Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, voilà plusieurs mois que la France développe une politique internationale majeure. Les conflits qui secouent le monde, qui l’inquiètent, le déstabilisent, ne sont plus isolés : ils nous concernent tous.
La politique étrangère de notre pays, celle du Président de la République, la vôtre, monsieur le ministre, est cohérente et s’inscrit dans la longue tradition de la diplomatie française et de son réseau, le deuxième au monde, qui soutient les principes universels fondant les droits de l’homme et du citoyen.
La décision du Président de la République d’intervenir militairement au Mali, à la suite d’une demande du Président malien, a évité à ce pays de sombrer dans l’intégrisme. La rapidité de cette décision et celle de notre intervention ont été saluées par la plupart des pays et redonnent à la France une position internationale reconnue dans le monde entier.
Le monde a bien changé. La multiplicité des blocs politiques, des influences, des religions a succédé aux hégémonies que nous avons connues. La pensée politique et sa traduction en action doivent être différentes ; elles doivent être multipolaires et prendre en compte les grands défis auxquels nous sommes déjà confrontés et qui prendront de plus en plus d’importance dans l’avenir : ceux de l’économie, de la démographie, de l’écologie.
La France, en quelques mois, a déjà orienté sa politique, mais il faut impérativement qu’elle se donne les moyens de réussir. Dans cette perspective, il est évident que l’économie sera le vecteur de notre présence, de notre influence.
Nous pouvons dès aujourd’hui, monsieur le ministre, mobiliser tous les moyens en notre possession.
J’évoquerai, tout d’abord, le rapport d’information que j’ai établi au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, intitulé « Pour une équipe France à l’expertise internationale ». Comme vous l’avez sûrement relevé, le titre de ce rapport reprenait la notion d’« équipe de France » que vous aviez développée le 29 septembre 2012, lors de la conférence des ambassadeurs, en affirmant avec fermeté que « nous avons besoin d’une diplomatie économique forte, active, réactive, efficace, à l’écoute de tous les acteurs économiques de l’équipe de France ».
Ce rapport met en évidence la concurrence entre de très nombreux opérateurs publics, sans clarifier le champ de compétences et les modèles économiques de chacun. L’offre publique française d’expertise à l’international apparaît fragmentée, dispersée et, de ce fait, d’une taille insuffisante pour faire face à la concurrence internationale.
Il y a urgence, précise le rapport, à réformer le dispositif afin de permettre aux acteurs d’atteindre la masse critique nécessaire pour remporter les appels d’offres multilatéraux. Les restrictions budgétaires provoqueront un affaiblissement des différents opérateurs publics français, qui les éloignera davantage du seuil de pertinence dans un environnement international de plus en plus concurrentiel, au sein d’un secteur qui représente un enjeu important en termes de solidarité et d’influence et d’un marché en croissance pour les acteurs publics et privés français.
La présence française doit s’exprimer et se développer en s’appuyant sur nos expertises internationales, comme je viens de l’indiquer, mais également sur l’Agence française de développement, qui constitue un relais important pour le renforcement des capacités de nos partenaires, ainsi que de l’influence de la France.
Je voudrais également évoquer devant vous, monsieur le ministre, le rôle important de nos représentations dans le monde, de notre réseau diplomatique et, bien entendu, de nos ambassades pour défendre non seulement notre culture, nos solidarités, nos valeurs, mais aussi nos intérêts économiques, en soutenant, en encourageant, en aidant nos entreprises à s’implanter, à vendre dans les pays où nous sommes représentés.
Toutes nos entreprises doivent pouvoir compter sur nos diplomates, nos conseillers en poste à l’étranger pour promouvoir nos savoir-faire, nos productions, en gardant toujours à l’esprit que notre influence sera d’autant plus grande que la force de notre économie sera reconnue dans ces pays.
Vous avez créé, au sein du ministère des affaires étrangères, une direction des entreprises et de l’économie internationale. On ne peut que saluer une telle décision, monsieur le ministre. Vous ajoutez ainsi à votre ministère de la diplomatie une facette économique devenue incontournable.
Ces hommes et ces femmes placés sous votre autorité devront s’imprégner de leurs nouvelles responsabilités, tout comme les personnels en poste à l’étranger. Ils ne devront jamais oublier, monsieur le ministre, que notre économie, nos entreprises sont indispensables à notre rayonnement, comme le furent nos écrivains, nos philosophes, nos mathématiciens ou nos artistes.
La compétition économique s’est développée, les pays émergents deviennent des acteurs majeurs : à leurs compétences, à la qualité de leurs produits, à l’ attractivité de leurs prix s’ajoute précisément leur caractère de pays émergents, qui leur donne une image nouvelle dans les pays en voie de développement, lesquels voient en eux la possibilité de se développer sans avoir recours à tous les modèles que les pays industrialisés avaient jusqu’alors proposés.
Il est urgent, monsieur le ministre, que l’équipe « France » bouscule nos habitudes. À la diplomatie française, reconnue, doit s’adosser la diplomatie économique que vous promouvez, monsieur le ministre. Je souhaite que vous réussissiez, car la réussite de la France en dépend. §