Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 27 février 2013 à 14h30
Amnistie à l'occasion de mouvements sociaux — Article 1er, amendement 2

Christiane Taubira, garde des sceaux :

Du point de vue des principes, l’amnistie est une tradition républicaine. Le précédent président de la République, tout comme l’actuel, avait refusé de présenter un projet de loi d’amnistie. Le respect du principe de la séparation des pouvoirs conduit à considérer que le Parlement est libre d’estimer s’il y a opportunité et volonté politique de présenter une proposition de loi.

Cela étant, qu’il s’agisse d’un projet ou d’une proposition de loi, c’est la Constitution qui détermine, en son article 34, les conditions des textes d’amnistie.

Pour ce qui concerne la date, plusieurs choix sont possibles. Comme l’a dit précédemment le président Mézard, se référer à la date de l’élection présidentielle présente une cohérence par rapport aux lois d’amnistie précédentes, notamment à celles de la Ve République, lesquelles sont au nombre de vingt-cinq. Je le répète, il ne s’agit pas d’une première, d’un acte inédit, d’une innovation expérimentale.

Monsieur Portelli, vous avez raison de rappeler qu’il faut respecter les magistrats et s’incliner devant les décisions judiciaires qu’ils prennent en droit, eu égard au code pénal lorsqu’il s’agit d’infractions pénales, en conscience ; ils se prononcent au nom du peuple français.

Néanmoins, il est surprenant de vous entendre défendre les magistrats alors qu’ils ont été constamment disqualifiés, vilipendés sous le dernier quinquennat et qu’ils ont dû subir des mécanismes automatiques qui ont limité leur liberté d’appréciation. Des modifications de procédure les ont contraints non seulement à rendre difficile et parfois à engorger le fonctionnement des juridictions, mais surtout à prononcer de façon assez automatique des peines alors que nous, nous croyons à leur capacité d’appréciation. C’est le propre de la justice d’apprécier, d’individualiser et de se prononcer en conscience.

À cet égard, depuis le mois de mai dernier, le Gouvernement a déjà démontré à quel point il respecte les magistrats, à quel point il rétablit concrètement leur liberté d’appréciation, à quel point enfin il salue et organise leur indépendance dans la grande mission de juger.

Mesdames, messieurs les sénateurs de l’opposition, si nous nous retrouvons sur la question du respect des magistrats, cela signifie que vous vous joindrez à nous pendant tout ce quinquennat pour saluer leur travail, pour ne pas les discréditer, les disqualifier, et pour faire en sorte qu’ils puissent appliquer en conscience la loi votée par les parlementaires, députés et sénateurs.

Pour en venir à l’amendement n° 2 proprement dit, le Gouvernement émet un avis défavorable.

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