, preuve que nous savons aussi reconnaître, au-delà de nos divergences, les enjeux, en termes d’emploi, que représente réellement la filière du recyclage des déchets électroniques.

D’autres l’ont indiqué avant moi, la prorogation jusqu’en 2020 du mécanisme d’éco-participation répercutée à l’identique et affichée pour les équipements électriques et électroniques ménagers est vitale pour cette filière industrielle encore jeune, car elle permet de sécuriser son financement.

Sur le plan environnemental, les écologistes soutiennent fortement le mécanisme d’éco-participation, fondé sur le principe « pollueur-payeur », et, par voie de conséquence, la responsabilisation des metteurs sur le marché en matière de collecte et de valorisation des déchets électriques et électroniques ménagers particulièrement polluants, et ce d’autant plus que, outre les DEEE historiques, la consommation croissante de certains produits issues des hautes technologies, comme les smartphones et les tablettes, laisse entrevoir un gisement très important de déchets dans les prochaines années.

Soutenir la filière des DEEE, c’est également lutter contre l’exportation illégale de déchets électroniques. Malgré la convention de Bâle, qui interdit la circulation de déchets dangereux depuis 1992, de nombreux pays industrialisés continuent d’exporter illégalement leurs déchets. Des éco-organismes opérationnels, tels que ceux qui ont été créés en France, constituent les meilleures garanties et les moyens les plus efficaces pour contrôler ces flux de DEEE. La question, importante, du trafic de ce type de déchets illustre l’importance du contrôle des flux, donc des moyens mis à disposition par l’État, notamment le nombre d’agents présents dans les ports. C’est en enjeu majeur.

Autre atout de la filière sur lequel il est essentiel d’insister : sa dimension sociale. La filière génère en effet un grand nombre d’emplois d’insertion, dont a besoin notre pays. Bien que Mme la ministre ait déjà cité les chiffres, je rappellerai que, sur les 3 556 employés de la filière, 650 sont en insertion et 460 sont compagnons d’Emmaüs.

On le constate bien, la prorogation du mécanisme d’éco-participation, qui permet d’en garantir le financement, est un enjeu majeur pour consolider une filière à haute qualité environnementale et à fort gisement d’emplois.

Gérard Miquel l’a souligné, les objectifs européens deviendront de plus en plus ambitieux dans les années qui viennent, avec l’objectif d’une collecte de 14 kilogrammes de DEEE par an et par habitant à l’horizon de 2019, soit un doublement par rapport à la quantité actuelle. Pour que ces objectifs soient respectés, le mécanisme doit être conforté et les éco-organismes devront aussi ajuster leurs barèmes de façon que l’éco-participation soit à la hauteur des coûts.

La rationalité économique rejoint ici l’exigence environnementale, puisque l’enjeu est bien de recycler et de réemployer au maximum les ressources nécessaires à la fabrication des équipements électriques, dont certaines sont coûteuses et vouées à s’épuiser.

Et n’oublions pas non plus l’enjeu véritablement social de la filière. Nous avons tous en mémoire le scandale de l’exploitation du coltan au Congo. Récupérer, recycler, c’est aussi répondre à ce défi.

Je souhaite maintenant revenir sur l’organisation d’autres filières, qu’a évoquée Mme la ministre. Au moment où l’État réduit son budget et les dotations générales qu’il octroie aux collectivités locales, permettre à certaines filières de déchets de s’autofinancer, et donc aux collectivités locales de supporter de moindres coûts, ce qui est un enjeu financier majeur, constituerait un signal fort.

Je note aussi que les associations de consommateurs soutiennent le mécanisme de répercussion à l’identique et d’affichage, en raison de sa transparence et de son caractère anti-inflationniste : dans une enquête réalisée en 2012, l’association CLCV relève que 85 % des consommateurs interrogés sont favorables au maintien de l’affichage du montant de l’éco-contribution de façon séparée du prix du produit.

Je souhaite toutefois attirer votre attention, mes chers collègues, sur les fortes marges de progression qui sont sans aucun doute les nôtres.

Je citerai d’abord le respect de la loi. On observe, en effet, que certains sites de vente en ligne – je me garderai d’en citer – se soustraient à leurs obligations en matière d’affichage de l’éco-participation. Outre qu’elle méprise l’exigence de transparence à l’égard du consommateur, cette pratique illégale nuit évidemment aux filières, notamment à celles qui se mettent en place.

Mais consolider les filières de recyclage n’est pas suffisant : nous devons simultanément jouer sur l’amont. C’est toute la filière industrielle qui doit aujourd’hui repenser son modèle économique, et ce dès la conception des produits. Les écologistes sont très attachés, par exemple, au développement de l’éco-conception et à l’augmentation de la durée légale de garantie des produits, afin de lutter contre l’obsolescence programmée, c’est-à-dire la désuétude planifiée des produits afin d’obliger à renouveler l’achat. Qui n’a pas eu un smartphone en fin de vie précisément à quelques jours de l’expiration de l’abonnement ?...

Ce sont bien nos modes de production et de consommation dans leur ensemble qu’il faut réinventer, tout en associant systématiquement le consommateur.

Madame la ministre, j’ai noté vos références au développement de l’économie circulaire. Les membres du groupe écologiste constatent avec plaisir que certaines idées progressent aujourd'hui très vite !

Ils attachent donc beaucoup d’importance au fait que le mécanisme d’éco-participation fasse participer le consommateur à la politique de recyclage, en le sensibilisant à son acte de consommation. C’est bien la généralisation de comportements éco-responsables qui permettra d’atteindre les grands objectifs environnementaux que nous défendons.

Bien évidemment, le groupe écologiste soutiendra la présente proposition de loi.

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