Monsieur le Président, chers collègues, deux accords sur la mobilité des jeunes sont soumis à votre approbation : le premier signé le 1er décembre 2009 avec le Monténégro, le second, avec la Serbie, le 2 décembre de la même année.
Ces accords ont été ratifiés tant par la Serbie que par le Monténégro.
La vocation européenne de ces États, mais aussi la situation économique difficile qu'ils connaissent et qui pénalise tout particulièrement leur jeunesse, justifient pleinement que notre pays leur offre des facilités dans ce domaine.
Je vous rappelle qu'ils ont entamé un processus de rapprochement avec l'Union européenne et qu'après la conclusion d'accords de stabilisation et d'association, ils se sont vu reconnaître le statut de candidat depuis le 17 décembre 2010 pour le Monténégro, et depuis le 1er mars 2012 pour la Serbie.
Les accords de stabilisation et d'association prévoient une coopération en matière migratoire. Dans ce cadre, la dispense de visa pour les courts séjours dans la zone Schengen a été accordée à compter du 19 décembre 2009 à leurs citoyens.
En outre, des accords de réadmission ont été signés le 18 septembre 2007 entre l'Union européenne et les deux États concernés. Ces accords prévoient la faculté de conclure un protocole bilatéral d'application entre un État membre et chacun des États concernés. A ce jour la France a signé un protocole avec la Serbie le 18 novembre 2009 qui doit être ratifié. Il n'est pas prévu, pour le moment, de conclure un protocole d'application avec le Monténégro.
En termes statistiques, le nombre de titres de séjour supérieurs à 3 mois délivrés pour les ressortissants s'élèvent en 2012 à 28 pour le Monténégro et 415 pour la Serbie dont une petite moitié environ à des conjoints de Français.
La crise économique et financière a accentué les difficultés de ces pays. La Serbie est entrée en décroissance en 2012 avec une baisse de (- 1,5 %), le chômage touche 22,2 % de la population active en 2011. Le Monténégro a connu en 2012 une croissance de son PIB (0,6 %) et le taux de chômage s'élève à 11,3 %.
Le taux élevé de chômage chez les jeunes, tant en Serbie (46,4 %) qu'au Monténégro (37 %), les conduit à quitter leur pays pour chercher du travail à l'étranger. Les deux pays ont pris des mesures et lancé des réformes pour adapter leurs systèmes de formation mais sans retour de la croissance, ils auront des difficultés à pouvoir proposer un nombre d'emplois suffisants aux diplômés.
Outre les partenariats noués entre les établissements français d'enseignement supérieur et les établissements serbes et monténégrins, des actions de coopération dans l'esprit des accords signés, ont été développés. En 2011, 661 inscriptions d'étudiants serbes ont été enregistrées dans l'enseignement supérieur en France et 27 d'étudiants monténégrins.
La France dispose au sein de l'Institut Français d'un Espace Campus France que nous avons eu l'occasion de visiter lors d'une mission à Belgrade en avril 2012, avec mon collègue Jean Besson. Campus France travaille en étroite collaboration avec l'Ambassade de France au Monténégro pour développer les actions de promotion et la réalisation d'un premier salon des études en France à Podgorica en novembre 2012.
Le nombre de bousiers s'élèvent à 83 pour la Serbie (dont 64 bousiers du gouvernement français). Leurs nombres sont respectivement de 20 dont 18 pour le Monténégro.
Les deux accords reposent sur la distinction entre les étudiants, les stagiaires et les jeunes professionnels.
Les stipulations concernant les étudiants sont destinées aux jeunes ressortissants serbes ou monténégrins qui viennent finir leurs études et souhaitent compléter leur formation par une première expérience professionnelle en France.
Ils seront autorisés à exercer un emploi en relation avec leur formation, assorti d'une rémunération au moins égale à une fois et demie le SMIC mensuel.
Le jeune se verra délivrer par les autorités françaises un titre de séjour d'une durée de validité de douze mois. Au-delà, si le jeune exerce un emploi conforme à ces conditions ou a une promesse d'embauche pour un tel emploi, il pourra continuer à travailler en France, sans que soit prise en compte la situation de l'emploi.
Le résultat est donc potentiellement très intéressant mais les conditions de diplôme à remplir sont exigeantes. Le niveau du diplôme et celui du salaire montrent clairement que la France veut attirer de bons étudiants. Le retour dans le pays d'origine est mentionné, mais, une fois que le jeune a un travail en France et le titre de séjour lui permettant de l'occuper, rien ne l'oblige à rentrer alors que le droit commun est nettement plus contraignant.
Les accords ne prévoient pas la réciprocité.
S'agissant des stagiaires, l'accord passé avec la Serbie précise qu'il concerne les stages dans une entreprise ou un organisme public, sous couvert d'une convention d'une part, et d'autre part, les salariés qui travaillent dans une entreprise française installée dans leur pays ou dans une entreprise de ce pays liée par un partenariat à une entreprise française et qui viennent en France suivre un stage de formation. L'accord avec le Monténégro y ajoute les jeunes qui suivent un programme européen de formation professionnelle ou de coopération requérant un stage.
Dans les deux accords, le stagiaire obtient un visa de long séjour temporaire d'une durée de 3 à 12 mois.
En troisième lieu, les stipulations concernent les jeunes professionnels âgés de 18 à 35 ans, engagés ou entrant dans la vie active. Le but de leur séjour dans l'autre pays est d'améliorer leurs perspectives de carrière et approfondir leur connaissance de la société d'accueil grâce à une expérience de travail salarié dans une entreprise. Ils doivent être titulaires d'un diplôme correspondant à l'emploi qu'ils veulent occuper ou avoir une expérience professionnelle dans ce domaine. S'ils remplissent ces conditions, ils sont autorisés à occuper un emploi sans que soit prise en considération la situation de l'emploi. La durée autorisée de travail est de douze mois renouvelable une fois.
Chaque accord fixe le nombre maximal de bénéficiaires potentiels de ce dispositif pour chaque État partie : cent par an dans l'accord avec le Monténégro, et cinq cents par an dans l'accord avec la Serbie.
Les accords prévoient la réciprocité pour les jeunes professionnels français.
Les accords enfin prévoient diverses actions et fixent le montant d'une enveloppe globale qui y sera consacrée par la France sur trois ans : elle est de 150 000 euros au Monténégro et de 650 000 euros en Serbie.
Il s'agit d'actions de promotions des études en France, d'attribution de bourses et enfin de la mise en place de plateforme d'accès à des offres d'emploi dans les deux pays.
Ces dispositions ont d'ores et déjà été mises en oeuvre.
Campus France a reçu dès 2010 des subventions pour la gestion du programme de bourses sur la base de conventions signées avec le ministère de l'immigration, intégration, identité nationale et du développement solidaire
Les deux accords prévoient également que soient organisées des actions de promotion des échanges de jeunes professionnels mais leur mise en oeuvre semble plus difficile.
Enfin, seul l'accord avec le Monténégro comporte des stipulations relatives à l'immigration professionnelle. Elles concernent essentiellement la partie française et ne dépassent pas le cadre du droit commun. On peut dès lors douter de l'utilité de les introduire dans le texte de tels accords. C'est d'ailleurs, pour cette raison, que les autorités serbes n'ont pas souhaité de mesures particulières en ce domaine.
En conclusion, je voudrais faire quelques observations d'ordre général. Je déplore la lenteur du processus de ratification de ces accords. Signés les 1er et 2 décembre 2009, ils n'ont été déposés sur le bureau de l'Assemblée nationale que le 1er août 2011 (soit 19 mois après leur signature), inscrits à son ordre du jour en décembre et adopté le 9 février 2012, ils ne sont inscrits à l'ordre du jour du Sénat qu'en février 2013. Il est regrettable que les projets de loi ne puissent être déposés sur le bureau des assemblées rapidement après leur signature. La rédaction du dispositif du projet de loi ne paraît pas devoir prendre un temps aussi long, quant à l'étude d'impact, on peut espérer que l'ensemble des éléments est réunie avant la signature de l'accord et constitue un outil d'aide à la décision du ministre signataire.
Fort heureusement, cette lenteur n'a pas empêché leur mise en oeuvre partielle notamment les volets relatifs à la promotion des études et aux bourses, puisque des conventions ont été signées dès 2010 par le ministère de l'immigration, intégration, identité nationale et du développement solidaire avec Campus France. Pour autant, je m'interroge sur l'utilité de soumettre à l'approbation du Parlement des dispositions qui sont entrées en vigueur avant la promulgation des projets de loi de ratification. Que se passerait-il si nous rejetions ces projets de loi ?
Tout ceci milite pour que les accords soient soumis à ratification dans des délais plus rapides d'autant que la simplification de la procédure d'examen au Parlement constitue d'ores et déjà une facilité pour accélérer la procédure de ratification.
Sous réserve de ces observations, et ne souhaitant pas allonger à l'excès une procédure qui a déjà pris suffisamment de retard, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption par le Sénat des deux projets de loi et recommande leur examen en séance publique sous forme simplifiée.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte les deux projets de loi et propose leur examen sous forme simplifiée en séance publique.