Je vous demande beaucoup de compréhension en raison du contexte.
Le 18 janvier, le Sénat a rejeté ce projet de loi, mais a adopté à l'unanimité le projet de loi organique qui en tire les conséquences. Saisie du projet gouvernemental, l'Assemblée nationale en a conservé l'architecture générale et l'a enrichi, s'inspirant ou reprenant des amendements adoptés par notre Haute Assemblée, et adoptant trente articles additionnels.
La modernisation du scrutin cantonal passe notamment par le changement de dénomination du conseil général qui deviendrait un conseil départemental, par l'abrogation du conseiller territorial et par la mise en place d'un nouveau mode de scrutin, le scrutin binominal, avec deux candidats de sexe différent, élus au sein de cantons remodelés pour la première fois depuis deux siècles, et dont le nombre serait réduit de moitié. Ce mode de scrutin favoriserait la parité, dans un contexte où les femmes ne représentent que 13,5 % des élus dans les assemblées départementales.
Le 19 décembre dernier, notre commission a adopté des améliorations rédactionnelles ainsi que quelques novations, notamment l'amendement de Pierre-Yves Collombat prévoyant qu'en cas d'égalité de suffrages entre deux binômes, l'élection serait acquise par le binôme comportant le candidat le plus jeune. Notre commission n'a pas retenu le principe selon lequel la future carte cantonale devrait être calée sur celle des circonscriptions législatives et intercommunales, chacune ayant sa légitimité démocratique.
En séance publique, le Sénat n'a pas adopté l'article 2 relatif au mode de scrutin binominal. Avant le rejet du projet de loi, il a toutefois adopté le changement d'appellation du conseil général, l'abrogation du conseiller territorial, le renouvellement intégral des conseils départementaux tous les six ans, ainsi que la procédure applicable lorsque le nombre de conseillers départementaux non domiciliés dans le département est supérieur au quart de l'effectif du conseil départemental.
Le Sénat a également supprimé les articles 3 et 23 au motif que le remodelage des cantons mettrait fin à la proximité des conseillers départementaux avec leurs territoires et à la prise en compte des spécificités des territoires faiblement peuplés dans les politiques départementales. J'avais déposé un amendement, qui a été adopté à l'unanimité, pour inclure dans les dérogations aux principes encadrant le remodelage de la carte cantonale, les considérations tenant à la démographie, l'équilibre de l'aménagement du territoire ainsi qu'au nombre des communes. Ces dérogations devaient être fixées par un décret en Conseil d'État.
Pour préserver la cohérence de la réforme du régime électoral communal tout en facilitant la vie municipale, le Sénat s'en est tenu au seuil de 1 000 habitants pour l'application du scrutin proportionnel. Les modalités de candidature et de vote dans les communes de moins de 1 000 habitants ont été complétées pour préciser, d'une part, les modalités de publicité des candidatures et, d'autre part, pour interdire à un candidat de l'être dans plus d'une circonscription électorale.
En conséquence du principe de l'obligation de candidature, alors que les bulletins de vote incomplets et le panachage ont été maintenus dans les communes de moins de 1 000 habitants, les noms de non-candidats qui y seraient portés ne seraient pas décomptés lors du dépouillement du scrutin.
Le Sénat, qui a inversé le principe d'attribution du siège en cas d'égalité des suffrages au scrutin majoritaire en retenant le critère du plus jeune, a aligné le mandat municipal pris en compte au titre de la limitation du cumul des mandats, sur le seuil de 1 000 habitants.
Pour répondre aux difficultés de candidature, la commission des lois a diminué de deux unités l'effectif des conseils municipaux dans les plus petites communes, ce qui a parfois été mal compris. Le Sénat a appliqué un traitement similaire aux communes de 500 à 999 habitants en conservant aux communes concernées, dans tous les cas, un nombre inchangé de délégués sénatoriaux.
Le Sénat a également souhaité mieux coordonner les responsabilités communales et intercommunales. Il a assoupli le dispositif gouvernemental du stockage en tête de liste des candidats fléchés pour le conseil de l'intercommunalité, et s'est efforcé de concilier la liberté du choix des candidatures fléchées et la sincérité du scrutin. C'est pourquoi, dans les communes de 1 000 habitants et plus, le Sénat a limité la faculté de flécher à une partie de la liste. Tout siège vacant serait pourvu par le suivant de liste. Afin de conforter la légitimité démocratique des conseils communautaires, qui seront demain élus au suffrage universel direct, les candidats qui figureront sur la liste des candidats au conseil municipal figureront aussi séparément sur le bulletin de vote dans l'ordre de leur présentation.
Le Sénat a réglé le cas de la section électorale dépourvue de délégué au sein de l'intercommunalité : afin de permettre la participation des électeurs au choix des délégués communautaires, l'élection du ou des délégués s'effectuerait pour l'ensemble de la commune comme s'il n'y avait pas de sectionnement. Enfin, il a adopté une nouvelle dérogation aux critères démographiques de création d'une communauté d'agglomération, en étendant l'abaissement à 30 000 habitants de la condition de population de l'ensemble du périmètre intercommunal à la commune la plus peuplée du département.
L'Assemblée nationale a retenu l'architecture générale de la réforme des scrutins locaux. Elle a adopté le nouveau mode de scrutin des conseillers départementaux ainsi que l'abrogation du conseiller territorial. Elle a apporté des améliorations rédactionnelles, dont plusieurs avaient été proposées ici.
Parmi les ajouts adoptés par les députés, citons l'article 1er bis qui précise que le conseil général représente la population et les territoires qui la composent, réaffirmant ainsi le rôle du département comme garant de la solidarité sociale et de la solidarité territoriale.
De même, les députés ont précisé, à l'article 4, que les conseillers départementaux seraient indéfiniment rééligibles. Je vous proposerai de supprimer ce terme.
L'article 5 bis allonge à un an le délai interdisant à certains responsables de services départementaux de se présenter aux élections départementales s'ils n'ont pas, au préalable, abandonné leurs fonctions un an auparavant. En vertu de l'article 6 bis, tout conseiller départemental qui se serait présenté et serait élu dans un autre canton lors d'une élection partielle serait déclaré démissionnaire d'office de son mandat en cours, ce qui lui permettrait de conserver son nouveau mandat. L'article 7 bis dispose que tout candidat qui se présenterait simultanément dans plusieurs cantons perdrait de plein droit ses mandats de conseiller départemental. En revanche, l'Assemblée nationale a supprimé l'article 7 relatif à la domiciliation des conseillers départementaux au motif qu'il revient au bureau du conseil départemental de décider, par tirage au sort, des résultats du suffrage universel, ce qui est pourtant source de complexité.
L'article 8 étend désormais à l'ensemble des cantons la déclaration, pour les binômes de candidats, d'un mandataire financier, actuellement réservée aux cantons de plus de 9 000 habitants.
L'Assemblée nationale a également précisé les dispositions relatives au remodelage de la carte cantonale. Elle a repris l'amendement du Gouvernement déposé au Sénat à l'article 3 qui prévoit que le nombre de cantons sera égal à la moitié du nombre de cantons existant au 1er janvier 2013, arrondi à l'unité supérieure impaire, et que le nombre de cantons dans les départements de plus de 500 000 habitants ne pourra être inférieur à quinze. Pour tenir compte de la règle du nombre de cantons, celui des conseillers départementaux à Mayotte a été également augmenté. Au total, ces dispositions assurent le maintien de 52 cantons de plus que dans le projet initial.
L'Assemblée nationale a repris l'esprit de mon amendement sur le remodelage de la carte cantonale : outre des considérations géographiques et tout autre motif d'intérêt général, les dérogations tiendraient compte des facteurs démographiques et de l'aménagement du territoire. Par ailleurs, les dérogations géographiques ont été précisées pour éviter la constitution de cantons trop étendus.
A l'article 16, l'Assemblée nationale a étendu le scrutin proportionnel aux communes de 500 habitants. Son rapporteur, Pascal Popelin, a toutefois rappelé que les avis étaient très partagés sur le niveau démographique à retenir, mais qu'un consensus se dégageait pour l'abaisser. Il estime qu'il faudrait le situer entre 500 et 1 000 habitants.