Intervention de Jean-Claude Andreini

Commission des affaires économiques — Réunion du 26 février 2013 : 1ère réunion
Avenir de la production d'électricité par géothermie en france — Table ronde

Jean-Claude Andreini :

Le secteur de la géothermie représentait, en 2010, 0,2 million de tonnes d'équivalent pétrole (Mtep) et devrait en représenter 1,3 millions en 2020, soit l'horizon du Grenelle de l'environnement. Cela correspond à une multiplication par six de la production actuelle : le secteur pèse peu aujourd'hui mais devrait croître beaucoup, plus que les autres, au cours des prochaines années ; il a donc un fort potentiel.

La géothermie peut se diviser en trois grands ensembles, en fonction du niveau de profondeur : au niveau peu profond, la géothermie sur pompes à chaleur individuelles et collectives permet d'exploiter l'air ou l'eau ; à un niveau un peu plus profond, la géothermie profonde sur réseaux offre des niveaux de chaleur plus élevés ; enfin, la géothermie beaucoup plus profonde, qui est en mesure de produire de l'électricité. Les deux premières formes de géothermie sont très dispersées : elles peuvent être mises en oeuvre sur tous les territoires, et permettent d'obtenir de la chaleur comme du froid. Nous avons donc tous, sous nos pieds, un potentiel facilement mobilisable en la matière, souvent méconnu. Il est pourtant source de nombreux emplois peu délocalisables. Des efforts ont déjà été réalisés pour développer ces formes de géothermie ; ils doivent être poursuivis. La troisième forme de géothermie, sur laquelle le débat d'aujourd'hui est focalisé, est plus lourde à mettre en oeuvre, et requiert une expertise et des compétences plus élevées, en géologie notamment. Elle nécessite des investissements lourds, déterminés par l'État. Elle est beaucoup moins répandue, puisque seuls deux sites la mettent en oeuvre aujourd'hui. Chacune de ces trois catégories de géothermie doit connaître une grande croissance dans les prochaines années. La géothermie électrique atteint aujourd'hui 16,5 mégawatts. L'objectif fixé pour 2020 s'élève à 80 mégawatts, soit une multiplication par cinq de la production actuelle ! Faire progresser la géothermie dans ces proportions est nécessaire pour respecter l'ambition du Grenelle.

S'agissant de la géothermie sur pompe à chaleur, elle peut prendre la forme de capteurs horizontaux, de sondes géothermiques verticales, ou de pompes à chaleur sur nappes ou sur aquifères, dans la maison individuelle ; de champs de sondes ou de fondations thermoactives, dans le petit collectif. La géothermie sur réseaux peut assurer le chauffage d'un quartier ou d'un ensemble d'immeubles d'habitat collectif.

Pour lever les freins au développement de la géothermie sur pompe à chaleur, la publication du décret d'application de l'article 66 de la loi Warsmann est indispensable - nous le rappelons de façon continue à la Ministre -, afin d'autoriser les forages à 200 mètres de profondeur. Ils sont aujourd'hui limités à 100 mètres de profondeur. Cette mesure dégagerait des sources d'énergie. Il est regrettable qu'elle prenne autant de temps. Cela fait plus d'un an que nous attendons ce décret.

Il faut également soutenir le transfert des appellations de qualité : dès qu'on progresse en profondeur, il faut faire de bons forages. Pour cela, il est nécessaire de développer les qualifications au sein des entreprises. Cet enjeu est de taille, afin d'éviter toute mauvaise utilisation du sous-sol. Nous sommes en train de travailler avec qualit'EnR pour mettre au point des qualifications.

Il est aussi nécessaire d'avoir une visibilité sur la durée des dispositifs d'incitation. La géothermie doit être placée au coeur du bâtiment neuf comme du bâtiment existant. Les freins psychologiques, comme ceux liés à la durée des opérations ou aux enjeux locaux, doivent être levés.

S'agissant de la géothermie sur réseaux, nous préconisons de doubler le fonds chaleur renouvelable, de réserver une suite rapide et favorable à l'appel à manifestations d'intérêt (AMI) pour les démonstrateurs, lancé par l'ADEME, ainsi que d'engager un nouvel AMI. La recherche et développement doivent continuer à se développer.

La géothermie électrique est quant à elle aujourd'hui limitée à deux sites. Il convient de multiplier ce chiffre en menant d'autres opérations lourdes. Nous devons aussi améliorer notre performance par la stimulation de nos systèmes. La technologie EGS (enhanced geothermal systems) doit être développée. Il faut également couvrir le risque géologique. Compte tenu de l'ampleur des opérations menées, il est nécessaire d'avoir des assurances. La géothermie électrique est une bonne solution pour les îles, afin d'en renforcer l'autonomie énergique.

La filière de la géothermie compte en France une centaine d'entreprises solides, d'après l'annuaire du SER. Toute la chaîne de valeur est incluse dans ce chiffre : ingénierie, sociétés de services, équipementiers... Nous sommes très bons, mais le marché national est encore insuffisamment développé pour accéder à l'export. Il ne s'agit pas d'un problème de qualification, car nous sommes à la hauteur, mais de développement.

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